TOUT EST DIT

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vendredi 4 mai 2012

L'Europe, si absente, si présente 


Quelle sera la politique étrangère de la France au lendemain de l'élection ? Ceux qui auraient aimé en savoir davantage durant le débat télévisé seront restés sur leur faim. Pas un mot sur la Chine. Pas davantage sur la Russie, l'Afrique ou le Proche Orient. Rien sur le Printemps arabe qui concerne pourtant la France et des millions de Français. Juste quelques mots sur la menace terroriste au Sahel, qui a permis aux deux candidats d'exprimer pudiquement leur seul point d'accord. Et une minute sur l'Afghanistan, même si le débat est désormais essentiellement technique, sur le rythme du retrait, pas sur son principe.
Bref, circulez, le monde peut attendre. C'est sur l'économie qu'on gagne une élection, pas sur la diplomatie. Et peu importe, diront les pragmatiques de la machine électorale, si c'est là l'un des deux grands domaines réservés de l'homme que tout un pays, justement, doit choisir ce dimanche.
Concernant plus strictement les questions européennes, le climat, mercredi soir, était toutefois différent, plus étrange. Bien sûr, on a beaucoup entendu parler de l'Allemagne, « le » bon élève, l'un vantant sa compétitivité, l'autre sa concertation sociale. On a entendu l'Espagne citée en exemple à ne pas suivre. Mais, au bout du compte, peu de choses sur les grandes questions du moment, sur la stratégie pour sortir de la crise de l'euro. Comme si l'Europe, sujet tabou pour tout candidat soucieux de ne pas froisser les extrêmes (ni ses propres troupes eurosceptiques), était à la fois omniprésente (et pour cause : notre économie en dépend) et curieusement absente en tant que telle.
Dès lundi matin, pourtant, ce sera le sujet de préoccupation numéro 1 du nouvel élu, quel qu'il soit. La crise n'est pas derrière nous et, depuis trois ans, on ne cesse de revenir au défi essentiel auquel est confrontée l'Europe : se relancer ou s'exposer à son éclatement. Les déclinaisons sociales, économiques et politiques de cette crise sont de plus en plus évidentes à travers le continent. La perte de crédibilité des partis traditionnels et la montée des extrémismes sont des signaux désormais récurrents. Le chômage des jeunes est une plaie qui s'étend.
En outre, si la fracture Est-Ouest a pu accompagner la construction européenne dès sa naissance après-guerre, la vraie frontière, très insidieuse, qui est en train de se dresser, est une frontière Nord-Sud, forgée par l'austérité et la récession. Plus on tarde à y répondre et plus l'écart de compétitivité, déjà important, se creuse entre la Méditerranée et la mer du Nord.
C'est la raison pour laquelle de nombreuses voix, même chez les spéculateurs les plus pragmatiques, évoquent la nécessité de faire faire à l'Union européenne un saut fédéral afin que l'euro cesse d'être une proie facile pour les marchés et devienne un instrument monétaire au service d'une vision politique. Cela implique un renouveau du couple franco-allemand, un débat sur le rôle de la BCE, sur la gouvernance économique, sur la façon de réintroduire le principe de solidarité, sur la validation démocratique de l'édifice européen. Ces débats peuvent paraître abstraits, ils ne le sont pas. En tous les cas, pas plus que l'avalanche de chiffres de l'autre soir. Car sans une action collective et concertée des Européens, il sera difficile à quiconque de trouver la recette miracle dont rêvent les deux candidats : allier la rigueur et la croissance.

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