TOUT EST DIT

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dimanche 20 novembre 2011

Joly, les dessous d'un exil

Tel le général De Gaulle parti à Baden Baden en son temps, la candidate écologiste a quitté Paris quelques jours pour prendre du recul. Et mieux revenir. 

Avec quatre mois d'avance, Eva Joly a vécu le 15 novembre son mardi gras. Une journée clé, qui avait pourtant bien commencé, et qui s'est terminée pour elle dans l'écoeurement de compromis auxquels son système digestif de novice de la politique n'est pas encore habitué.  
Le matin, l'ancienne juge est l'invitée de la matinale de France Inter. Avant l'émission, son co-directeur de campagne Stéphane Sitbon la prévient par téléphone des dernières évolutions des négociations avec le PS: "Il y aura des accords sur les désaccords." A l'antenne, Joly fait le service après-vente et peut tranquillement prendre le train pour Strasbourg, où elle doit participer à une session du parlement européen. 
Pendant la journée, notamment en raison d'une rencontre avec les élèves de Sciences-Po Strasbourg, elle suit peu et mal ce qui se trame à Paris. Ce sont des journalistes qui, en milieu d'après-midi, l'informent des conclusions des négociations et de ce qui sera voté par le conseil national du Parti socialiste. Elle trouve ça "pas trop mal", selon un proche, et elle affirme publiquement: "Il faut se féliciter de la qualité du travail fait par nos négociateurs et de cet accord à minima."  
Jusqu'ici, ce mardi 15 novembre, tout va à peu près bien au point que l'eurodéputé vert Yannick Jadot confie: "On ne va pas se cacher, les désaccords qui subsistent avec le PS, c'est intéressant pour la campagne d'Eva. Cela montre que nous ne sommes pas pareils que les socialistes." 
Le point de rupture, pour la candidate à l'Elysée, sera la révélation de l'intervention d'Areva. Via le député socialiste de la Manche Bernard Cazeneuve, la firme nucléaire est parvenue à faire sauter un paragraphe de l'accord PS-écolo, sur le traitement du combustible MOX. Paragraphe re-rédigé depuis, mais le mal est fait: la guerre contre les lobbies, c'est une des spécialités de la Franco-norvégienne.  
Trompée par Baupin et Duflot
Pour elle, le petit jeu a assez duré, c'est décidé, elle rentre à Paris et veut s'isoler. Car à la base, Joly et une partie de son entourage voulaient "un accord sec". Comprendre: un texte très général -voire évasif- de deux pages, et non sur trente pages trop engageantes et précises.  
"Eva a été instrumentalisée par la direction écolo, qui s'est servie de sa radicalité pour peser dans le rapport de force face à Hollande", analyse un membre de son équipe. Qui complète: "L'intervention d'Areva l'a rendue furax." "Elle déteste les relations incestueuses entre le pouvoir politique et l'argent", insiste Sergio Coronado, l'un de ses deux directeurs de campagne. C'est l'honneur d'ancienne juge de l'affaire Elf qui est en jeu. 
Là encore, il faut revenir en arrière. Mi-octobre, comme le rappelle un conseiller de Joly, "le parti a demandé à Eva d'aller à Fukushima. Elle en est revenu déterminée, et de plus en plus convaincue, elle qui n'est pas née écologiste, de l'impératif de sortie du nucléaire. Elle était accompagnée de Denis Baupin, qui fut par la suite l'un des négociateurs les plus actifs avec le PS dans cet accord où on n'a finalement pas tranché sur l'EPR de Flamanville. Pareil pour le dossier de l'aéroport de Notre-Dame des Landes: cet été, elle a entendu là-bas Cécile Duflot exhorter les gens à ne rien céder". Et l'on sait aujourd'hui que le projet d'aéroport a été acté comme un des désaccords de l'accord.  
Où est Eva?
Se replonger dans tout ce contexte permet de comprendre l'attitude de retrait adoptée en ce moment par Eva Joly. Un retrait que Noël Mamère a vendu avec un certain sens du "teasing". Jeudi 17 novembre, dans une interview au site Public Sénat, le député de Gironde laisse entendre l'incroyable: "Eva Joly (...) s'interroge. Elle a raison de prendre du champ pour se donner un délai de réflexion."  
Comment? Au terme d'une semaine folle en allers-retours entre les écologistes et le PS, la dame aux petites lunettes rouges songerait à renoncer? Un très proche de Joly assure aujourd'hui que "cette phrase de Mamère, c'était pour créer le suspens". Un autre la juge plutôt comme "une maladresse". Toujours est-il que l'objectif de l'équipe de la candidate est de "faire revenir la lumière sur la candidate, et non sur l'appareil". Créer du désir et lui permettre de prendre de la hauteur.  
D'après nos informations, Eva Joly n'est actuellement ni à Paris, ni dans sa maison bretonne de l'île de Groix. Mais à la campagne, pas très loin de la capitale. "Plus qu'une prise de recul, je vois ça comme une prise d'élan", espère une des personnes qui l'entourent quotidiennement. 

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