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mardi 12 mars 2013

De quoi Victorin Lurel est-il le symptôme ?

De quoi Victorin Lurel est-il le symptôme ?
On ne le connaissait pas, on ne peut pas connaître tout le monde, ils sont si nombreux, une quarantaine. Celui-ci nous avait échappé en mai dernier sur la photo de groupe. Il a pourtant un visage sympathique. On s'est renseigné, il a derrière lui un beau parcours politique, c'est l'homme fort de la Guadeloupe, il avait fortement soutenu Ségolène Royal en 2005. Hollande l'a repêché en faisant de lui son ministre des Outre-Mer (pourquoi "des?"). Il fallait que le président eût une sacrée confiance en son ministre et une singulière estime pour lui confier la délicate mission de représenter la Francevendredi dernier aux obsèques de Chávez, afin qu'il délivrât l'hommage officiel de notre pays au grand humaniste défunt. La tâche est accomplie. Le choix ne pouvait pas être meilleur. Louis XIV avait Bossuet, Hollande aura Victorin Lurel.
On ne veut pas être méchant, mais quand même, on aurait tort de se priver après toutes les saloperies dont ils ont accablé Sarkozy. L'épitaphe restera mémorable. Rappelons-la dans ses termes exacts : "Le monde gagnerait à avoir beaucoup de dictateurs comme Hugo Chávez, puisqu'on prétend que c'est un dictateur. Hugo Chávez, c'est de Gaulle plus Léon Blum."

Pétrification idéologique

Que ce propos soit ridicule, ce ne serait que risible. Mais l'insulte est lourde. Elle est faite à la démocratie, à De Gaulle et à Blum. Chávez, c'est vrai, a considérablement réduit la pauvreté dans son pays. Mais il l'a fait aux dépens de la richesse économique nationale et de l'ordre démocratique, et notamment des libertés, et au prix d'une corruption et d'une insécurité proverbiales. La comparaison est injurieuse entre le dictateur populiste vénézuélien et les deux hommes d'État français dont la rigueur morale et le sens de l'intérêt commun furent exemplaires. Le contexte officiel et solennel dans lequel s'est exprimé le ministre français au nom de son gouvernement et de son président ajoute encore à l'inconvenance. Cet égarement appelle deux observations.
D'abord, il révèle à quels automatismes et à quel sectarisme peuvent conduire l'aveuglement et la pétrification idéologique de la gauche française. Sa prétention à se faire le champion de la lutte contre la pauvreté est honorable, et il est arrivé aux gouvernants socialistes de réaliser cette ambition, Blum en est d'ailleurs l'exemple. Mais l'histoire offre des contre-exemples de cette efficacité, à preuve aujourd'hui, Hollande et son gouvernement qui appauvrissent la France sans enrichir les Français. L'hommage incongru rendu par notre pays sur les épaules de Blum et de De Gaulle à Chávez cautionne la politique que celui-ci a menée, inspiré par une finalité sociale au mépris de la réalité économique, de l'avenir du Venezuela et de l'exigence morale.

Record battu

Enfin, ce pas de clerc spectaculaire apporte une nouvelle fois la preuve du déplorable désordre qui règne aujourd'hui à la tête de l'État et qui se traduit non seulement dans la conduite des affaires mais dans les formes. On est habitué depuis quelques mois aux écarts de langage, aux fantaisies sémantiques, aux gaffes, aux dérapages commis par les membres d'une équipe gouvernementale semblable à une troupe d'écoliers dissipés et livrés à eux-mêmes. Victorin Lurel a battu le record vendredi à Caracas. Non content de se fourvoyer dans le choix de ses références historiques, non content de célébrer dans l'extase la mémoire de Chávez, il a commis le ridicule de laisser aller son sentiment dans une évocation lyrique du cadavre exposé aux yeux du peuple vénézuélien. Rapportons ses propos : "Il était tout mignon [...], frais, apaisé [...], pas joufflu [...], c'était émouvant." 
Dans la bouche d'un ministre, c'est inattendu et saugrenu. Dans la bouche d'un ministre de François Hollande, c'est moins surprenant, c'est même assez normal. Cela rend la politique plus humaine ! Cependant, Chávez tout mignon, on a peine à l'imaginer, fût-il mort. On préfère les termes utilisés dans son éloge funèbre par Nicolás Maduro, le dauphin désigné du dictateur défunt : "Chávez a donné son corps et son esprit, comme le Christ..." C'est moins tendre, mais c'est plus fort. 
Qu'en pense Mahmoud Ahmadinejad, qui était là lui aussi, entre amis ?

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