TOUT EST DIT

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dimanche 14 juillet 2013

Le bac ? Il suffit de s'inscrire !

Près d'un candidat sur neuf est reçu, alors à quoi sert donc le bac ? Déjà en 1970, le président Pompidou s'interrogeait, mais sa réponse est restée lettre morte.


Le taux de réussite quasi définitif au baccalauréat 2013 s'est hissé cette année à un niveau record de 86,8 % : 78,5 % de reçus au bac professionnel, 86,4 % en sections technologiques et même 91,9 % en séries générales. Près de neuf candidats sur dix reçus ! Chaque année, les résultats toujours plus mirobolants à l'examen donnent du grain à moudre à ses détracteurs. Un tel niveau de réussite jette-t-il le discrédit sur l'examen ? Le niveau des bacheliers est-il suffisant pour attaquer des études supérieures dans de bonnes conditions ?

Contrôle continu

À la vérité, la problématique a changé. Le bac n'est plus un passeport pour les études supérieures : le temps où il opérait une réelle sélection est révolu. Il y a tout juste30 ans, seuls 30 % des jeunes obtenaient leur bac, récoltant ainsi les lauriers leur ouvrant les portes d'un futur alléchant. Désormais, l'avenir des bacheliers se joue bien avant les épreuves, puisqu'une très grande majorité desjeunes inscrits dans le système Admission post-bac (APB) ont obtenu la confirmation de leur admission dans leur cursus supérieur à la mi-juin. Autant dire que l'examen n'est considéré par ceux-là que comme une formalité.
Ainsi, le bac n'est plus un outil de sélection des élèves, mais bien le symbole de la clôture des études secondaires. Les résultats obtenus par les nouveaux bacheliers importent peu sur leurs études tertiaires. À peine la mention joue-t-elle un rôle - à condition d'être très bonne - pour l'entrée dans certains cursus... et encore. Le simple fait d'être reçu avec la mention "très bien" n'ouvre même plus la porte à "l'aide au mérite", qui était attribuée jusqu'à cette année aux meilleurs élèves boursiers. Les résultats qui comptent sont in fine ceux obtenus pendant l'année, car c'est à ceux-là que se fient les écoles et facultés lorsqu'il s'agit de recruter leurs effectifs.
Certains en appellent ainsi au fameux "contrôle continu", qui pourrait à l'avenir jouer un rôle plus important dans les résultats du bac général. Cela est d'ailleurs déjà le cas pour quelques baccalauréats professionnels (qui prennent déjà en compte les résultats obtenus pendant l'année, jusqu'aux deux tiers de la note finale dans certains cas) ou même pour le brevet. Mais dans le cas du diplôme national du brevet (DNB), l'introduction du contrôle continu a amplifié le discrédit jeté sur ce diplôme, alors même que le taux de réussite y est inférieur à celui du baccalauréat général (84,5 % cette année contre 86,8 %). 

"Un simple certificat"

Avant même sa mise en place, de nombreuses voix s'élèvent déjà contre ce "contrôle continu", défendant un système égalitaire, vantant un bac identique pour tous, critiquant les déséquilibres afférents aux divergences de notations entre les différents lycées du pays. Sans compter que certains établissements pourraient être tentés de gonfler les notes de leurs élèves pour garantir de meilleurs résultats au bac. De ce constat est venue l'idée d'un "contrôle en cours de formation", où les copies sont corrigées par des enseignants qui ne connaissent pas les élèves. De nouvelles impulsions qui sont le signe que les institutions phosphorent pour revoir la copie du bac.
Ce bachotage ne date pourtant pas d'aujourd'hui. Comme l'historien Claude Lelièvre le rappelait dans un billet publié il y a un an sur Educpros.fr, la question de la pérennité du baccalauréat était déjà évoquée il y a plus de 40 ans par Georges Pompidou, lors d'un discours prononcé à Albi en avril 1970: "Que veut-on faire du bachot ? Ou bien c'est un examen d'enseignement supérieur qui vous ouvre toutes grandes les portes des facultés, qui vous donne un droit de poursuivre des études, alors il faut qu'il constitue une sélection. (...) Si, par contre, on considère que l'enseignement supérieur doit assurer lui-même son recrutement, eh bien, alors le baccalauréat peut devenir un simple certificat stipulant que vous avez fait convenablement des études secondaires, sans plus, et que vous ne vous dirigez pas obligatoirement vers des études prolongées." 
Et l'historien de l'éducation de noter que trois ans plus tard, le 16 janvier 1974, un projet de loi sur l'enseignement est présenté au conseil des ministres présidé par Georges Pompidou : il y est précisé : "Le diplôme sera attribué aux lycéens s'ils obtiennent une moyenne générale aux épreuves, mais l'accès à l'enseignement supérieur ne sera ouvert qu'à ceux qui auront obtenu un certain niveau dans les matières où ils veulent se spécialiser. La décision ne sera jamais appliquée : Georges Pompidou meurt moins de trois mois plus tard."

Rite de passage

Ce bac ne semble donc satisfaire personne, et cela, depuis des décennies, sans pourtant la moindre velléité de le réformer de fond en comble. À voir les scènes de liesse chaque année devant les panneaux d'affichage des résultats, c'est à se demander si son rôle initiatique ne prime pas sur le reste. Ses plus fervents défenseurs vantent justement l'importance de l'entraînement à un premier examen, la nécessité d'en passer par ce rite de passage pour se construire : "Passe ton bac d'abord." Mais surtout, ne touche pas à mon bac.

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