TOUT EST DIT

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jeudi 15 septembre 2011

Euro : peser les mots et agir vite

Peser les mots, agir vite et de concert. Si l'Europe pouvait sortir ces trois jokers simultanément, la crise de la dette serait déjà, pour une bonne part, surmontée. Mais on en est loin. Ces derniers jours, la cacophonie anxiogène vient d'atteindre des sommets. L'action des dix-sept membres de la zone euro traîne en longueur. Quant aux divisions, elles s'étalent jusqu'au coeur de l'Europe, à Berlin.

Depuis une semaine, on a en effet entendu successivement un haut responsable allemand de la BCE démissionner au coeur de la crise, un ministre allemand parler ouvertement d'une faillite de la Grèce, la Chancelière le démentir et appeler à mesurer le langage. Un appel faiblement entendu au Bundestag. Hier, la fronde parlementaire des alliés libéraux d'Angela Merkel illustrait l'ampleur des divisions Outre-Rhin.

Hier encore, dans l'attente d'une téléconférence Sarkozy-Merkel-Papandreou, c'est le ministre polonais des Finances qui renchérissait dans l'alarmisme, en évoquant la fin de l'Union européenne si la zone euro devait se fissurer. Au même moment, une agence de notation déclassait sans frémir la note de cinq régions espagnoles, dont la Catalogne. L'Italie votait dans la contestation son projet de budget. Jamais l'orchestre européen n'a paru si désaccordé, désuni et sans guide.

Depuis décembre 2009, le film de la crise grecque, qui est avant tout une crise de la dette, s'est transformé en crise de l'euro. Ni le directoire franco-allemand ni les sommets à répétition n'ont permis, jusqu'ici, d'inverser la tendance. Deux plans de sauvetage de la Grèce ont été adoptés par les dirigeants. Le premier est depuis longtemps devenu inutile, le second attend encore le feu vert des Parlements des dix-sept. Le colmatage, manifestement, ne prend pas.

Alors, les autres puissances se penchent sur le cas Europe. Washington s'inquiète. Pour la première fois, le secrétaire au Trésor américain, Tim Geithner, participera à la rencontre des ministres des Finances de l'Union européenne, vendredi et samedi en Pologne. L'image sera d'ailleurs un bon résumé du problème de la gouvernance économique de l'euro, de ce qui différencie l'Europe des États-Unis dans la gestion de la crise. D'un côté, vingt-sept ministres, de l'autre un seul.

Les émergents, les seuls à disposer de liquidités, sont là, eux aussi, autour du patient. On les invite à racheter de la dette en Europe, ce que la Chine a déjà commencé à faire. Le marché européen, le plus développé du monde, fort potentiellement de ses cinq cents millions d'âmes, de son savoir-faire, serait le nouveau grand malade. Même si son déficit et son endettement restent inférieurs à celui des États-Unis.

Drôle de climat que celui de ce psychodrame financier qui flirte de plus en plus dangereusement avec une crise réelle. Et la répétition de ce schéma brouille les critères ordinaires de la communication politique. Quand la confiance fait défaut, le poids des mots peut être redoutable. Les marchés, dit-on, y sont sensibles. Mais aussi pondérés soient-ils, les mots à eux seuls ne peuvent plus combler un manque de vision, de réaction, de projet, d'unité. Tout ce qu'il est encore temps de donner à l'Europe, à condition de le vouloir.

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