TOUT EST DIT

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mercredi 14 avril 2010

Dans les couloirs du sommet nucléaire


Le club des puissances nucléaires est un club bien spécial. On y trouve les cinq membres du Conseil de sécurité de l'Onu (États-Unis, Russie, France, Grande-Bretagne, Chine) ; deux ennemis jurés du continent asiatique, l'Inde et le Pakistan ; Israël, même si aucun officiel israélien ne l'a jamais confirmé ouvertement ; et l'infréquentable Corée du Nord. Huit de ces neuf puissances étaient présentes, hier, à Washington.

Spéciales, les règles du jeu le sont à plusieurs égards. Ce que ces pays nucléaires ont en commun, c'est aussi ce qu'ils gardent le plus secrètement. Ce qu'ils affirment vouloir combattre ¯ la prolifération ¯, c'est en fait ce qui leur a permis d'entrer dans le club. Ce qu'ils acceptent de voir soumis à un contrôle extérieur, c'est en général ce qui est technologiquement obsolète. En outre, le modérateur du débat ¯ la puissance américaine ¯ est aussi le seul à avoir à ce jour utilisé la bombe.

On devine le résultat. La complexité du dossier nucléaire le dispute à sa dangerosité. Et c'est davantage dans les couloirs qu'en assemblée générale que les discussions tenues hier à Washington, entre les quarante-sept leaders qui avaient fait le voyage, revêtaient le plus d'importance.

L'objet premier de ce sommet était de trouver des réponses aux menaces que les organisations terroristes, notamment Al Qaida, font peser sur un certain nombre de sites nucléaires à travers le monde. Un sujet qualifié de prioritaire par l'administration américaine. La rencontre aura permis de réaffirmer l'engagement d'une cinquantaine de pays à sécuriser les stocks nucléaires sensibles. Et de voir l'Ukraine, le Canada et le Chili montrer l'exemple en annonçant qu'ils allaient se défaire de leurs stocks d'uranium enrichi.

Pour autant, c'est surtout le dossier iranien qui a retenu l'attention. Et pour cause, c'est la nouvelle frontière du risque de prolifération. Téhéran travaille à la bombe et aspire à devenir la dixième puissance nucléaire. Ni les précédents trains de sanction, ni la main tendue américaine, ni les menaces israéliennes d'intervention militaire n'ont fait reculer d'un pouce le pouvoir iranien. Or, de l'avis de nombreux experts, un Iran nucléaire réveillerait la course à la bombe au Moyen Orient.

L'histoire le montre, l'effet domino est redoutable en matière de prolifération. En 1964, la Chine procéda à son premier essai nucléaire, déclenchant aussitôt, par rivalité stratégique, le programme de l'Inde qui, dix ans plus tard, procédait elle aussi à son premier essai. Le Pakistan, humilié par sa partition en 1971, emboîta le pas à New Delhi, et devint même le carrefour du marché noir de la bombe. Jouant un rôle décisif dans les programmes nucléaires de la Corée du Nord et de l'Iran.

Au demeurant, la récente signature du nouveau traité Start, entre les États-Unis et la Russie, ne solde qu'en partie l'héritage de la Guerre froide. Car la bombe pakistanaise et tous ses avatars sont aussi le fruit des alliances et retournements d' alliances de cette époque.

Est-il encore possible de stopper Téhéran ? Les Russes et les Chinois, dont l'appui est crucial à l'Onu, acceptent enfin de parler de sanctions, mais avec encore trop de bémols pour espérer en une action commune rapide. On a pu mesurer, hier, les bienfaits et les limites du multilatéralisme restauré par l'administration américaine. Si le monde devait compter une dixième puissance nucléaire à la fin de son mandat, Obama aurait perdu son pari.

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