TOUT EST DIT

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vendredi 20 décembre 2013

Le Père Noël a disparu


 Le Père Noël a disparu

Longtemps, la France fut la mère patrie du Père Noël. Au point que c'était Noël tous les jours. Depuis le début des années 80, nos politiciens sont toujours arrivés au pouvoir avec une hotte remplie à ras bord de cadeaux achetés à crédit, qu'ils déversaient aux pieds des électeurs ébahis.
Ces farceurs décrétaient, contre toute évidence, que les Trente Glorieuses continueraient chez nous : de 1945 à 1973, les pays européens ont enregistré une croissance moyenne de près de 5 % l'an. Depuis que nous avons perdu le rythme, nos gouvernants de droite ou de gauche ont prétendu le retrouver, avec des relances "volontaristes" qui ont toutes lamentablement échoué.
Ces temps-ci, le Père Noël a un coup de mou : dans sa hotte, il n'y aurait plus que des avis d'huissiers et des reconnaissances de dette. Aux dernières nouvelles, il aurait quitté la France et notre Vieux Continent pour aller se faire voir ailleurs. Là où ça bouge et où les économies tournent à plein. En Chine, en Inde, en Corée, en Afrique ou au Brésil, autant de pays qui, contrairement à nous, croient en eux.
En attendant un éventuel retour du Père Noël, qu'il nous soit permis de lui présenter quelques requêtes pour que reviennent des jours meilleurs :
- Qu'on en finisse avec la gauche gnangnan, dont la dernière blague involontaire est un rapport sur l'intégration, commandé par le Premier ministre et à lui remis avant d'être sottement publié. Célébrant les "dynamiques plurielles de la société", ce texte comique a réussi à faire l'unanimité contre lui, de Hollande à Copé. Ce qu'il propose, notamment à travers le retour du voile à l'école, c'est le sabordage de la République laïque, ainsi qu'un désaveu des enseignants qui travaillent sur le terrain contre les dérives intégristes. Les auteurs de ce gribouillage infantile n'ont simplement pas compris que l'intégration passe par l'éducation, pas par la geignardise ou la compassion. Si ces élites "anti-Valls" ne croient plus au modèle républicain français, pourquoi les enfants d'immigrés y adhéreraient-ils ? On ne veut plus les entendre. Elles ont déjà fait trop de mal au pays.
- Qu'on renvoie au plus vite Mme Lebranchu dans sa chère Bretagne, où elle pourra prendre une retraite bien méritée. Au mépris de la justice et de l'équité, la ministre de la Fonction publique a décidé de supprimer le fameux jour de carence pour les fonctionnaires - jour pendant lequel un arrêt maladie n'est pas indemnisé. Une excellente mesure décidée par l'ancienne majorité, qui entendait rapprocher ainsi les conditions de travail du secteur public et du secteur privé, qui a, lui, trois jours de carence. Grâce à quoi, vient de nous apprendre une étude, l'absentéisme a chuté de 43 % dans la fonction publique territoriale, où il atteignait jusqu'alors des niveaux hallucinants. Merci, le pouvoir précédent. Malgré ça, Mme Lebranchu tient bon sur sa décision en nous servant des explications vaseuses. N'est-ce pas la preuve qu'elle considère les salariés du privé comme des citoyens de troisième zone, alors qu'ils sont déjà payés 12 % de moins que ceux du public ?
- Que les "néocons", autrement dit les néo-conservateurs souverainistes, mettent une sourdine à leur antieuropéanisme primaire. Il est urgent de réinventer l'Europe, tout le monde est d'accord là-dessus. À condition de ne pas la faire sauter pour retourner se pelotonner derrière les barbelés des frontières : on a vu où ça menait. Aujourd'hui, la tendance est d'imputer toutes nos difficultés au bouc émissaire européen. C'est lui qui, sous la férule de l'hydre allemande, nous imposerait une austérité à laquelle nos folies budgétaires passées nous ont condamnés. Une irresponsabilité de gauche comme de droite, qui menace désormais nos démocraties (1) en attisant le chauvinisme. "Le nationalisme, c'est la guerre", disait François Mitterrand, qui faisait partie de ceux, nombreux, qui s'étaient exclamés : "Plus jamais ça !" sur les décombres de la Seconde Guerre mondiale. Le nationalisme n'est pas une solution. C'est un symptôme, celui de notre déclin économique et moral. Il faut donc le manipuler avec précaution et le consommer avec modération, à un moment où des pans entiers du pays, des classes moyennes en perdition aux classes populaires parties en vrille, ne savent plus bien où ils habitent. Puissent nos hommes (ou femmes) d'État, il en reste encore, ne pas flatter nos plus bas instincts en surfant sur la vague populacière.
Il y aurait encore plein de requêtes pour le Père Noël, mais nous voici arrivé au terme du lignage imparti. S'il se décide à repasser par chez nous, il aura en tout cas beaucoup de travail.
Bonnes fêtes !

1. Cf. l'excellent livre d'Alain Lambert, Déficits publics, la démocratie en danger (Armand Colin), qui nous raconte par le menu la spirale de l'endettement et des déficits.

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