TOUT EST DIT

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mercredi 11 avril 2012

Mariano Rajoy, une valeur en baisse

Le Premier ministre espagnol multiplie les mesures d’austérité pour conjurer l'effondrement économique de son pays. Mais après sept années d’opposition, il est difficile d’être entièrement crédible et efficace, pointent trois économistes. 

L'Espagne vit un moment clé de son histoire. Alors que les marchés de la dette sont de nouveaux nerveux, que le budget 2012 n'a pas convaincu grand monde et que l'économie est en récession, nous allons tout droit vers un plan de sauvetage dont les conséquences seraient dramatiques. Il faut donc l'éviter à tout prix.
Primo, parce que les sauveteurs ne seraient autres que nos créanciers, et que la défense de nos intérêts ne serait donc pas leur priorité. Secundo, parce que le renflouement imposerait un rééquilibrage budgétaire plus profond encore. Tertio, parce qu'on sait comment on entre dans un plan de sauvetage, mais pas comment on en sort. Les sauvetages chassent les capitaux privés et assèchent les liquidités d'un pays.
Et quatrièmement, il faut éviter le plan de sauvetage parce qu'il ne fonctionnerait pas : les interventions du FMI se fondent sur le principe de la stimulation de la demande extérieure par des dévaluations de la monnaie. Or cela n'est pas possible dans la zone euro, et les plans grec et portugais n'ont manifestement rien amélioré.

Un budget victime du populisme

Que s'est-t-il passé ? Comment les nuages temporairement éloignés par l'intervention de la BCE en décembre dernier ont-il pu revenir aussi vite ? La réponse est à la fois simple et dévastatrice : le nouveau gouvernement, malgré une réforme du marché du travail très volontaire, n'a pas su enrayer les deux problèmes essentiels qui sapent notre crédibilité, en l'occurrence le secteur financier et la politique budgétaire.
Le système financier se trouve dans un état critique. Notre tentative de convaincre les marchés de capitaux de refinancer nos passifs bancaires a lamentablement échoué. Les établissements espagnols ne peuvent procéder à des émissions qu'avec l'aval de l'Etat et vivent grâce aux perfusions de liquidités de la BCE.
Face aux nouvelles demandes de capitaux, leur réaction logique a consisté à fermer encore un peu plus le robinet du crédit, assoiffant du même coup de nombreuses entreprises.
La politique budgétaire, elle, a pâti de quatre erreurs. Tout d'abord, nous avons assisté depuis l'automne à un absurde défilé de statistiques sur la dette, qui a conduit de nombreux observateurs à s'interroger sur l'état réel des finances publiques espagnoles. Ensuite, la présentation du budget a souffert d'un retard intolérable.
Non seulement le nouveau gouvernement a gâché ses 100 jours d'état de grâce, mais la présentation du budget, juste après les élections en Andalousie, donne à croire que les Espagnols font passer l'urgence après la politique.
Troisième erreur, le budget de l'Etat tel qu'il a été présenté est victime du populisme sur lequel ont été basées les années d’opposition [le Parti populaire a été dans l’opposition de 2004 à 2011] : puisque l'on s'est engagé à ne pas raboter les retraites ni les salaires des fonctionnaires et à ne pas augmenter l'IVA [la TVA espagnole], les seules solutions qui restent consistent à réduire les investissements et à tenter une amnistie fiscale.
Reste que les marchés, eux, ne se laissent pas duper par quelques tours de passe-passe : ils comprennent parfaitement que ce budget dégrade notre situation fiscale à moyen terme et démontre l'incapacité de nos dirigeants à prendre les problèmes à bras-le-corps.

L'Espagne peut réclamer un traitement différent

Enfin, l'hémorragie des finances des communautés autonomes se poursuit, et personne ne croit aux 27 milliards d'économie demandés en 2012.Que faire, dès lors ? Le gouvernement doit commencer par oublier les élections, qu'elles soient galiciennes, basques ou nationales, et envoyer les sondeurs sonder ailleurs. La priorité absolue est aujourd'hui d'en finir avec notre manque de crédibilité.
Ensuite, il faut rouvrir au plus vite le robinet du crédit. Cela ne se fera qu'en restaurant la confiance dans le secteur bancaire et en donnant à ce dernier accès aux marchés de capitaux sans autorisation de l'Etat ni injections de la BCE. La solution qui apparaît le plus clairement aujourd'hui serait un recours au Fonds européen de stabilité financière (FESF)  pour recapitaliser notre système financier, sans passer par une intervention. L'Espagne ne manque pas d'arguments pour exiger un traitement différent de celui appliqué à des partenaires moins responsables.
Troisième impératif, élaborer un processus de consolidation budgétaire pluriannuel qui soit crédible, réfléchi et systématique. Côté dépenses, ce plan devrait prévoir des coupes dans le salaire des fonctionnaires, réduire leur nombre et geler les retraites, et maintenir autant que possible les postes que sont l'enseignement et les investissements productifs et dans la recherche et développement.
Côté recettes, il faudrait introduire une hausse progressive de l'IVA sur les cinq prochaines années. En termes de mesures institutionnelles, ce plan devrait prévoir la mise en place d'un conseil budgétaire indépendant et repenser totalement le financement des communautés autonomes afin de doter l'Espagne d'un modèle d'Etat rationnel.
Il est inadmissible que les règlements discutés à la Commission européenne donnent à celle-ci davantage de pouvoir sur le gouvernement espagnol que ce dernier n'en a sur ses régions fort indisciplinées.
Après quatre années de crise au cours desquelles les gouvernements espagnols, l'actuel comme le précédent, ont été à la remorque des événements, il est peut-être un peu tard pour essayer de changer les choses.
Mais cela en vaut encore la peine, car nous sommes bien aujourd'hui devant ce qui peut être notre dernière chance de résoudre une crise interminable. Mais pour cela, nous avons besoin de changer radicalement les comportements et d'en finir, avant tout, avec ce populisme pernicieux qui a caractérisé [la droite] durant les deux dernières années d'opposition au gouvernement Zapatero.


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