La mort d'une jeune maman sous les balles de sauvages malfrats qui préparaient un casse... Qui n'éprouve un sentiment de révolte devant l'histoire tragique de la jeune policière municipale de Villiers-sur-Marne ? L'émotion légitime qu'elle a provoquée tout au long de la semaine doit-elle être pour autant le ressort de décisions qui engagent le pays ? C'est moins sûr. Quand le droit -au sens large- devient le jouet du fait divers, c'est le symptôme d'une société inquiète qui improvise ses règles collectives au gré de ses indignations.
Les funérailles nationales d'Aurélie -avec présence du président de la République et de trois ministres !- ont implicitement validé le décret du ministre de l'Intérieur autorisant l'utilisation du très controversé Taser par les polices municipales. Tout le monde, pourtant, convient que si la jeune policière avait disposé d'un pistolet par impulsion électrique, ou même d'un Manurin, cela n'aurait, hélas, strictement rien changé à son sort. Elle a été au mauvais endroit au mauvais moment, victime collatérale d'un de ces épisodes du grand banditisme qui tournent mal.
Autrement dit, un hasard sanglant et particulièrement spectaculaire a été opportunément utilisé pour faire passer sans discussion une mesure controversée. Les larmes médiatiques d'un jour d'enterrement ont submergé les réserves juridiques. Il ne s'agit pas, bien sûr, de minimiser la douleur d'une famille, ni de dévaloriser la solidarité qu'on lui a exprimée, mais de s'interroger sur les limites d'un fonctionnement pulsionnel d'un pouvoir.
Les 18 000 policiers municipaux et leurs syndicats, eux, posent la vraie question, celle qui aurait dû faire débat : la définition de leurs missions. Elles se limitent, en principe, à la vérification de l'application des décrets municipaux. Un périmètre de proximité qui, a priori, ne justifie aucunement le port d'une arme aussi litigieuse que le Taser. Mais si ce cadre initial dérive peu à peu vers des interventions dangereuses qui s'apparentent à celles de la police nationale alors là, oui, il faut tout remettre sur la table. Parler de tutelle, de recrutement, d'armement, de formation, d'éthique, de contrôle... Autant de garde-fous contre les abus et contre les atteintes aux libertés et à la dignité des citoyens qui fondent la légitimité de la police nationale.
La politique de sécurité d'une grande nation démocratique ne saurait s'accommoder d'ambiguïtés ou d'ajustements empiriques dictés par les événements quand elle suppose autant de choix de société. A défaut de pouvoir séduire avec des enjeux d'avenir aussi invendables, cette fois, que l'emploi ou le pouvoir d'achat, l'Élysée mettra une nouvelle fois la peur -valeur électorale puissante et sûre- au programme de la campagne de 2012. Alors, puisqu'il le faudra bien, parlons-en clairement. Sans fantasmes et sans crainte.
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