TOUT EST DIT

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mardi 5 avril 2011


Réalisme politique

Après l’effet bleu Marine des cantonales, les commentaires vont bon train sur les blogs et dans les revues cathos (de Famille chrétienne à Civitas, des Manants du roi à Liberté politique et bien d’autres encore). En vue des prochaines élections et en des sens souvent différents. Voici la réflexion que nous inspire globalement la lecture de cette revue de presse intéressante mais quelque peu contrastée. Jusque dans « la famille », comme aurait dit Serge de Beketch.
Les théories sont nécessaires mais ne font pas naître les institutions ici et maintenant. Il y a un discours philosophique et chrétien portant sur la concorde (le bien commun national) et la chrétienté, autant dire sur l’actuellement impossible, voire l’inopportun, mais qui deviendra un jour opportun et possible avec le concours des « militants » chrétiens, si Dieu le veut. Prenant acte de la dissociété aggravée de la nation depuis la Révolution et de sa sécularisation croissante, le réalisme chrétien commande aujourd’hui, en prudence politique, de ne pas s’en tenir qu’au discours, à la juste doctrine et à l’idéal, sans toutefois les oublier et les trahir.
Dans la division des croyances, le fameux « compromis nationaliste » de Maurras, souvent mal compris mais inspiré de son « empirisme organisateur », proposait justement une politique qui ne soit plus déduite des principes d’une philosophie ou d’une religion de plus en plus impuissantes à convaincre et rassembler les Français, mais induite de l’expérience historique et politique plus à même de mobiliser efficacement les hommes de bonne volonté qui croient encore charnellement à la France.
Par la même démarche inductive (qui part non pas d’une idée générale pour en tirer des conséquences mais des faits observés pour en tirer une idée générale), nous avons tenté d’expliquer pourquoi, dans la décadence accélérée de la culture (mondialiste) de mort conjuguée à l’invasion islamiste, le nationalisme à la française, malgré sa doctrine pertinente, ne suffisait plus lui-même à la tâche. Non pas, certes, pour rassembler et représenter les Français qui s’aiment encore, mais pour les protéger concrètement ici et maintenant. Et qu’il fallait descendre encore en deçà, si l’on peut dire : leur proposer plus outre, par la force des choses, la discipline et le comportement d’un sain et légitime communautarisme, national et chrétien. Comme dernier rempart précisément après la destruction des frontières et le polycommunautarisme (malsain) déduit de la laïcité ouverte au pouvoir…
Mal compris encore, ce nouveau concept pratique et analogique a été critiqué par des catholiques un peu trop dépendants d’une pensée univoque sinon unique, exclusivement déductive voire dialectique : ils ont prétendu qu’il n’était pas catholique (pour tous). Mais pas plus qu’il ne s’oppose au nationalisme à la française (ouvert à la civilisation universelle), le sain et légitime communautarisme bien compris ne s’oppose à la philosophie politique d’Aristote ni à la doctrine sociale de l’Eglise (à son principe de subsidiarité notamment et à sa civilisation de l’amour). Pas plus, par exemple, qu’il n’y a de contradiction interne chez Benoît XVI quand il développe d’une part une doctrine sociale très déductive jusqu’à la promotion idéale d’un bien commun temporel international (dans Caritas in veritate) et qu’il invite concrètement d’autre part les catholiques et les hommes de bonne volonté à la création d’îlots ou d’arches de chrétienté (dans Lumière du monde)…
« Nous savons, disait Maurras, que les besoins peuvent changer. Il peut y avoir un moment où les hommes éprouvent la nécessité de se garantir contre l’arbitraire par des articles de loi bien numérotés. Il y a d’autres moments où cette autorité impersonnelle de la loi écrite leur paraît duperie profonde. Dans le premier cas, ils réclament des constitutions. Dans le second, les statuts leur paraissent importer de moins en moins, c’est à la responsabilité effective et personnelle qu’on s’intéresse » (Action française, 10 avril 1913).
Entre l’idéal constitutionnel déduit de la philosophie chrétienne (actuellement inaccessible) et la possibilité concrète (personnelle ou communautaire) induite empiriquement, il n’y a pas contradiction même s’il n’y a pas, à l’évidence, équivalence. L’erreur est d’opposer dialectiquement les deux modes de besoin ou de n’en retenir qu’un à l’exclusion définitive de l’autre. Entre les micro-chrétientés vicariantes qui agissent tant bien que mal comme des anti-corps dans une dissociété nationale et le désir légitime d’un meilleur régime institutionnel pour tous, il y a la même préoccupation chrétienne du bien commun temporel et surnaturel. Et il peut même y avoir au confluent des deux démarches (à certaines conditions relatives au moindre mal et aux principes non négociables) un front national commun qui ne néglige évidemment pas l’élection républicaine…

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