TOUT EST DIT

TOUT EST DIT
ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

dimanche 3 juin 2012

Succession de Bernard Thibault : CGT, ton univers impitoyable

Bernard Thibault ne souhaitant pas se représenter à la tête de la CGT pour un nouveau mandat, il a soutenu Nadine Prigent pour sa succession. Un choix rejeté jeudi par le Comité confédéral national. Les jeux étant désormais ouverts : qui seront les vainqueurs et les vaincus ?

Bernard Thibault ne souhaitant pas se représenter à la tête de la CGT pour un nouveau mandat, il a soutenu Nadine Prigent pour sa succession. Un choix rejeté par le Comité confédéral national. Comment expliquer ce rejet ?

Jean-Luc Touly : Je pense que la décision de Bernard Thibault de ne pas se représenter ne s’est pas uniquement fondée sur la base d’une volonté personnelle. Depuis plusieurs mois, voire quelques années, une contestation s’est développée et manifestée de manière récurrente, celle-ci se traduisant aujourd’hui par le refus du Conseil confédéral national de le suivre dans son soutien à Nadine Prigent.
En étant plutôt proche du Parti communiste, Nadine Prigent est dans une ligne classique. Pourtant, je ne pense pas que se soit sa propre personne qui soit remise en cause. Indirectement, il y a eu un rejet du bilan de Bernard Thibault sur fond d’une contestation qui s’est cristallisée depuis plusieurs années. En effet, il a été vivement critiqué sur un certain nombre de positions, notamment de la part de minorités de la Confédération qui aujourd’hui expriment leur rejet de cette façon. Il y a donc eu un concours de circonstances qui le sanctionne aujourd’hui et qui se manifeste par le rejet de Nadine Prigent. La situation est donc assez ubuesque.
Les jeux sont donc désormais ouverts : des personnes qui jusqu’à présent étaient minoritaires vont pouvoir s’exprimer et peut être se présenter. Autrement dit, Eric Aubin n’est pas assuré d’être désigné prochain Secrétaire national de la CGT.

Dans les années 1990, la CGT avait « acté » une séparation avec le Parti communiste. Ce sujet refait-il surface dans le débat ? A t-il pu jouer ?

Effectivement. Ce débat revient mais pas dans le cadre d’une confrontation entre pro-communistes et pro-socialistes. Il ne s’agit pas tant d’un problème d’étiquettes que d’une question de nature purement stratégique vis-à-vis du nouveau gouvernement de François Hollande.
Deux stratégies s’opposent : la première s’inscrit dans un accompagnement du gouvernement là où la seconde défend une certaine indépendance syndicale plus critique face au pouvoir. Cette dernière renvoie plutôt à une stratégie de lutte dans un rapport de force assez classique. Thibault était pour sa part beaucoup moins politisé et davantage dans une logique d’accompagnement des mesures qui sont celles d’un gouvernement de gauche. D’ailleurs, il a annoncé son vote en faveur de François Hollande, une pratique nouvelle qui rompt avec les habitudes du passé.
Deux tendances ont créées ce vote de rejet : la contestation issue de l’aile gauche de la CGT, et ceux qui sont plutôt favorable à un certain dialogue si celui-ci s’exerce dans l’indépendance et non dans le cadre de déjeuners avec le Président ou par un quelconque soutien politique. Ce phénomène a joué dans la mesure où des personnes plutôt favorables avec l’actuelle direction syndicale ont rejoint la minorité classique, caractérisée par une opposition à Thibault, afin de maintenir cette indépendance.
Ces minorités voient aujourd’hui une opportunité de pouvoir s’exprimer et prendre une place plus importante ce qui tranche avec leur relative discrétion dans le passé. Il y a donc une remise en cause de certaines pratiques.

Il existe différentes fédérations et unions au sein de la CGT. Quels sont les rapports de force aujourd’hui ?

Les fédérations ont toujours eu un pouvoir très fort. Certaines ont même des pouvoirs absolument énormes, ce qui amène à des oppositions entre elles et des unions départementales plus démocratiques du fait de leurs ancrages locaux et d'une plus grande représentativité : secteur privé, secteur public, PME, grandes entreprises... Cette confrontation est donc remontée.
Thibault a adopté une politique du « laissé faire » avec ces fédérations. Il y a donc une distorsion très forte entre certaines fédérations très puissantes et peu démocratiques et les unions départementales, ce qui a débouché sur un nombre important de critiques susceptibles de faire bouger les lignes.
Certaines fédérations vont donc se battre pour conserver leurs pouvoirs. Je pense que l’interprofessionnel va gagner, encore faut-il une unité entre des courants radicaux et réformistes. Mais il est difficile de se prononcer sur les résultats d’autant plus que les représentants désignés dans les instances vont eux aussi être remis en cause.

0 commentaires: