TOUT EST DIT

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mercredi 11 juillet 2012

Le royaume de la famille


Les caricatures d’Etat que sont nos prétendus Etats modernes détestent la famille, et, par voie de conséquence, l’institution fondatrice de la famille qu’est le mariage. La famille leur fait peur. La famille est, contre leur volonté de puissance, le seul lien de résistance inviolable. Il y a le secret des familles. Le mariage qui est la célébration publique de l’amour de deux êtres – d’un homme et d’une femme – et est en même temps l’annonce tout aussi publique, de la création, par cet homme et cette femme, d’une nouvelle zone secrète, dans la société : leur foyer.
« Nous fermerons un peu la porte,
« Nous mettrons du bois sur le feu… »
Ils fondent un « chez nous », qui sera, bien sûr, ouvert, accueillant… tout ce qu’on veut, mais, d’abord, un coin à eux, leur maison, leur appartement, leur domicile, leur porte, leurs clés… leur secret, leur monde et leur royaume.
Toute famille est un royaume.
« La famille est le lieu de toutes les violences », telle est la thèse officielle de ceux qui, en France, et peut-être en Europe, s’occupent de l’aide à l’enfance. Juges, assistants, psychiatres et psychologues ont fait de cette phrase leur postulat. Coups et blessures, torture morale, inceste, viol, agressions sexuelles et psychologiques, ce « foyer d’amour » est un « nœud de vipères ». D’ailleurs, il n’y a qu’à voir ce qu’elles deviennent ces familles, lors des héritages. Comme dit le dicton populaire « ils s’entendent bien… ils n’ont pas encore partagé… ». De même que les anticléricaux les plus radicaux sont des enfants de chœur, dans leur dénonciation des maux que l’Eglise porte en elle – « s’ils savaient la réalité… » – de même ces ennemis professionnels de la famille sont très en deçà de la réalité, quand on l’examine avec les yeux acérés de l’avocat du diable, « rencontre de deux égoïsmes, qui, en fait, restent d’autant plus étrangers l’un à l’autre qu’ils sont contraints, à la vie commune… mensonge installé, quasi automatique, par réflexe inconscient, dissimulation, manipulation, hypocrisies, volonté de puissance… on peut tout y mettre dans ce royaume où se reproduisent, en vrai, en vécu, tous les effets du péché originel.
Qui peut en douter, de la réalité de ce péché ?
Qui, ayant vécu en famille, peut encore croire les absurdités de Jean-Jacques Rousseau ?
Et pourtant, si le tableau veut être complet, où existent à ce point le don total, le désir renouvelé, la gratuité absolue, le sourire, le sacrifice, l’humour, la drôlerie, la gaîté, la joliesse et la beauté, la tendresse, le rire, le fou rire, les pleurs dans le rire et le rire dans les pleurs, l’extravagance, la prodigalité, l’économie, la fête, la vie ?
Vrai royaume avec ivraie et bon grain, à ne pas séparer avant le temps de la moisson. Vrai royaume humain dont le principe, plus fort que tout, est l’amour du roi et de la reine. La tendresse du Roi, le ventre de la Reine.
Toute famille est famille royale : les Capétiens ou les Atrides ? Saint Louis ou Barbe-Bleue ? Mais des rois… pas des présidents de la République… qui sont, d’ailleurs, des « sans famille ».
Et, pour être une famille, un royaume, il faut, pour commencer, un mariage.
— Le mariage, ça ne dure pas. L’amour non plus. Et si l’amour existait, au départ, le mariage saura le faire disparaître. Le pire ennemi de l’amour, c’est le mariage.
Le refrain est connu, et, s’il est aussi répandu, c’est qu’il doit contenir une bonne part de vérité. C’est l’évidence. Le mariage, qui est l’écrin de l’amour est aussi l’épreuve du même amour. Précisons. L’écrin protège l’amour des attaques extérieures. Il lui donne un cadre, un ordre à l’intérieur duquel il peut s’épanouir. Sans cette structure – cette institution – l’amour se disloque, s’éparpille, s’évapore. Il n’en reste rien.
