TOUT EST DIT

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jeudi 25 mars 2010

Le courage obligatoire


Oublions un instant qu'il s'agit de reprendre la main après des régionales calamiteuses. Oublions que nous sommes à la troisième année du quinquennat. Oublions même qui est l'auteur du discours d'hier : personne ne peut contester l'ambition d'un Président de donner à la France les moyens de rester la cinquième puissance mondiale. Personne ne devrait s'indigner qu'il s'engage à ne laisser personne sur le bas-côté. Personne n'osera critiquer, spécialement en période de crise, un appel à l'unité.

Mais nous ne sommes plus en début de mandat. En trois ans, on a beaucoup désigné les immigrés, les banlieues, les chercheurs, les juges... On a envoyé trop de messages maladroits qui affaiblissent l'autorité présidentielle. On a beaucoup dépensé sans obtenir les résultats annoncés. Peut-on, sans rendre le pays exsangue, sans briser les rapports sociaux ¯ notamment sur la retraite des fonctionnaires ¯ sans rajouter d'anxiété, réaliser, dans les deux ans qui restent, un programme qui exigerait un mandat ?

En politique, avant les faits comptent les mots. Ceux d'hier parlent d'abord à un électorat évanoui, de droite et d'extrême droite. Bien tardivement, Nicolas Sarkozy promet, quitte à menacer l'Europe d'une crise, de voler au secours des agriculteurs. Il cherche à rassurer les personnes âgées et les malades à travers une médecine de proximité repensée. Il assure qu'il va éradiquer les nouvelles violences et contraindre les parents à prendre leurs responsabilités.

En renvoyant aux calendes européennes une taxe carbone victime d'impréparation, il s'adresse à ce même électorat allergique aux impôts et dont l'écologie n'est pas très présente dans les gènes. En confirmant une loi pour interdire la burqa, il est aussi, selon le nouveau mot d'ordre, dans le retour aux fondamentaux, dans une droitisation de sa politique.

Parfois, les mots parlent malgré eux. Insister si fortement sur les réformes qui ne peuvent plus attendre est un aveu, a contrario, qu'elles n'ont pas été lancées depuis trois ans. Admettre le ressenti qu'ont les Français que leur vie quotidienne change peu, revient à concéder une faiblesse de sa gouvernance. Marteler le thème vital de la compétitivité, c'est reconnaître que le pays n'a pas comblé ses retards. Annoncer que l'on allait enfin voir ce qu'on allait voir, c'est relativiser le bilan sécuritaire.

Il y a enfin les mots que l'on ne prononce pas et qui résonnent cependant. Curieusement, Nicolas Sarkozy n'a rien dit de la réduction des déficits, présentée la veille par François Fillon comme l'une des trois priorités du nouveau pacte majoritaire. À l'exception notable des retraites, il n'a pas annoncé la rigueur pour éviter de plomber le pays, voire d'entraîner l'euro et l'Europe dans la tourmente.

Pourtant, puisque le ton demeure celui du volontarisme, il faudrait logiquement s'attendre à d'énormes coupes claires dans la dépense publique et à une chasse drastique aux niches sociales et fiscales.

Autrement dit, plus l'urgence se fait criante sous l'effet de la crise, et plus le risque d'opérer à vif s'accroît. S'il fait ce qu'il dit, Nicolas Sarkozy prend le risque de l'impopularité. Il y a des moments où, entre de bons sondages et le bien commun, entre un rêve de second mandat et l'avenir du pays, on est contraint d'être courageux.

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