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jeudi 21 mars 2013

Employée voilée de la crèche Baby Loup: ce que l'arrêt va changer dans les entreprises

La Cour de cassation a invalidé le licenciement de la salariée voilée de la crèche Baby Loup qui relève selon elle de la discrimination religieuse. Que va changer cette décision dans les entreprises? L'éclairage de Me Eric Rocheblave, avocat en droit du travail. 
La Cour de cassation vient d'annuler le licenciement de la salariée de Baby Loup, renvoyée parce qu'elle portait le voile. Selon elle, cette décision constitue "une discrimination en raison des convictions religieuses". Qu'est-ce que cela signifie?

La Cour de cassation a estimé que la liberté de conscience et dereligion prévalait sur le principe de laïcité en entreprise. Baby Loup avait, dans son règlement intérieur, une close "de neutralité et de laïcité" qui s'appliquait à tous ses employés. La salariée voilée, qui ne respectait donc pas cette règle de base, avait été licenciée pour "faute grave". Mais ce mardi, la Cour a estimé qu'un règlement intérieur ne peut promouvoir la laïcité. Seules la nature de la tâche du salarié et les exigences du poste peuvent restreindre la liberté religieuse.  
Quelles tâches peuvent donc justifier cette restriction?
Le juge ne l'a pas précisé. Mais s'occuper d'enfants en bas âge n'en fait visiblement pas partie! L'arrêt de la Cour de cassation reste très vague et va rendre la tâche très compliquée aux entreprises. Non seulement parce qu'on ne sait pas vraiment ce qu'il recouvre mais également parce qu'elles vont devoir faire un arbitrage poste par poste - puisque le règlement intérieur de l'entreprise ne suffit plus. 
Cela signifie, qu'en pratique, les entreprises ne pourront plus interdire à leurs employés de porter le voile?
S'appuyer sur le principe de laïcité pour interdire le port d'un signe religieux va en tout cas devenir très difficile. Les entreprises utiliseront des moyens détournés: dans les usines, les employeurs invoqueront par exemple des questions de sécurité. Certaines interdisent par exemple déjà le voile sur les chaînes de montage car il pourrait se coincer dans la mécanique. D'autres avanceront des problèmes d'hygiène. La cour d'appel de Paris a déjà validé le licenciement d'un agent hospitalier dans une maison de retraite pour cette raison.  
Que va changer cette décision sur le plan du droit?
Cet arrêt est inédit: c'est la première fois que la Cour de cassation se prononce sur le port du voile en entreprise. C'est donc une décision majeure sur le plan de la jurisprudence. Elle est d'autant plus importante qu'elle va totalement à l'encontre des décisions de première instance, qui, à ma connaissance, ont toujours donné raison à l'employeur dans ce genre d'affaire.  
L'affaire va être rejugée devant la Cour d'appel de Paris. Peut-elle aller à l'encontre de l'arrêt de la Cour de cassation ?
Dans les faits, oui, mais dans la pratique, c'est très rare. Dans 99% des cas, la cour de renvoi suit l'avis de l'arrêt de la Cour de cassation. A mon avis, l'audience aura avant tout pour objectif de fixer le montant des dommages et intérêts pour la salariée licenciée.  
Dans son arrêt, la Cour s'appuie sur le fait que Baby Loup est une entreprise privée. La décision aurait-elle été différente s'il s'agissait d'une crèche publique ?
Le service publique est régi par une règle générale de neutralité. Les employés n'ont pas le droit de porter de signes religieux ostentatoires. 
Donc porter le voile dans un établissement public va à l'encontre de la loi.

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