Quel parti peut-il honnêtement se réjouir des résultats de ces cantonales ? Aucun. Le niveau de l’abstention pourrait suffire à résumer le degré de désintérêt des Français pour un scrutin considéré à juste titre, comme marginal. Il va plus loin en exprimant l’exaspération silencieuse du pays contre une classe politique de plus en plus décalée par rapport au réel.
Et ce n’est pas fini… Hier soir, les prestations à la télévision des dirigeants de la majorité et de l’opposition, comme des autres mouvements qui s’estiment «différents», ont montré qu’au-delà des mots ils n’avaient toujours rien compris au phénomène de rejet dont ils sont l’objet : mêmes vantardises des vainqueurs, mêmes dénis des vaincus, mêmes langues de bois des uns et des autres, mêmes promesses qui sonnent creux, mêmes comédies hypocrites devant les caméras comme ce numéro rassembleur surréaliste de Patrick Devedjian. Les artifices grossiers après les affaires choquantes ? Le cocktail s’annonce dévastateur.
44 % de participation à un tel rendez-vous électoral, cela relève presque du miracle tant ces élections ont été instrumentalisées jusqu’à l’insupportable par l’ensemble de ses acteurs. Cette agitation cache une vérité dérangeante : au premier tour, tous les mouvements en lice sauf un (Europe Ecologie-Les Verts) avaient perdu des voix ! Si on la regarde de près, la «poussée» du Front national, par exemple, n’est que très relative : elle résulte avant tout de l’affaiblissement spectaculaire de l’UMP. Le parti de Marine Le Pen prospère, en effet, sur la porosité avérée de sa frontière avec l’aile la plus dure du parti présidentiel. Ses progrès traduisent surtout une droitisation très nette de la France conservatrice. Le FN ressort de ce scrutin avec l’assurance que ses idées les plus radicales et parfois les plus simplistes ont été banalisées, intégrées pleinement au débat. Quant à la gauche, sa victoire est plus laborieuse qu’il n’y parait car elle ne correspond à aucun élan populaire réellement mesurable. Elle n’ouvre pas «la porte du changement»comme le prétend Martine Aubry. Elle empile seulement les briques pour approcher les 50 % mais en superposant des divergences fondamentales. Comment résistera cette construction bancale au choc des primaires ? C’est une autre histoire…
Si ces cantonales 2011 sont, comme on l’a entendu, «le coup d’envoi de la présidentielle 2012», alors il y a lieu de s’inquiéter, et de redouter une profonde fracture démocratique. La France politique n’a vraiment pas bonne mine ce matin. Et s’il faut relativiser la valeur des sondages, on ne peut que s’interroger en voyant le chef de l’Etat arriver, dans l’un d’eux, en troisième position avec seulement 17 % des intentions de vote à un an seulement de l’échéance. Dans l’histoire et la logique de la V e République, cela fait désordre quand même.
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