TOUT EST DIT

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lundi 20 octobre 2014

Tesson : le coup de poignard d'Aubry à Hollande

Sous couvert d'ouvrir le débat, la prise de position de la maire de Lille déstabilise encore un peu plus l'exécutif. Mais à quoi jouent donc les socialistes ?


À mi-parcours de son mandat, et alors qu'il est plus affaibli que jamais, François Hollande vient de recevoir de Martine Aubry un coup de poignard assassin qui risque de mettre en question son avenir. Cet acte fratricide n'est pas de nature à apaiser le trouble que jette depuis deux ans et demi dans l'opinion l'incohérence de la politique socialiste. C'est au moment où le chef de l'État s'engage péniblement et engage le pays dans une nouvelle voie que la maire de Lille demande "une réorientation de la politique économique". Elle a l'aplomb de déclarer qu'"une raison profonde du malaise est que les Français ne comprennent pas quelle société (ils veulent) construire", rejetant ainsi sur le peuple la responsabilité d'un malentendu qui incombe entièrement aux socialistes eux-mêmes. 
Ce sont eux en effet qui ne comprennent pas ce qu'ils veulent et qui ne le savent pas. Une nouvelle preuve n'en est-elle pas fournie par les propos fracassants tenus par Martine Aubry ? Ses déclarations apportent leur contribution au déballage idéologique qu'ils donnent en spectacle au pays, de congrès en congrès, de palabre en palabre, de débat interne en débat interne. La France est depuis plus d'un demi-siècle le champ de bataille des querelles du Parti socialiste, de ses courants, des ambitions de ses dirigeants, de leurs divergences idéologiques ou personnelles. 

Crise ouverte

Libre à eux de se livrer à leurs jeux délicieux lorsqu'ils sont dans l'opposition. Mais ils sont au pouvoir, ce qui implique un devoir de cohérence qu'ils trahissent honteusement. Cette honte atteint aujourd'hui son comble. "C'est pour sauver le quinquennat", dit-elle, que Martine Aubry lance sa proposition. On aurait préféré qu'elle dît "pour sauver la France". Ce lapsus est révélateur de ses sentiments partisans. 
Quelle interprétation a donner ? en action ou en délire ?
Qui peut croire qu'elle n'ait pas mesuré la responsabilité qu'elle prend en jetant ce pavé dans la mare. Qu'elle veuille le triomphe de ses idées, on le comprend, et c'est honorable, mais ne sait-elle pas que le coup qu'elle porte à François Hollande peut être mortel pour celui-ci, et qu'il risque d'ébranler l'équilibre politique précaire du pays ? Ne sait-elle pas qu'on ne peut pas changer de politique tous les ans et qu'au demeurant François Hollande ne peut de nouveau se déjuger, et d'ailleurs il a répondu dès dimanche à sa rivale ? L'initiative de la maire de Lille répond de sa part, en toute logique, à l'intention d'ouvrir une crise dont les effets sont trop incertains pour qu'on n'en fasse pas l'économie.

Recomposition

Reste le fond du problème, c'est-à-dire "quelle politique ?". Là-dessus, on ne reprochera pas à Martine Aubry d'entrer dans le débat, ce débat que les socialistes auraient dû conclure avant de prendre le pouvoir plutôt que de palabrer sur le sexe des anges. Mais ils ont toujours eu un temps de retard sur l'histoire. On les voit aujourd'hui se diviser radicalement sur la définition de la politique économique conforme à l'intérêt national. Cette fracture annonce une recomposition politique qui intéresse l'ensemble du paysage français, une recomposition qui exige en première urgence que la gauche fasse le clair sur elle-même. Ce n'est pas en précipitant les choses par une sorte de putsch qu'elle y parviendra.
Puisque la maire de Lille est "candidate au débat d'idées", et à ce titre elle est légitime, on lui conseillera de se calmer, si faire se peut, et de préparer l'élection de 2017 en laissant François Hollande et Manuel Valls poursuivre jusqu'à la fin de leur mandat, fût-elle aléatoire, la politique qu'ils ont mise en chantier. On donnera le même conseil à la droite. On souhaite que les deux ans qui viennent amènent les politiques à leur devoir de responsabilité consacré au premier chef à une réflexion en profondeur sur leurs engagements respectifs face à l'avenir. Durant ce temps le président et le Premier ministre boiront le calice jusqu'à la lie, mais la France connaîtra une relative paix civile, dans une relative harmonie avec l'Europe.


La leçon de toute cette histoire est qu'il ne fallait pas voter socialiste en 2012.

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