Ici au moins, il n’y aura pas eu de combat. Le Premier ministre a remporté une victoire facile... au Palais Bourbon. A quelques voix discordantes près, la représentation nationale a apporté son soutien à la politique libyenne du gouvernement. Sans broncher et sans bronca. François Fillon n’a même pas eu à batailler pour convaincre les députés de la nécessité d’une intervention militaire destinée à épargner un massacre aux victimes désignées du colonel Kadhafi.
Le Premier ministre a pris bien soin de cibler sa frappe sémantique. Au cas où on n’aurait pas bien compris, il a répété, à coups de références à la Charte des Nations-Unies, que l’action de la France restait dans le cadre de la résolution 1973. En fait, c’est plus à l’ONU qu’aux députés français qu’il s’est adressé, sur un ton de justification. Une déclaration solennelle au moment où les intentions de la France sont mises en doute par la Ligue arabe, recadrées par Washington et par avance désaprouvées par Berlin qui, déjà, prend ses distances et commence à se retirer.
Pas question donc, vraiment pas, d’afficher la moindre intention de débarquer le colonel Kadhafi. Il appartiendra au peuple libyen et à lui seul - deuxième message en boucle - de décider de son destin. Une promesse diplomatique qui peine à dissimuler l’impatience de l’Élysée et du Quai d’Orsay de voir tomber rapidement le guide illuminé de Tripoli.
Car hier, trois jours après le début des frappes, c’est bien une certaine inquiétude qui a commencé à percer des déclarations françaises. Une crainte, même: celle de l’enlisement. Henri Guaino, le conseiller spécial du chef de l’État a beau répéter que l’engagement de l’aviation française durera «le temps qu’il faudra», c’est bien un succès rapide qui était espéré, sinon escompté. Or cette perspective s’éloigne... Malgré les destructions, Kadhafi résiste, fanfaronne à la télévision où, comme cette nuit, il se montre tragiquement provocateur. Cela ne l’empêche pas de jouer assez habilement: il immobilise ses troupes obligeant du même coup les avions ennemis, soumis au mandat restrictif de l’ONU, à tourner en rond..
Chaque jour qui passe désormais jouera pour un statu quo défavorable à la coalition. Les Français ne veulent pas entendre parler d’un conflit long quand, en pleine crise économique, la guerre apparaît comme un luxe que nos démocraties n’ont plus vraiment les moyens de s’offrir. Quand on se mettra à faire les comptes, la facture passera sans doute difficilement. Quant aux opinions publiques des pays arabes, elles commencent à voir d’un mauvais oeil ce déploiement de l’Occident dans lequel l’Otan - que la France avait voulu tenir à l’écart - joue désormais un rôle clé. L’évidence s’impose, douloureusement: le rapport de forces très favorable à la coalition ne suffira pas à la faire gagner vite. Aïe, aïe, aïe...
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