TOUT EST DIT

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vendredi 18 novembre 2011

Au tribunal de Paris, la "drôle de guerre" de Samsung et Apple

"C'est le dernier épisode d'une guerre totale, selon les propres mots de la direction de Samsung, totalement engagée contre Apple et qui vise ni plus ni moins à sortir Apple du marché de la téléphonie mobile." L'avocate d'Apple ne mâche pas ses mots, ce 17 novembre, au tribunal de grande instance de Paris. Il faut dire que l'enjeu est de taille : Samsung, qui accuse Apple de violation de plusieurs brevets, demande tout simplement une interdiction immédiate de vente de l'iPhone 4S, le dernier-né de la marque à la pomme.

Dans la salle, l'ambiance est, elle, plutôt détendue. Au dernier rang, cinq cadres de Samsung, venus spécialement de Séoul, suivent les débats traduits en direct en coréen. Sur le banc d'en face, deux de leurs homologues d'Apple suivent une autre traduction, en anglais celle-là. Dans un coin de la salle, ceux et celles dont le vol est arrivé ce matin ont empilé leurs valises.


LICENCES ET CONTRATS

L'audience est donc suffisamment importante pour que chacune des deux entreprises, outre leurs six avocats chacune, aient jugé bon de faire venir des cadres de l'autre bout du monde. Mais que reproche Samsung à son concurrent (dans la téléphonie, les tablettes) et partenaire (dans la construction de puces) ? L'utilisation de plusieurs brevets portant sur la norme UMTS (téléphonie 3G). Et le géant coréen demande donc, en référé, l'interdiction de la vente des iPhone 4S.

Durant l'audience, ce ne sont pas seulement deux poids lourds de la téléphonie qui s'affrontent, mais aussi deux philosophies : Samsung mène la bataille sur le terrain technique, Apple sur le terrain juridique... et politico-économique. Armés de multiples panneaux bardés de schémas, de documents techniques et d'analogies, les conseils de Samsung sont entrés, durant plus d'une heure, dans le détail de leurs brevets portant sur la qualité de transmission des données. Des brevets "essentiels", selon Samsung, qu'Apple utiliserait sans autorisation.

Face à eux, les six avocats d'Apple opposent un argument simple et entièrement juridique : ils ne contestent pas l'importance des brevets de Samsung, ni le fait que les produits Apple les utilisent. Mais ils affirment, contrat en main, que l'entreprise dispose d'une licence pour ces brevets par le biais de son contrat avec Qualcomm, le fabriquant de puces électroniques utilisées pour la 3G dans les iPhone. Un argument conforté par une lettre envoyée par Samsung à Qualcomm, lui demandant de cesser d'accorder des licences à Apple, quelques jours après le dépôt d'une plainte d'Apple contre Samsung. De leur côté, les conseils de Samsung avancent que l'entreprise ne touche pas de redevance de Qualcomm, et estiment donc que le fabricant de puces ne peut pas, légalement, concéder de licences à des tiers.

ABUS DE POSITION DOMINANTE

Pour la firme à la pomme, toute interdiction de vente mettrait, de fait, Samsung en capacité de profiter d'un abus de position dominante. Mais la présidente de la première chambre ne semble pas convaincue. "Au fond, il n'y a qu'un problème de redevance", tranche-t-elle. Lorsqu'une compagnie détient un brevet qui fait partie d'une norme, elle doit en effet proposer obligatoirement des licences à toute entreprise qui en fait la demande. Apple et Samsung sont cependant en désaccord sur le montant de ladite redevance. Samsung demande 2, 4 %, et ironise sur la marge que touche Apple sur chaque terminal vendu. "Cela n'empêchera pas Apple de continuer à fabriquer et à vendre des téléphones", explique un des avocats du géant coréen.

Mais selon Apple, la plainte de Samsung est avant tout une manière de faire pression. "Si vous ouvrez un iPhone, vous y trouverez deux puces : une puce Samsung, et une puce Qualcomm", détaille un avocat d'Apple, brandissant un téléphone sous scellés. "Nos terminaux sont compatibles avec la norme UMTS depuis 2007 ; Samsung ne peut pas faire semblant de le découvrir aujourd'hui."

Après plus de quatre heures de débat, la présidente pose une question finale : y a-t-il une procédure de conciliation en cours ? Non, répondent les deux parties après un bref silence. "Nous ne sommes pas là pour déterminer un taux de licence", assène la présidente, avant de mettre le jugement en délibéré au 8 décembre. Sur les bancs du fond, le gros de la délégation coréenne a levé le camp depuis une bonne heure.

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