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vendredi 27 septembre 2013

La fourmi Merkel et la cigale Hollande

La fourmi Merkel et la cigale Hollande


Notre président, sans charisme, sans autorité et sans cap, ferait bien de tirer les leçons du scrutin qui vient de faire d’Angela Merkel la “reine” incontestée de l’Europe.
Le plus grand péril, disait Napoléon, se trouve au moment de la victoire. C’est ce que devait se répéter Angela Merkel dimanche soir, alors qu’elle avait du mal à exulter à l’annonce du score triomphal remporté par son parti à l’occasion des élections législatives allemandes. Jamais depuis 1994, quand Helmut Kohl était au faîte de sa gloire, les chrétiens-démocrates n’avaient recueilli autant de voix. Et cette victoire est avant tout celle de cette femme, fille de pasteur, qui a grandi de l’autre côté du rideau de fer et a gardé de son éducation luthérienne à la fois une grande réserve, mais aussi une énorme rigueur.
À peine réélue pour un troisième mandat, l’une des premières déclarations de cette ancienne physicienne a été : « Maintenant, nous allons remettre l’Allemagne au travail. » Une phrase presque surréaliste pour la dirigeante de la première puissance d’Europe, qui a réussi la prouesse de ramener le taux de chômage de son pays à 5,4 %, deux fois moins que celui de la France. Depuis huit ans, elle a beaucoup demandé à ses compatriotes. Mais elle n’a jamais cédé sur l’essentiel de ses convictions afin de permettre à l’Allemagne de rester un pays qui compte. Elle a tout mis en oeuvre pour favoriser la libéralisation du marché du travail, pour faire de son pays le premier exportateur mondial, mais aussi pour limiter l’immigration, pour s’opposer à la notion même de multiculturalisme et pour refuser l’intégration de la Turquie dans l’Union européenne.
La presse française n’a cessé de caricaturer Angela Merkel, parce qu’elle a fait preuve d’une certaine inflexibilité au moment de la crise grecque, parce qu’elle refusait — à juste titre — de faire de l’Allemagne le tiroir-caisse de pays européens mal gérés, et parce que, de fait, elle donnait le sentiment de bloquer tout processus d’intégration. La chancelière allemande faisait juste son job. D’une part elle ne voulait pas sacrifier les efforts faits par ses compatriotes au moment de la réunification, puis lors de la mise en oeuvre du fameux “Agenda 2010” de réformes structurelles élaborées par Gerhard Schröder. D’autre part elle savait que l’aprèscrise allait durer longtemps et qu’il lui faudrait imposer à nouveau des sacrifices radicaux.
Comme l’assure une vieille boutade, “quand vous demandez peu aux gens, ils ne vous donnent rien, mais lorsque vous leur demandez beaucoup, ils vous donnent tout”. C’est parce que Angela Merkel n’a rien sacrifié de ses convictions, de son sens de la rigueur, des rêves de grandeur qu’elle a pour son pays, qu’elle a reçu l’onction de ses compatriotes pour poursuivre cette politique encore quatre ans, au moins, quitte à s’allier pour cela avec les sociaux-démocrates du SPD qui ont vu leur poids au Bundestag s’effondrer. C’est parce qu’elle a été, pendant toute la crise, la “fourmi” du vieux continent que beaucoup la voient désormais comme la patronne de l’Europe.
Le jour même de cette réélection spectaculaire, un sondage publié par le Journal du dimanche faisait ressortir un taux d’impopularité record pour François Hollande, avec seulement 23 % de Français qui lui font confiance. C’est l’une des contre-performances les plus impressionnantes de toute l’histoire de la Ve République (à l’exception des 22 % de popularité enregistrés par François Mitterrand en 1991). Le président “cigale”, qui se refuse à repousser l’âge légal de départ à la retraite, qui est incapable de réduire les dépenses publiques, qui a créé 400 000 chômeurs depuis son accession au pouvoir, et qui veut maintenant naturaliser le plus possible d’immigrés en dépit de la forte montée des communautarismes, n’est plus soutenu que par une poignée de Français. Il est enfermé dans son palais sans entendre monter de la France des invisibles cette colère sourde qui va se transformer, l’an prochain, en spectaculaire défaite pour le Parti socialiste.
Ce président sans charisme, sans autorité, sans cap et désormais sans légitimité, qui voulait donner des leçons à Angela Merkel lorsqu’il est arrivé au pouvoir, ferait bien de tirer les enseignements du scrutin qui vient de faire d’elle la “reine” incontestée de l’Europe. Plutôt que de tourner notre diplomatie en ridicule dans la tragédie syrienne, il ferait mieux de s’atteler à la réforme en profondeur d’un pays qui vit au-dessus de ses moyens, alors que l’Allemagne, elle, est en excédent budgétaire. Quant à la droite, elle gagnerait aussi à faire son autocritique à l’aune de la victoire de sa demi-soeur allemande, au pouvoir depuis 2005. Pour comprendre qu’on n’a jamais intérêt à trahir ses électeurs, à hésiter devant les réformes les plus audacieuses et à transiger avec la rigueur. Mais surtout qu’il ne faut rien lâcher sur l’essentiel de ce qui fait l’âme et la grandeur du pays.

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