TOUT EST DIT

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mardi 20 décembre 2011

L'enjeu nord-coréen

Kim Il-sung, le fondateur. Kim Jong-il, le père de l'État nucléaire. À présent, Kim Jong-un, le général méconnu. La dynastie nord-coréenne, seule dynastie communiste de la planète, prête souvent à sourire. Comme un curieux film muet projeté à distance de milliers de kilomètres. Avec son dictateur et les paillettes du régime. Avec ce peuple qui pleure sa mort à chaudes larmes, à la télévision comme dans la rue. Comme si, anthropologiquement, une zone de dépression affligeait tout un pays.

Le choix même des noms semble sorti d'un mauvais film. Kim Jong-un, qui va succéder au leader défunt, signifie « nuage vertueux » en coréen. La parodie est tentante, évidemment. Irrésistible même. Elle masque pourtant un régime dictatorial sans pitié, qui affame son peuple et dont l'arme nucléaire constitue une menace constante pour la stabilité du Pacifique nord.

Accueillie avec inquiétude à Washington, ravivant les craintes fondées de Séoul et Tokyo, l'annonce, hier, de la mort de Kim Jong-il rappelle à l'attention du monde la persistance du conflit irrésolu entre les deux Corée depuis 1953. Ce fut l'un des grands affrontements de la Guerre froide entre Soviétiques et Américains. C'est l'un des grands enjeux stratégiques entre Chinois et Américains, dans une région du monde, le Pacifique, devenue aujourd'hui centrale.

Depuis qu'ils ont supplanté les Soviétiques dans le soutien au régime coréen, les Chinois n'ont pas fléchi d'un pouce dans leur recherche de statu quo. Ils sont les seuls vrais alliés du régime. La réunification des deux Corée signifierait pour Pékin l'établissement d'une frontière directe avec un pays qui accueille d'importantes bases militaires américaines, où plus de 28 000 soldats sont stationnés. Aussi, les dirigeants chinois continuent-ils de tenir en vie cette étrange dynastie, mêlant héritage léniniste, peur de la bombe et culture traditionnelle.

Manifestement préparée, la transition en cours à Pyongyang a d'autant plus réveillé les craintes de déstabilisation, que le régime a choisi ce jour de deuil pour faire deux essais de missiles à courte portée. Les essais nucléaires de 2006 et de 2009 sont encore dans toutes les mémoires des capitales de la région, notamment au Japon.

La mort de Kim Jong-il intervient alors que Washington et Pyongyang étaient sur le point de relancer leur dialogue portant sur l'apport d'une aide alimentaire américaine en échange d'un gel du programme nucléaire. Alterner le chaud et le froid est le propre de tous les régimes dictatoriaux. On se souvient, au début des années 2000, des tentatives de rapprochement entre les deux Corée et des visites officielles à Pyongyang des responsables sud-coréens et japonais. Avant une nouvelle phase de gel des relations régionales.

Le changement à la tête de cet État-prison sans égal sur la surface du globe, avec toutes les incertitudes qui planent sur la réelle capacité de « nuage vertueux » à prendre les rênes du pouvoir, ouvre néanmoins une fenêtre diplomatique. Si l'état d'alerte était, logiquement, de mise hier en Corée du Sud, les responsables américains et chinois sont surtout prudents. Le maître mot est la stabilité. Autorise-t-elle une évolution ? C'est à Pékin que se joue l'ouverture au monde de cet État-prison. Autant dire une ouverture, si jamais, fatalement contrôlée.

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