TOUT EST DIT

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vendredi 13 janvier 2012

Vite, revenir à l'essentiel

À cent jours du premier tour, la campagne a des airs de comédie dans un décor de tragédie. Si ses acteurs n'admettent pas qu'ils se trompent de spectacle, ils s'exposent à des déconvenues, dans les urnes ou dans la rue.

Les affaires et les invectives agitent toutes les campagnes. Mais il est navrant de confondre l'accessoire et l'essentiel quand le pays vacille au bord du précipice.

Cette distorsion entre le politicien et le Politique résulte d'une combinaison nouvelle et malsaine. Jamais nous n'avions eu des partis, et surtout un pouvoir, aussi experts dans l'art de la cible mouvante. Pour maîtriser l'ordre du jour médiatique, on crée un événement pour faire oublier l'autre. On fait appel à l'émotion plus qu'à la raison. On transforme l'envie de révolte en culpabilité. On exploite la moindre bourde pour discréditer l'ensemble du projet. On exhibe l'étude qui arrange et tait celle qui dérange.

Le nucléaire, le quotient familial, la TVA sociale, le temps de travail... sont quelques illustrations récentes de ce tournis politico-médiatique. Ces techniques classiques sont plus efficaces aujourd'hui, parce que l'Internet généralise l'instantanéité, la répétition, l'éclatement de l'information. Au détriment de la mise en perspective, de l'explication, de la réflexion.

Bref, plus les questions d'avenir deviennent lourdes et complexes, moins elles sont rendues intelligibles. Il ne faudra pas s'étonner d'une fragilisation de la démocratie.

La crise renforce encore cette dérive. Elle explique assez largement la cacophonie des uns et la précipitation réformiste des autres. Les incertitudes du lendemain obligent à naviguer à vue et à se méfier de promesses trop précises. La réduction des marges de manoeuvre rend les projets présidentiels peu affriolants.

Il faut être courageux pour espérer gagner des voix en disant la vérité, quand elle est aussi sombre. Il est alors très tentant d'en dire le moins possible, d'être plus agressif dans la critique qu'offensif dans la proposition. Mais il faut se méfier de cette tactique de harcèlement : elle finit par lasser, elle nourrit le rejet des uns sans susciter d'adhésion aux autres, elle encourage le vote protestataire et l'abstention.

Pourtant, nous savons à peu près ce qu'il faut faire : dépenser moins, mieux partager l'effort contributif, décourager la spéculation pour orienter massivement l'épargne vers la production.

François Bayrou, il y a cinq ans, et François Hollande, depuis des mois, ont été les premiers à dire qu'il fallait faire de la fiscalité la clé de voûte de tout projet de redressement. D'abord, parce qu'il n'y a pas d'autre solution que de résorber les déficits, voisins de 100 milliards par an. Ensuite, parce qu'une dégradation de la note française, le 7 mai au matin, serait le pire scénario, quel que soit le vainqueur. Enfin, parce qu'il n'y aura pas de sacrifices consentis sans justice sociale et fiscale.

En revanche, nous savons mal comment le faire. Nous pressentons seulement que ce n'est pas en se rejetant, public contre privé, riches contre pauvres, patrons contre salariés, centres contre banlieues, dogmes de gauche contre dogmes de droite, que l'on s'entendra sur un avenir commun acceptable.

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