TOUT EST DIT

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lundi 12 juillet 2010

Pour une diplomatie européenne


À une large majorité, le Parlement européen a donné, jeudi, son feu vert à la naissance du SEAE, le Service européen pour l'action extérieure. L'Europe se dote ainsi d'un véritable service diplomatique, comme le prévoit le traité de Lisbonne. La responsable de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, très critiquée depuis sa nomination, disposera, d'ici à la fin de l'année, d'une intendance qui lui faisait défaut. Espérons que la politique suivra. En somme, que l'organe créera la fonction.

Car, au-delà du choix des personnes et des périls bureaucratiques, la naissance de ce service revêt un enjeu considérable. On peut même dire que c'est sans doute le seul projet d'envergure transnationale actuellement sur la table de l'Union, à l'instar de ce que furent l'union monétaire ou l'élargissement. Pour le mener à bien, l'Union européenne doit éviter un écueil et poursuivre trois objectifs.

L'écueil, ce serait de donner l'impression que rien ne change dans les options diplomatiques des grandes capitales, et que ce service n'est, en fait, qu'une administration de plus. À plein régime, le SEAE occupera environ 6 000 fonctionnaires, répartis entre Bruxelles et les 136 représentations diplomatiques de l'Union dans le monde. À l'heure où la rigueur impose à tous les budgets nationaux des coupes sévères dans les services publics, le devoir d'efficacité des nouveaux diplomates européens n'en sera que plus grand.

Pour être efficace, il faut des objectifs. Jamais, compte tenu de divergences d'intérêts aussi légitimes qu'inévitables, les Vingt-Sept ne seront d'accord sur tout en matière de politique extérieure. Ce qui importe, c'est de définir deux ou trois priorités afin de confirmer, rapidement, la raison d'être de ce service diplomatique. Les relations avec la Chine ou la Turquie, la régulation financière, le Proche-Orient... On est tenté de dire : peu importe le sujet. C'est l'utilité même de ce service diplomatique qui doit être évidente.

Pour cela, un équilibre est nécessaire. La naissance de ce service a donné lieu à de vives luttes d'influence depuis janvier. Entre capitales, tout d'abord, pour préempter les postes-clés. Paris aurait ainsi obtenu celui de secrétaire général que devrait occuper Pierre Vimont, actuel ambassadeur de France à Washington. Berlin et Varsovie ceux de secrétaires adjoints. Il faudra saupoudrer, c'est inévitable. L'important, c'est que l'Union vaille plus que la simple somme de ses membres. On peine à le constater depuis quelques mois.

Quant aux luttes entre les institutions européennes, notamment entre le Parlement, soucieux d'étendre son pouvoir de contrôle, et le Conseil, souvent amnésique quand on évoque l'aventure communautaire, elles ont débouché sur un compromis. Le service comptera 60 % de fonctionnaires européens et 40 % de diplomates nationaux.

Il ne fait aucun doute que le brassage de tous ces diplomates au service d'une action commune sera, à moyen terme, un facteur d'intégration de nos élites respectives. Ce qui semble beaucoup moins acquis, c'est la volonté politique des gouvernements actuels de se départir de leur vision purement intergouvernementale de l'Union. C'est pourtant à ce prix que peut naître une authentique diplomatie européenne, et pas seulement une intendance.

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