TOUT EST DIT

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vendredi 16 août 2013

Consigny : quand le Conseil d'État juge contre la santé publique

La plus haute juridiction administrative vient d'annuler un arrêté suspendant la mise en culture d'un maïs OGM. Une décision qui révolte Charles Consigny.


Le Conseil d'État a rendu une décision aberrante, le 1er août 2013, relative à un arrêté ministériel "suspendant la mise en culture de la variété de semences de maïs génétiquement modifié MON 810". Le Conseil d'État est une juridiction raffinée, qui fait la joie des étudiants en droit et le sel de l'incroyable complication administrative française. Cette fois, il semble qu'il se soit départi à la fois de sa sagesse et de son intelligence.
Que s'est-il passé ? Le ministre de l'Agriculture, à l'époque Bruno Le Maire (député UMP de l'Eure), avait pris un arrêté suspendant la mise en culture d'un maïs OGM du groupe américain Monsanto. Celui-ci est connu, entre autres, pour avoir produit des herbicides toxiques pendant la guerre du Vietnam (dont des soldats américains et des civils vietnamiens souffrent encore), déchargé des déchets cancérigènes dans l'eau potable, vendu des graines stériles aux paysans sud-américains, dépensé des dizaines de millions de dollars pour étouffer des scandales, et corrompu des centaines de scientifiques à travers le monde. Le maïs dont il est question ici avait fait l'objet d'une autorisation de mise sur le marché de la Commission européenne en 1998, la culture d'OGM étant par ailleurs, de façon absolument délirante, autorisée par le droit européen depuis une directive de 1990.

Quelles "données scientifiques fiables" ?

Fidèle à son habitude procédurière, Monsanto a saisi le Conseil d'État aux fins de faire annuler ledit arrêté, et a obtenu gain de cause au terme d'un raisonnement irresponsable et stupide. L'argument central de la décision, c'est que "pour pouvoir prendre une mesure conservatoire au motif qu'un produit est susceptible de présenter un risque grave pour la santé humaine (...), un État membre (de l'Union européenne) doit démontrer, outre l'urgence, l'existence d'une situation susceptible de présenter un risque important mettant en péril de façon manifeste la santé humaine, la santé animale ou l'environnement". Ce risque aurait dû être "constaté sur la base d'éléments nouveaux reposant sur des données scientifiques fiables", et que, bien entendu, en l'espèce, rien de tout ça n'a été démontré par l'État français.
Or sur quelles "données scientifiques fiables" le Conseil d'État se fonde-t-il ? Sur celles fournies par l'AESA (Autorité européenne de sécurité des aliments), qui compte dans ses rangs plusieurs experts travaillant par ailleurs (et sans le déclarer) pour des groupes privés d'agroalimentaire, c'est-à-dire plusieurs experts corrompus (voir notamment www.combat-monsanto.org).

Dans le doute, on autorise

La position prise par la plus haute juridiction administrative consiste à dire : dans le doute, on autorise. Peu importe que Monsanto soit un multirécidiviste de l'empoisonnement à grande échelle et que les rapports d'experts, déterminant dans la décision, émanent d'organismes vérolés. Du côté du gouvernement, on affirme qu'il va s'agir de créer "un cadre réglementaire adapté", c'est-à-dire qu'on n'écrit pas noir sur blanc qu'en France, la culture d'OGM et l'importation de produits contenant des OGM sont interdits. Or quand c'est flou, c'est qu'y a un loup, comme dit avec beaucoup de justesse la grand-mère de Martine Aubry. Le loup, en l'occurrence, c'est un groupe américain enragé qui n'hésitera pas à rendre cancérigène l'ensemble de l'alimentation mondiale pour peu que ça lui rapporte quelque chose.
Si les instances nationales s'abritent derrière la législation européenne pour ne pas réagir, il faudra les traduire en justice, car l'Europe politique est, pour une grande partie de ses acteurs, dans la main de lobbys qui ont leurs bureaux en face du Parlement de Strasbourg : il ne faut donc pas se laisser enchaîner par elle.
Le Vieux Continent est la première puissance mondiale. Les groupes tentaculaires, qu'ils soient américains, indiens, chinois ou qataris, ne sauraient l'impressionner. Un peu de courage !

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