TOUT EST DIT

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jeudi 29 juillet 2010

Jean-Paul Herteman : "Zodiac et Safran pourraient offrir 75 % des équipements d'un avion"

Jean-Paul Herteman, président du directoire de l'équipementier aéronautique Safran, a créé la surprise au début du mois de juillet en adressant une lettre au président du conseil de surveillance de son concurrent Zodiac Aerospace, Didier Domange, lui proposant d'étudier un rapprochement. Cette proposition a été rejetée.
A l'occasion de la présentation des résultats semestriels de Safran, mercredi 28 juillet, qui se sont traduits par un résultat opérationnel en hausse de 23 %, à 428 millions d'euros, il évoque la stratégie de développement de son groupe. Safran est cité comme candidat à l'achat de l'américain L1, spécialisé dans la biométrie, mais ne fait aucun commentaire.

Après le refus de Zodiac, envisagez-vous toujours un rapprochement ?

Nous n'abandonnons pas cette idée, au contraire, et nous continuons à travailler sur un rapprochement qui se fera de manière amicale. Je voudrais d'ailleurs exprimer ma surprise devant ce refus d'engager une discussion. Ce n'était pas une offre formelle que nous avions déposée, mais une proposition de discussion. Il s'agissait d'étudier ensemble l'intérêt et les modalités éventuelles d'un rapprochement de nos deux groupes en analysant les avantages et les inconvénients d'une telle opération, sans aucun engagement de part et d'autre.

Depuis longtemps, Safran a des vues sur ce groupe. Pourquoi les formaliser maintenant ?

Nous sommes convaincus que le mouvement de consolidation des équipementiers est lancé de manière irréversible en raison de la complexité des programmes et de l'accroissement des coûts et des risques. Nous devons tous y participer, au risque de nous affaiblir à terme. Or en associant Zodiac et Safran, nous pourrions offrir 75 % des équipements d'un avion, des moteurs aux systèmes électriques en passant par les sièges et les toboggans. De plus, le marché change avec l'arrivée de nouveaux avionneurs, futurs concurrents d'Airbus et de Boeing, qui veulent aller vite en achetant des ensembles complets. Nous avons emporté la motorisation de l'avion chinois C919 en fournissant le moteur CFM, mais aussi la nacelle.

Quels sont les autres avantages d'une telle union ?

Sur le plan opérationnel, nous avons les mêmes clients, soit près de 500 compagnies aériennes dans le monde. Les synergies sont importantes et réalisables à court terme. Mais ce rapprochement a une dimension stratégique essentielle. Nous sommes convaincus que les systèmes hydrauliques dans les avions seront remplacés par du tout-électrique. Les câbles sont moins lourds et moins chers que les canalisations.

D'ici à 2030, la quasi-totalité des avions seront gérés de manière électrique. Il faut s'y préparer. Or Safran maîtrise la technologie de l'extraction de puissance des moteurs et nous sommes numéro un mondial du câblage. Zodiac est très fort dans la distribution électrique. Nous avons ensemble l'opportunité de conquérir 50 % de ce marché estimé entre 3 et 4 milliards de dollars (2,3 à 3 milliards d'euros).

Dans cette perspective, il vous faut aller vite.

Si nous prévoyons une première application en 2018, nous devons être prêts vers 2014-2015. Nous ne sommes donc pas à un ou deux ans près pour ce rapprochement, mais nous n'attendrons pas dix ans.

Y a-t-il des alternatives à cette solution franco-française ?

Nous avons d'autres possibilités en nous alliant avec des américains, mais nous préférons cette option plus logique. Cette alliance n'a rien de "franchouillard", puisque nous employons chacun 10 000 personnes en Amérique du Nord, soit 20 000 au total.

Avez-vous déjà eu des échos positifs à cette offre ?

Je note que, pour les marchés, l'histoire n'est pas finie. Depuis le 9 juillet, date du refus de notre proposition, l'action Zodiac a grimpé de 12 %, et nous n'avons baissé que quelques pour cent. Ce qui suggère que certains trouvent que notre projet mérite qu'on l'examine. De plus, la semaine dernière, au Salon aéronautique de Farnborough, j'ai eu l'occasion d'évoquer l'idée avec les dirigeants des avionneurs. Aucun ne rejette notre logique

L'Etat, présent au capital des deux côtés, va-t-il intervenir ?

Ce n'est pas à moi de le dire. L'Etat est notre premier actionnaire à hauteur de 30 %. Il a été informé de notre projet et a donné son accord, c'est pour moi le plus important.

Quelle issue voyez-vous à cette opération ?

Ce projet est une bonne idée, et comme toutes les bonnes idées, elles finissent par se concrétiser un jour. Aussi ce ne sera pas le feuilleton de l'été, car nous n'agirons pas de manière agressive. Nous prendrons le temps de convaincre.

Propos recueillis par Dominique Gallois

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