TOUT EST DIT

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samedi 19 janvier 2013

Le spectre de l'inflation n'est (enfin) plus ce qu'il était


Pour tenter de surmonter la crise de la dette et relancer l'activité, un retour relatif de l'inflation pourrait être accepté par les banques centrales, sous la pression des gouvernements, dont l'indépendance serait ainsi un peu plus écornée.
Ouvert par le nouveau premier ministre japonais Shinzo Abe, qui exige de la Banque du Japon l'adoption d'une cible d'inflation plus élevée, le débat sur l'indépendance des banques centrales est désormais lancé. L'un des dogmes de la pensée économique contemporaine est mis en question, de nouvelles voix parmi les économistes, dont le Financial Times se fait l'écho, se joignent désormais à celle jusqu'ici isolée de Joseph Stiglitz.
Cela devait bien arriver, à force de constater que les leviers de la politique monétaire des banques centrales - principalement la baisse de leurs taux directeurs - ne fonctionnent plus, comme elles le reconnaissent elles-mêmes implicitement en demandant aux gouvernements de faire leur part du travail.
L'interventionnisme fiscal croissant 
Des banques centrales D'un pays à l'autre, les scénarios de cette division du travail qui se cherche ne sont pas identiques. La monétisation de la dette japonaise va à nouveau financer un programme de grands travaux sans tenir compte de l'échec flagrant du précédent, tandis que le gouvernement britannique s'arc-boute, malgré son absence de résultat, sur sa politique d'austérité en vue de réduire le déficit public, et qu'aux États-Unis le gouvernement tente de poursuivre la réduction de celui-ci sans déclencher de récession comme en Europe. Dans la zone euro, où les achats obligataires sont nettement plus réduits, l'entrée en action du programme OMT de la BCE élèverait la donne. In fine, les banques centrales intervenant ainsi de plus en plus dans le domaine fiscal - une prérogative des États - leur indépendance, dont le principe est déjà très écorné dans la pratique, va-t-elle pouvoir longtemps être préservée ?
Tant que les banques centrales et les gouvernements poursuivront un même objectif et qu'aucun changement de politique des banques centrales n'interviendra au sujet de leurs taux directeurs, tout ira bien. Et l'on pourra faire semblant que rien n'a changé. Mais qu'en sera-t-il si, demain, certaines d'entre elles décidaient de mettre fin à leurs politiques non conventionnelles sur les taux ?
Aux États-Unis, la rumeur en prête en tout cas l'intention à la FED pour la fin de l'année... Se retrouverait-on alors dans une situation à la japonaise ? Il faut également se rappeler les propos de Ben Bernanke, le président de la FED, qui déclarait en 2003 en ménageant la chèvre et le chou : « Le rôle d'une banque centrale est différent suivant que l'on se trouve dans un environnement inflationniste ou déflationniste. Face à l'inflation, la vertu d'une banque centrale consiste à pouvoir dire non au gouvernement. »
En période de désendettement, poursuivait-il, « une plus étroite collaboration pour un temps avec les autorités fiscales n'est en aucune mesure incompatible avec l'indépendance des banques centrales ».La remise en cause d'un dogme appelant celle d'un autre, que penser aujourd'hui du danger inflationniste automatiquement créé par l'augmentation de la masse monétaire ? Les pays « développés » ne se sont-ils pas de facto glissés dans une « trappe à liquidité » (béante au Japon), la cause profonde de l'inefficience de la politique monétaire, selon Keynes ?
Si tel est le cas, va-t-il en être tiré comme conclusion, à la lumière de la situation japonaise où l'inflation n'est pas précisément au rendez-vous, que ce risque n'est plus ce qu'il était ? C'est en tout cas ce que le futur gouverneur de la Banque d'Angleterre, Mark Carney, semble avoir tiré comme leçon, sans attendre. Mais, après tout, les dogmes les plus établis n'ont-ils pas comme vocation d'être un jour ou l'autre abandonnés ?

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