TOUT EST DIT

TOUT EST DIT
ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

samedi 15 décembre 2012

Le réquisitoire de Charles Consigny : Nicolas Sarkozy doit-il changer d'avocats ?

Amis juristes, je ne parle pas ici, bien sûr, de notre vénérable et vénéré confrère Thierry Herzog, dont le talent et la loyauté font l'unanimité respectueuse. Il est certain que, dans ses relatifs démêlés judiciaires, Nicolas Sarkozy sera bien défendu.
On les a entendus claironner sur tous les plateaux la victoire de leur motion : Guillaume Peltier et Geoffroy Didier, toujours présentés dans cet ordre (je ne doute pas que, s'ils étaient trois, le nom de M. Didier serait énoncé en troisième), ont porté la Droite forte en tête des suffrages militants lors des dernières élections internes à l'UMP. Ces deux trentenaires, dont les ficelles qu'on verrait presque tant elles sont épaisses sont agitées par l'obscur Patrick Buisson, ont fait une OPA sur le nom et le slogan de l'ancien président de la République, proposant toutes sortes de mesures caricaturales que les votants n'ont probablement même pas lues. Il y a eu un effet de marque, on a voté Droite forte comme on aurait acheté Damome ou Herpès. Il y a eu tromperie sur la marchandise.

Bling-bling 
Il aura vraiment fallu une immense fatigue de fin de mandat, puis de fin de campagne, et de grandes vertus de mystificateur à M. Buisson pour laisser croire à Nicolas Sarkozy qu'il avait gagné en 2007 grâce à son idée de donner un ministère à l'identité française (concept que je n'estime pas intouchable), et qu'il aurait gagné en 2012 s'il avait proposé qu'on autorise le port d'armes.
Il y avait, en 2007, autre chose. Il y avait l'envie d'un sursaut, une idée que la France n'était pas vouée à s'enliser dans les sables mouvants de son ennui et de sa paresse ; il y avait l'espoir d'une vie meilleure, b.a.-ba peut-être de toute campagne électorale. Sarkozy, c'était à la fois Bonaparte et Tony Montana, c'était l'exaltation de la grandeur de la nation et du volontarisme en même temps qu'un désir fou de bling-bling, signe extérieur de réussite personnelle. C'était une philosophie américaine, les victoires individuelles font la richesse collective, et un colbertisme, l'État tordra le bras de Mittal.
Grandeur 
Las, Lehman Brothers a fait faillite, l'effet domino a prouvé sa pertinence et les Français, qui avaient enfin accepté de se battre dans la guerre économique mondialisée, ont été stoppés net dans leur élan. Ils ont choisi, cinq ans plus tard, un type qui incarne physiquement le droit administratif ; un type qui ressemble à la fois au contrôleur de la SNCF, au postier, à l'agent de mairie, bref au fonctionnaire, le rassurant fonctionnariat qui exclut tout ce qui fait peur au XXIe siècle, licenciement, déclassement, privatisation. L'actuel président de la République a été élu sur la frustration par un peuple résigné. Ensuite, l'abîme appelle l'abîme.
Il y a, en France, beaucoup plus de génie, d'énergie, de force et de rêves que les maîtres sondeurs de l'UMP veulent bien le croire. Il y a trop d'intelligence, trop de culture, trop de patrimoine et trop de grands morts pour laisser penser qu'on gagnera le coeur des gens avec des arguments répondant aux fantasmes les plus tristes. Au ciel de la France planent la poésie d'Apollinaire et la foi de Claudel, les vers de Racine et les tourments d'Hugo. Les vignes de Château-Chalon résonnent encore des mots du prince de Metternich à Napoléon III ("Sire, le plus grand vin du monde se récolte dans un petit canton de votre empire, à Château-Chalon") et les sous-sols de la Vendée tremblent toujours du sang des chouans. La droite française n'est pas étrangère à ces grandeurs, la grandeur est une idée qui ne lui est pas étrangère. Qu'elle la retrouve.

0 commentaires: