TOUT EST DIT

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samedi 8 octobre 2011

Des femmes à mains nues

Deux pays méconnus, le Yémen et le Liberia, mis en évidence. Trois femmes saluées. Mais une seule méthode récompensée, la non-violence. Ce prix Nobel de la paix 2011, décerné sur le mode ex aequo, ne déçoit pas. Mais il surprend. Après l’extraordinaire bouleversement politique et culturel que représente la révolution en Tunisie ou en Egypte, on attendait que soit distingué(e) l’un(e) de ces jeunes courageux (ou courageuses) qui ont réussi ce qui, il y a un an encore, semblait impossible : écarter le clan Ben Ali et le clan Moubarak.

En Tunisie comme en Égypte, le mouvement démocratique est à peine au début du chemin. Les prédateurs que sont les islamistes ou les tenants d’un pouvoir strictement militaire sont aux aguets. Un prix accordé aux pionniers du printemps arabe aurait donc été une utile bouffée d’oxygène et un joli coup de pouce. Car un Nobel de la paix a deux dimensions. C’est soit une récompense a posteriori, soit un encouragement a priori. En 2009 le Nobel de la paix était bien allé à un Barack Obama en début de mandat qu’on voulait stimuler alors qu’à la vérité il n’avait pas fait grand-chose de tangible…

Mais c’est vers le Yémen que le jury du Nobel s’est tourné, comme pour inclure de la façon la plus large les révolutions arabes en gestation. La jeune journaliste (32 ans) Tawakkol Karman est de ce point de vue une parfaite lauréate. Avec le concours de son mari, elle a bravé non seulement le président en place, mais aussi tous ses cousins, voisins et anciens camarades de classe qui pensent bêtement normal que les femmes doivent rester à la maison. En s’érigeant en figure centrale de la révolution yéménite, Tawakkol Karman jaillit en pleine lumière dans un pays où, comme en Arabie saoudite, la presque totalité des femmes ne sort dans la rue que vêtue de noir et voilée de la tête aux pieds. Le jury du Nobel s’honore d’avoir distingué cette vraie révolutionnaire.

Les deux autres lauréates, les Libériennes Ellen Johnson Sirleaf et Leymah Gbowee, complètent le palmarès. Elles aussi ont pour credo la lutte non-violente, ce qui justifie pleinement un prix Nobel de la paix. Alors que beaucoup d’hommes n’envisagent le combat contre la dictature que les armes à la main, elles ont installé avec ténacité, intelligence et lucidité une stratégie fondée sur l’éradication de la violence. Il y a forcément du Gandhi dans ce choix. Cette référence indienne n’est pas le moindre éloge qu’on peut adresser à ces femmes de bonne volonté. Car se bagarrer à mains nues contre une guerre civile est le type même du défi absolu.

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