TOUT EST DIT

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mardi 5 avril 2011

La France piégée

Paris ne voulait pas se laisser entraîner dans la tourmente ivoirienne. Nicolas Sarkozy, qui a reconnu sans attendre la légitimité d’Alassane Ouattara, le président élu en novembre, avait refusé par la suite, avec constance, de jouer au gendarme, laissant à l’Onu et à l’Union africaine le soin de faire respecter le suffrage universel. Peine perdue. Comme lors des précédentes crises de la catastrophique ère Gbagbo, la diplomatie et l’armée française ont à nouveau dû monter en première ligne. Dimanche la Force Licorne a pris le contrôle de l’aéroport d’Abidjan. Elle ne cesse de recevoir des renforts et a ouvert le feu, hier soir, sur les troupes fidèles à Gbagbo.

Cinquante ans après les indépendances des anciennes colonies françaises, voici une nouvelle démonstration que la souveraineté africaine a des limites. Le néocolonialisme — la « françafrique » — n’est pas un vain mot, et Gbagbo a longtemps assis son pouvoir en exploitant les sentiments anti-français d’une partie de sa population. C’est pourtant lui qui est le grand responsable de cette crise qui ponctue dix ans de règne au cours desquels la Côte d’Ivoire n’a pas avancé d’un pas vers un avenir meilleur.

Pour se maintenir au pouvoir contre la volonté des électeurs, Gbagbo a misé sur la haine raciale, dressant les ethnies (il y en a une centaine en Côte d’Ivoire) les unes contre les autres. Diviser pour régner : la recette est vieille comme le monde. À Duékoué, elle s’est traduite par des massacres. Les deux camps ont du sang sur les mains, mais c’est incontestablement le mauvais perdant de la présidentielle qui a enclenché le mécanisme des tueries.

L’Onu et l’Union africaine se sont montrées impuissantes sur le plan politique, les troupes républicaines de Ouattara semblent incapables, après avoir conquis 90 % du pays, de faire tomber, seules, les derniers bastions d’un clan bunkérisé. La peur d’un carnage sans fin – et, il ne faut pas le cacher, la nécessité de protéger les 12 000 Français du pays — ne pouvaient que mener à une intervention militaire extérieure, finalement réclamée par l’Onu. C’est un constat d’échec pour la communauté internationale, et notamment pour Paris, piégé par les événements. Mais c’est aussi une assurance-vie pour des dizaines de milliers d’Ivoiriens. Que diraient les bonnes âmes d’un immobilisme des troupes françaises si le scénario du génocide rwandais se reproduisait en Côte d’Ivoire ?

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