Mais, le mariage, en forgeant cette protection contre l’extérieur, impose, par le même mouvement, l’épreuve intérieure. Il la renforce. Il l’aiguise. Il contraint les amants qui sont par nature, des menteurs, à l’épreuve de vérité.
« En mariage, trompe qui peut », disait notre bon Loysel, le juriste aimable et savant. Qui peut tromper, longtemps, en mariage ? En liaison extraconjugale, quand on se voit peu, et seulement pour les bons moments, il est facile, aisé, agréable, de jouer la comédie. C’est le plaisir de l’aventure, son piment et, aussi, son code obligatoire. Il ne faut surtout pas être vrai. C’est le lieu où, par principe, on badine avec l’amour… et où le badinage, surtout quand il s’agit d’un badinage passionné, fait la loi. Le mari ment à sa femme qui ne dit pas la vérité à son époux, mais ces petits mensonges ne sont rien à proportion du mensonge essentiel, consubstantiel à la passion hors mariage. Tout y est masque. C’est ce qui en fait le charme (provisoire). Rien n’y dure, mais l’espace d’un moment, la comédie a semblé être la vie. Tout s’efface avec le décor. Le petit matin est amer. Il faut beaucoup de drogue pour recommencer, après un certain temps.
En mariage, la vérité décape, avec son complice le temps, et son autre soutien, la communauté de vie, tous les faux-semblants, comédies, hypocrisies… le secret s’impose à l’extérieur. A l’intérieur, c’est la transparence aussi absolue qu’elle est involontaire. Ce n’est pas que chacun, jusqu’à la mort, n’y joue sa propre comédie. Mais, il en est le seul dupe. Car les autres, le conjoint, les enfants l’ont percée à jour, dès le premier instant. Le regard du nourrisson abandonné au sein de sa mère, noyé dans la tendresse paternelle, est, par sa nouveauté, une terrible lucidité sur l’état de la famille dans laquelle il arrive. Insensiblement, chacun, père, mère, enfants, avait pris son rythme, ses habitudes, sa routine et forgeait donc, tranquillement, son mensonge vital vis-à-vis des autres. Il ou elle arrive et son œil remet tout en place. Sa présence révèle les affections, les jalousies, les préférences, les routines, les vieilleries… il faut tout recommencer.
Dans les familles un peu étendues, neveux, nièces, petits-enfants, petits-neveux et petites-nièces renouvellent l’expérience, renforcent la tradition – car les enfants aiment les traditions – et pulvérisent les routines, car elles ne résistent pas à leurs yeux, qui sont la nouveauté absolue.
Dans ce royaume qu’est la famille, chaque enfant qui arrive est un Prince du sang, qui, comme tout prince, posera un problème, suscitera une difficulté et sera un sujet de fierté, une grâce pour ce royaume.
Devant cette vivante merveille, les employés de l’assistance publique, les fonctionnaires de l’éducation nationale, le juge et les administrations demeurent interloqués ou furieux, interdits ou haineux… cette réalité est, au sens propre du mot, insupportable.
J’ai voulu rassembler ces réflexions de base, que nous connaissons tous, pour que nous comprenions bien l’intolérance essentielle que notre système politique, fait d’individus et de masse – de masses d’individus – ressent à l’égard de la famille. La force des habitudes profondes de la nation, famille de familles, a longtemps résisté à ce système. D’où la nécessaire hypocrisie de nos présidents successifs… jusqu’au président normal qui fait de l’absence du mariage, de la négation pratique de la famille, la normalité.
Désormais, enfin, c’est dit, c’est clair, nous les familles, nous sommes les a-normaux, les anarchistes, les non-conformes. Acceptons cette grâce et cultivons-la. Sachons être, nous les vrais amoureux de l’ordre véritable, de vrais rebelles à l’encontre du désordre établi. C’est une chance qui n’a pas été donnée à tout le monde. Saisissons-la. L’ordre et la liberté marchent ensemble, et, chose quasiment inconnue depuis longtemps, la vertu et le rire sont enfin en ménage !

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