TOUT EST DIT

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dimanche 20 décembre 2009

Le pourquoi d'un échec au sommet

1. Que vaut le texte adopté samedi matin à Copenhague?
Ce n’est pas un traité, ni même un accord contraignant. S’il acte l’objectif réclamé par les scientifiques de contenir le réchauffement de la planète en deçà de + 2 °C par rapport au niveaux préindustriels, cette disposition n’est assortie d’aucune garantie. L’ambition de 50% de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici à 2050 n’y est pas mentionnée. D’ici au 31 janvier, les pays industrialisés devront simplement communiquer leurs objectifs de réduction d’émissions à l’horizon 2020 et les pays en développement devront annoncer les actions qu’ils comptent mettre en œuvre pour atténuer les leurs.

Quant au paragraphe stipulant la nécessité d’aboutir à un traité "légalement contraignant" d’ici à la conférence de Mexico fin 2010, un temps envisagé, il a été retiré. L’échec est donc patent au regard des espoirs portés notamment par les ONG à Copenhague. D’un autre côté, la Chine et les Etats-Unis, absents du protocole de Kyoto, y sont inclus et rejoignent donc officiellement le camp de ceux qui luttent contre le réchauffement. L’accord prévoit également 30 milliards de dollars à court terme, puis jusqu’à 100 milliards d’ici à 2020, destinés en priorité aux pays les plus vulnérables.

2. Qui est responsable des blocages?
En premier lieu les deux principaux pollueurs de la planète, les Etats-Unis et la Chine, arc-boutés sur leurs intérêts nationaux, et dans une moindre mesure l’Inde. Les pays pétroliers ont également cherché à bloquer tout accord. Ils ont été à la manoeuvre jusqu’à la dernière minute de l’assemblée plénière, samedi. Les insuffisances de la présidence danoise n’ont rien arrangé. En faisant circuler entre pays riches un texte provisoire rédigé en catimini dès le début de la négociation, le pays hôte a alimenté le soupçon d’être à la solde de Washington.

3. Quelle était la marge de manœuvre d’Obama?
Le président américain avait deux impératifs: ménager une opinion publique pour laquelle la lutte contre le réchauffement est loin d’être une priorité et éviter de braquer un Sénat qui n’a toujours pas adopté sa loi sur la santé. A moins de dix mois des élections de mi-mandat, Obama ne peut tenter de rattraper qu’à tout petits pas le retard pris aux Etats-Unis sous l’ère Bush dans la prise en compte de l’urgence climatique. Il s’est donc rendu à Copenhague les mains presque vides. Samedi matin, les journaux américains saluaient l’issue du sommet: l’essentiel était sauf, leur président n’avait pas fait de concessions inconsidérées.

4. Quel a été le jeu de la Chine?
Les Chinois ont bien accepté d’infléchir la courbe de leurs émissions de gaz à effet de serre par rapport à leur PIB; mais ils restent rétifs à toute surveillance internationale et n’entendent pas sacrifier leur développement économique sur l’autel du climat. Le sommet a surtout montré combien leur position était "indexée" sur celle des Américains, auxquels ils ne veulent rien céder.

5. La France a-t-elle joué le rôle moteur auquel elle prétendait?
Nicolas Sarkozy avait espéré infléchir le cours des choses par sa déclaration tonitruante à la tribune jeudi après-midi. Ce coup de poker a eu au moins le mérite de déclencher une rencontre entre chefs d’Etat, le soir même, après le dîner offert par la reine du Danemark. Si la France n’a pas obtenu ce qu’elle souhaitait, notamment une organisation mondiale de l’environnement (seul un organisme européen sera créé), son engagement ne s’est pas démenti au long du sommet. Dans la nuit de jeudi, sur les trente négociateurs encore présents à 6 heures du matin, il y avait seize Français. Et l’accord signé samedi est largement inspiré, même s’il est beaucoup plus timoré, du plan justice-climat porté par Jean- Louis Borloo. L’alliance climatique avec l’Afrique théorisée par Nicolas Sarkozy, elle, demande encore à être consolidée.

6. Un sommet de ce type est-il viabledans le cadre de l’ONU?
C’est peut-être le seul sujet de consensus: ce type de négociations onusiennes est totalement inefficace, par sa lourdeur, quand il faut répondre à l’enjeu climatique. Samedi, alors qu’il s’apprêtait à reprendre l’avion après une ultime nuit blanche de négociations, Jean-Louis Borloo racontait: "Vendredi, nous avons passé huit heures avec Nicolas Sarkozy, Barack Obama et les principaux chefs d’Etat européens à noussubstituer, Bic à la main, à un système défaillant…" La règle de l’unanimité n’était pas adaptée aux enjeux de Copenhague.

7. Peut-on encore sauver les meubles?
Un premier signal sera donné dès le début de l’année, quand les pays qui ont signé l’accord coucheront sur papier leurs objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre. Certains, comme la Russie, pourraient pour l’occasion revoir leurs annonces à la hausse, assure-t-on dans le camp français. Une session de rattrapage pourrait alors se dessiner à Bonn, dans six mois, pour le sommet intermédiaire avant la conférence de Mexico, prévue fin 2010.

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