TOUT EST DIT

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lundi 12 juillet 2010

Mauvaise note

C'était il y a trois ans. Au coeur de l'été 2007, le grand public apprenait un mot nouveau, « subprime », et découvrait que de nombreux produits d'épargne réputés sans risques en contenaient, à des doses plus ou moins fortes. La suite a montré combien l'évaluation des risques de ces instruments financiers et de leur chapelet de dérivés laissait à désirer : un produit financier jugé aussi sûr que des obligations allemandes la veille pouvait basculer le lendemain dans la catégorie des actifs « toxiques », virtuellement sans valeur. C'était il y a trois ans et les agences de notation, responsables de ces évaluations, étaient clouées au pilori, leurs méthodes contestées, leur indépendance mise en cause, leur immense influence dénoncée.

Que s'est-il passé depuis ? Pas grand-chose, en vérité. Le rapport publié vendredi par l'Autorité des marchés financiers témoigne que, en dépit de leur faillite dans l'affaire Enron, la crise du « subprime » ou la déconfiture de Lehman Brothers, les agences de notation suscitent toujours autant de critiques. L'AMF relaie un grief adressé depuis longtemps à ces juges privés de la finance : comme les marchés, ils sont moutonniers. L'autorité française estime ainsi que le comportement procyclique des agences de notation a jeté de l'huile sur le feu dans la crise des dettes souveraines européennes. Aux Etats-Unis, ce sont surtout les méthodes des agences de notation qui ont été dénoncées. Une commission d'enquête du Congrès a auditionné d'anciens salariés de Moody's qui ont affirmé avoir subi des pressions pour noter favorablement des produits financiers risqués.

Au regard de critiques exprimées depuis plusieurs années, les remèdes proposés paraissent tardifs et timides. Un récent règlement de l'Union européenne contraint désormais les agences de notation à s'enregistrer auprès des autorités boursières nationales. Rien de bien révolutionnaire ! Aux Etats-Unis, le projet de réforme financière actuellement soumis au Congrès comporte un point clef : les notes des agences de notation ne pourront plus être considérées comme des « opinions » et relever du premier amendement de la Constitution sur la liberté d'expression. Autrement dit, elles seront attaquables devant un juge, ce qui n'est pas rien dans un pays aussi procédurier.

Mais le vrai contrepoids à l'influence des agences de notation est à chercher du côté des investisseurs et des institutions financières qui les font vivre. Il est temps que ces derniers se fient davantage à leur propre jugement dans l'évaluation de la solidité d'une signature. Bref, qu'ils renouent avec la base de leur métier.



NICOLAS BARRÉ

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