mercredi 7 août 2013
Styles présidentiels
Styles présidentiels
Chaque président de la Ve République a tenté d'imposer son style propre, mais nul n'a pu se débarrasser de la marque indélébile imprimée par De Gaulle. Celui qui avait sans doute le mieux compris cet héritage exigeant, mais encombrant, fut Mitterrand qui n'hésita pas à déclarer, à peine élu : « Ces institutions n'ont pas été faites pour moi, mais elles me vont bien. » Le mélange de hauteur, de distance et de secret caractéristiques d'un pouvoir quasi monarchique était consolidé par l'adversaire le plus déterminé du général.
Avant lui, des héritiers plus directs avaient tenté d'assouplir le style de la présidence. En vain. Pompidou dut essuyer les critiques féroces des gaullistes purs et durs tandis que la fausse familiarité d'un Giscard se voulant populaire ne passa jamais auprès de la majorité des Français. Celui qui concilia le mieux l'héritage gaulliste avec sa propre personnalité fut sans doute Chirac, plutôt guindé et solennel, mais champion du serrage de mains et des échanges « au cul des vaches », pour reprendre une de ses expressions truculentes, mais jamais vulgaires. Ce qui ne fut pas le cas de son successeur, dont le « Casse-toi, pov'... » est apparu comme une faute de goût inacceptable. Et cela en dépit d'un activisme présidentiel et de déclarations ambitieuses, bien dans le style d'un présidentialisme dont on attend des miracles.
L'un des meilleurs experts britanniques de la politique française, Jack Hayward, a défini le style français d'action comme « héroïque », signifiant par là que les hommes politiques français croient dans la valeur du verbe et de l'ambition pour mener des politiques qui, ailleurs, s'effectuent dans la durée et sans discours enflammés et rhétoriques.
Dans ce contexte, comment situer l'actuel détenteur de la fonction suprême ? François Hollande, qui arrive ce matin en Vendée, s'est lui-même trouvé un qualificatif : « normal », habileté langagière qui lui vaut pas mal de quolibets, mais qui, pour lui, avait l'avantage de définir implicitement son prédécesseur comme « anormal ». Mais si on entend par normal un comportement qui ne relève pas de la pathologie, alors François Hollande se rapproche davantage des démocraties où le pouvoir ne prétend pas comme les anciens rois de France, régler tout et même guérir les écrouelles.
Comme beaucoup de ses homologues européens, notre Président est plutôt gris, terne, apparemment mal à l'aise dans un costume un peu étriqué. À la différence de ses prédécesseurs, il ne semble avoir ni dessein grandiose ni vision de l'avenir ou, du moins, ne l'exprime pas.
Mais ce serait une grave erreur de jugement politique d'en déduire qu'il est faible et mou. Des réformes presque inimaginables il y a quelques mois vont avoir des répercussions profondes sur la France et les Français, quelle que soit l'opinion que l'on peut avoir sur le bien-fondé de ces choix : gel des salaires publics et des retraites complémentaires, fiscalité, retraites, mariage pour tous, cumul des mandats, etc.
La crise aidant, il y a quelque chose d'héroïque dans la méthode hollandaise. À ceci près que tout se fait dans l'ambiguïté, dans le vague du discours et l'incantation de la méthode Coué, combinée avec une parfaite indifférence à l'impopularité. Le mécontentement est là, mais pour l'instant ne parvient pas à stopper la politique en cours. Sarkozy était une cible parfaite, Hollande est un avion furtif.
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