TOUT EST DIT

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mercredi 18 septembre 2013

Le buzz vengeur


Hier à 18 h 30, la page Facebook de soutien au bijoutier de Nice ayant abattu, mercredi dernier, l’un de ses agresseurs alors que ceux-ci prenaient la fuite à scooter, comptait 1 635 137 clics de soutien et près de 1,5 million de commentaires. Un buzz médiatique à la mesure de l’émotion suscitée par une affaire qui risque de diviser profondément la société française jusqu’à son épilogue judiciaire, soit au bas mot dans quatre ou cinq ans.
Sur le papier, les faits sont aussi dramatiques que simples. Un commerçant, après avoir été agressé, frappé et volé par deux individus, se fait vengeance en leur tirant dessus – avec un pistolet détenu illégalement – alors que ses braqueurs s’enfuient à scooter. Difficile pour la justice, dans ces conditions, de retenir l’état de légitime défense, puisque Stephan Turk n’était plus menacé par ses agresseurs. Bien sûr, le bijoutier ne manque pas de circonstances atténuantes : la peur, la colère, la douleur… Et puis, qui n’a pas, sous le coup de l’émotion, été tenté, un jour, de se faire justice ? Qui n’a pas, dans un moment d’emportement, espéré retrouver l’agresseur de son fils ou le cambrioleur qui a tout dévasté pour leur rendre la monnaie de leur pièce ? Sauf que des paroles aux actes, il y a, heureusement, une barrière. Celle de la vengeance est infranchissable dans une société civilisée où l’autodéfense n’est justifiée que par la légitime défense. Sinon, c’est la porte ouverte à toutes les exactions, à une société sans justice, aux règlements de comptes permanents, à l’image de ce qui se passe à Marseille dans le milieu de la drogue.
Si l’on peut comprendre les raisons qui ont poussé le bijoutier niçois à se faire vengeance, cela ne peut en rien l’exonérer de répondre de son geste devant la justice. Ce ne sont pas 1 635 137 personnes qui ont cliqué sur Facebook qui le jugeront – et, le cas échéant, l’acquitteront,- mais bien l’institution judiciaire.
Au-delà de la capacité des réseaux sociaux à réagir, voire à surréagir, ce tragique fait divers confirme aussi que la manipulation de l’opinion, sous couvert d’anonymat, et la récupération politique ne sont jamais loin du phénomène internet. C’est aussi pourquoi l’affaire du bijoutier niçois risque de faire le buzz encore longtemps.

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