TOUT EST DIT

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mercredi 11 avril 2012

Jeunes et désenchantés


Quel est l'avenir d'un pays dont la jeunesse ne croit plus, pour une grande partie d'entre elle, en un projet collectif ? Ainsi que le démontrent plusieurs enquêtes, les jeunes auraient l'intention de s'abstenir massivement ou de protester en votant pour les extrêmes. Autrement dit, les « partis de gouvernement » seraient ultraminoritaires chez les moins de 22 ans.
La crise est la première explication de cette défiance. Le diplôme n'est plus une garantie d'ascension sociale ni même une assurance antichômage ; les stages remplacent trop souvent les vrais postes ; les CDD retardent l'obtention d'un vrai contrat ; l'emploi est à peine mieux récompensé que le chômage ; et la perspective de devoir se sacrifier pour rembourser la dette des générations précédentes et pour payer des retraites toujours plus faibles ne fait pas rêver.
Le malaise touche davantage la petite classe moyenne - les filles et fils de commerçants et d'artisans, les non diplômés - convaincue, avant même d'entrer dans la vie active, qu'elle va végéter éternellement et qu'elle n'a pas prise sur son avenir, sauf à renverser la table.
Les partis traditionnels ont peu la cote. Même François Hollande, qui a pourtant fait de la jeunesse le coeur de son projet - éducation, emplois jeunes, contrats de génération... - serait devancé par Marine Le Pen et concurrencé par Jean-Luc Mélenchon dans les intentions de vote. Dans cette catégorie, la perte de confiance serait également très forte pour Nicolas Sarkozy.
Les jeunes ne croient pas que leur avenir passe par des mesures techniciennes. Le débat sur le permis de conduire, dont l'intention n'est pas nulle, reste une réponse si dérisoire pour les enfants de la crise ! Leur réaction indifférente montre bien que l'on ne les conquiert pas en en faisant une cible politique. Que l'on ne leur fait pas gober des programmes tièdes pour des potions miracle.
Dans l'intérêt croissant qu'ils portent au vote protestataire, il faut voir deux choses : d'une part, une manière de s'élever contre un système national et européen bloqué où l'on subit sans pouvoir agir ; d'autre part, le rêve d'une société juste et protectrice que quelques discours enflammés, à défaut d'être crédibles, parviennent à leur suggérer.
Il ne faut pas, pour autant, céder au jeunisme. Ils désirent changer le système politique ? Ils sont les premiers à s'en écarter, préférant l'isolement du dialogue singulier avec leur ordinateur plutôt que la construction d'un futur en commun. Ils critiquent la surmédiatisation de la politique ? Ils sont les premiers à « twitter » ou à « facebooker » pour tourner les candidats en dérision. Ils sont tentés d'essayer autre chose ? Mais que savent-ils des idéologies ou des impasses de certains projets ? Ils se veulent en dehors du système ? Mais ont-ils complètement conscience que s'abstenir, c'est offrir son pouvoir à l'autre ?
À l'espérance soulevée par l'élection de 2007 répond la désillusion de 2012. Et au désenchantement de 2012 répond déjà une sourde inquiétude : on ne construit pas un avenir avec une jeunesse qui ne croit pas plus que ça à la nécessité d'apprendre, de travailler, d'inventer, d'oser, de s'engager. Il y a quelque chose d'explosif dans cette résignation.

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