TOUT EST DIT

TOUT EST DIT
ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

vendredi 27 mai 2011

Justice pour Srebrenica

Le 11 juillet 1995, la ville de Srebrenica tombe aux mains des forces serbes de Bosnie. La population civile est alors regroupée. Puis contrainte de marcher durant quatre kilomètres vers la zone industrielle. Les soldats de Ratko Mladic procèdent alors au tri. D'un côté, les femmes et les enfants sont déportés pour « nettoyer » le territoire. De l'autre, les hommes âgés de 16 à 70 ans sont poussés vers des hangars. Dans les quatre jours qui suivent, près de 8 000 musulmans bosniaques vont être assassinés, puis enterrés dans les fosses communes que les soldats de Mladic leur ont fait creuser. L'Europe assiste, inerte, au retour des horreurs du passé, dans une « zone de sécurité » de l'Onu.

Ce massacre, le crime de guerre le plus grave depuis la Seconde Guerre mondiale, est alors le point culminant de la politique de nettoyage ethnique en cours dans les Balkans. Les Serbes n'en sont pas les seuls responsables, mais Srebrenica devient rapidement un symbole de barbarie. D'autant plus douloureux qu'il est perpétré sous le regard impuissant de 400 casques bleus hollandais, censés protéger les populations civiles.

C'est cette horreur, et cet affront, que l'arrestation, hier, du « boucher des Balkans » vient, en partie, de laver. Les mères, les veuves, les soeurs, les filles de ces hommes massacrés pour leur seule appartenance ethnique ont exprimé leur sentiment que justice pouvait enfin être faite. Car Mladic, avec la caution du président serbe Slobodan Milosevic, et surtout celle du chef des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic, était le principal responsable de la stratégie de découpage ethnique en Bosnie.

L'oeuvre de justice que permet l'arrestation et la rapide extradition de Mladic à La Haye vaut pour les victimes. Elle vaut aussi pour la Serbie, les Balkans et l'Europe. Le message lancé aux criminels en cavale est sans équivoque. Même quinze ans après les faits, crimes de guerre et génocides ne connaissent pas de prescription. C'est un signal important qui renforce les juridictions pénales internationales. De façon encore plus éloquente que la mort de Ben Laden, récemment.

Pour la Serbie, engagée depuis quelques mois dans un effort de pacification vis-à-vis du Kosovo et demandeuse du statut de candidate à l'adhésion à l'Union européenne, c'est aussi un signal politique. La cavale de Mladic ¯ et les soutiens au sein des forces armées qui l'ont favorisée ¯ constituaient un obstacle majeur sur la route de Belgrade vers Bruxelles.

Saisie par le conseil des ministres européens, la Commission européenne doit rendre, en octobre, un rapport sur le respect ou non par la Serbie des critères à remplir pour l'obtention du statut de candidat. En novembre dernier, la Commission soulignait ses réserves en matière de corruption, de réforme du système judiciaire, de réconciliation avec le Kosovo. Des progrès ont été récemment accomplis sur ce dernier volet, mais Bruxelles attend des résultats concrets.

L'arrestation de Mladic n'est pas tout, mais elle donne un élan politique considérable au rapprochement de Belgrade et de l'Europe. « La Serbie a vocation à entrer dans l'Union européenne », a très clairement affirmé, hier, Nicolas Sarkozy. L'élargissement n'est certes pas un thème porteur actuellement dans l'opinion européenne, mais la pacification des Balkans est vitale pour les populations qui furent durement frappées par la guerre il y a quinze ans. Elle l'est aussi pour l'Europe.

0 commentaires: