TOUT EST DIT

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jeudi 22 mars 2012

Combien coûte la mesure Sarkozy sur l'emploi des seniors ?

Avant la "pause" de la campagne, le président-candidat a multiplié les annonces non chiffrées dimanche dernier sur M6, dont une exonération permanente de charges pour l'emploi d'un senior au chômage, potentiellement très coûteuse. L'Institut de l'entreprise, qui évalue l'impact budgétaire des programmes des candidats, a évalué son coût annuel au bout de trois ans entre 500 et 900 millions d'euros pour 35.000 bénéficiaires.
"Je propose pour toute personne de plus de 55 ans actuellement au chômage qui serait embauché avec un CDI ou un CDD d'au moins six mois une exonération à 100%, permanente, de charges sociales",  a déclaré Nicolas Sarkozy, dans l'émission de M6 Capital le 18 mars. Cette exonération de la totalité des charges sociales pour toute embauche d'une personne de plus de 55 ans en CDI ou en contrat à durée déterminée de plus de six mois figurait déjà dans la loi de novembre 2010 sur la réforme des retraites. Mais elle était conçue comme provisoire et les décrets d'application n'ont en fait jamais été publiés. Cette nouvelle proposition vient donc confirmer et amplifier la mesure précédente, Nathalie Kosciusko-Morizet, porte parole du président-candidat, ayant récemment précisé que l'exonération serait permanente et limitée au plafond de la Sécurité sociale, à savoir 36.372 euros brut.
Effet d'aubaine

Nicolas Sarkozy s'est évidemment bien gardé, comme d'ailleurs pour l'ensemble de son programme qui n'est toujours pas publié, de donner le coût budgétaire de cette mesure, ni son financement. Beaucoup d'économistes ont relevé que cette mesure aurait par définition un effet d'aubaine (la plupart des embauches auraient en effet eu lieu de toutes façons), rendant difficile l'évaluation de son impact et le nombre potentiel de bénéficiaires.
L'Institut de l'entreprise, qui, comme d'autres think tanks, s'emploie à chiffrer le plus précisément possibles les programmes des principaux candidats s'y est néanmoins essayé, en partant d'hypothèses les plus réalistes possible. Pour chiffrer l'impact budgétaire de cette mesure, on peut en effet s'appuyer sur celle  déjà inscrite dans la réforme des retraites et connue sous le nom d' « aide à l'embauche pour les seniors ». Le coût avancé à l'époque était de 50 millions d'euros pour 35.000 bénéficiaires, sachant que l'exonération était totale quand il s'agissait d'un SMIC et était ensuite réduite linéairement jusqu'à 1,6 SMIC. De plus, ce dispositif était limité à un an. "Dans le cas présent, Nicolas Sarkozy parle d'exonération à 100% dans la limite du plafond de la sécurité sociale, cette exonération étant supposée pérenne, ce qui implique un coût bien supérieur", note l'Institut de l'entreprise.
Deux variables
"L'évaluation de cette mesure repose sur deux variables", indique l'Institut. D'abord, le nombre de bénéficiaires : en hypothèse basse, on conserve le volume retenu dans le PLF 2011, soit un stock de 35.000 personnes. Dans la mesure où le stock total mettrait environ trois ans à se constituer (on considère que les seniors concernés ont 58 ans en moyenne, donc une durée dans le stock de quatre ans maximum, jusqu'à l'âge de départ à la retraite. Par ailleurs, il fait aussi tenir compte des CDD qui ramènent cette durée à la baisse) : on aurait donc en rythme de croisière : 3 x 35.000 = 105.000 bénéficiaires. Et deuxièmement, le montant des exonérations de charges sociales. la limite du plafond de la sécurité sociale, évoquée par la porte parole du candidat, n'est pas très explicite. Si l'exonération est totale jusqu'à un salaire brut de 36.372 euros par an (soit 3.031 euros par mois, donc environ 2,2 SMIC) elle pourrait représenter jusqu'à 1.200 euros par mois (40% de charges - après suppression des charges patronales à destination de la branche famille - sur la base de 3.000 euros bruts par mois). Pour une personne au SMIC, l'exonération serait de 200 euros en plus des allègements Fillon. On part ici du principe que la mesure s'adressant aux chômeurs, la plupart des salariés concernés seraient plutôt des salariés relativement proches du SMIC ; en conséquent, on retient une exonération moyenne comprise entre 400 à 700 euros par mois et par bénéficiaire.
Risques d'effets pervers

Sous ces hypothèses, le coût d'une telle mesure peut donc être évalué à un montant allant de 400 x 12 x 35.000 = 168 millions d'euros à 700 x 12 x 35.000 = 294 millions d'euros pour 35.000 bénéficiaires en stock la première année. Dans la mesure où le stock total mettrait environ 3 ans à se constituer on peut estimer le coût final en année pleine trois fois supérieur, soit, selon l'Institut de l'entreprise à une fourchette allant de 504 millions à 882 millions d'euros.
Un coût relativement élevé donc, lié à son caractère permanent, même si l'impact économique de cette mesure serait effectivement de réduire le taux de chômage des seniors, estime l'Institut de l'entreprise. En 2010, la part de chômage des 55-64 ans est de 2,8%, soit 221.564 chômeurs pour un taux de chômage de 6,7%. Le taux d'emploi des plus de 50 ans s'établissait quant à lui la même année à 53,9% contre 81,9% pour les 25-49 ans selon l'Insee. En revanche, il y a un "effet pervers inhérent à la mesure" : l'exonération étant permanente, il peut être tentant pour l'employeur - et neutre pour l'employé senior - de rompre le contrat en cours et d'en contracter un nouveau qui sera éligible à la mesure. "Cela peut être évité en prévoyant, comme c'est déjà le cas pour les dispositifs "zéro charge" destinés aux TPE, une condition de non-licenciement par le même employeur dans les années qui précèdent la conclusion du contrat".
Retrouvez l'ensemble des chiffrages de l'Institut de l'Entreprise sur le site Débat&co.

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