TOUT EST DIT

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vendredi 3 mai 2013

Que reste-t-il du "Moi président de la République" de François Hollande ?

Des mots ou des actes ? La longue tirade formulée par François Hollande pour se démarquer de Nicolas Sarkozy n'a pas toujours été respectée à la lettre.

Souvenez-vous, c'était le mercredi 2 mai 2012. François Hollandeassomme le président sortant d'une anaphore commençant à chaque reprise par "Moi président de la République". Quinze phrases qui sonnent comme autant de promesses dans la bouche de celui qui est désormais aux commandes depuis une année. Ont-elles été tenues ? C'est ce que nous avons voulu vérifier.
Le président raté
"Moi président de la République, je ne serai pas le chef de la majorité, je ne recevrai pas les parlementaires de la majorité à l'Élysée."
Promesse non tenue. Était-ce seulement possible ? Devant le risque de se "couper de sa base" que sont les élus PS, le président a reçu en toute discrétion une dizaine de parlementaires le 19 avril. Ce genre de rendez-vous pourrait se renouveler de manière régulière.
"Moi président de la République, je ne traiterai pas mon Premier ministre de collaborateur."
Personne n'a encore rapporté un tel propos dans la bouche de François Hollande à l'égard de Jean-Marc Ayrault. En revanche, certains ministres ne se sont pas privés de remettre en cause l'autorité de leur chef de file, obligeant ce dernier à s'affirmer. Les exemples sont légion : Ayrault a dû "recadrer" Dominique BertinottiCécile DuflotVincent Peillon et, à plusieurs reprises, Arnaud Montebourg, le plus trublion d'entre tous. Une cacophonie qui, in fine, rejaillit sur l'autorité de l'exécutif.
"Moi président de la République, je ne participerai pas à des collectes de fonds pour mon propre parti, dans un hôtel parisien."
Le président n'a a priori pas répété le comportement de son prédécesseur, qui s'était affiché au très chic hôtel Bristol en 2009 afin de soigner ses relations avec les généreux donateurs de l'UMP.
"Moi président de la République, je ferai fonctionner la justice de manière indépendante. Je ne nommerai pas les membres du parquet, alors que l'avis du Conseil supérieur de la magistrature n'a pas été dans ce sens."
Une circulaire de politique pénale a été prise en ce sens par Christiane Taubira, ministre de la Justice, en septembre. Elle prévoit que le garde des Sceaux définit "la politique pénale au travers d'instructions générales et impersonnelles", mais ne donne plus d'instructions individuelles sur les affaires en cours. "Je souhaite que le parquet, grâce à un nouveau mode de nomination où serait inscrite dans la loi l'impossibilité de passer outre à un avis négatif du Conseil supérieur de la magistrature, puisse mener une action publique efficace, cohérente à l'impartialité renforcée", peut-on lire. Ces dispositions doivent être entérinées dans la future loi constitutionnelle portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature. Obstacle prévisible : son adoption demande une majorité des trois cinquièmes (Assemblée et Sénat), elle nécessite donc le soutien d'une partie de la droite.
"Moi président de la République, je n'aurai pas la prétention de nommer les présidents des chaînes publiques. Je laisserai ça à des instances indépendantes."
Le pouvoir de nomination des présidents de l'audiovisuel public (France Télévisions, Radio France) revient depuis 2009 au président de la République. Un projet de loi doit être présenté dans le courant du mois de mai afin de transmettre cette prérogative au CSA. Suffisant pour balayer le doute des nominations politiques ? Pas sûr : le nouveau président du CSA, Olivier Schrameck, a été nommé en janvier par... François Hollande lui-même.
"Moi président de la République, je ferai en sorte que mon comportement soit à chaque instant exemplaire."
Voilà une assertion difficilement vérifiable dans les textes de loi. Sur le moment, il faisait référence en creux à la présidence de Nicolas Sarkozy souvent qualifiée de "bling-bling" et à ses expressions pas toujours très dignes de sa fonction, "casse-toi, pauvre con" en tête.
"Moi président de la République, j'aurai aussi à coeur de ne pas avoir de statut pénal du chef de l'État, je le ferai réformer."
Seule l'immunité civile du président de la République pourrait être supprimée (pour l'essentiel, les conséquences de cette responsabilité sont le versement de dommages et intérêts). Le gouvernement s'est néanmoins empressé d'encadrer cette possibilité nouvelle d'attaquer en justice le chef de l'État : une autorisation préalable de la Commission des requêtes sera nécessaire. Quant au volet pénal, l'immunité devrait rester la règle. Jusqu'à aujourd'hui, en vertu de l'article 67 de la Constitution, le président ne peut pas être cité ou convoqué au cours d'un procès.
"Moi président de la République, je constituerai un gouvernement qui sera paritaire."
Mission accomplie. Sur les trente-huit ministres, dix-neuf sont des femmes. En revanche, la composition des cabinets ministériels, à l'image de l'Assemblée, est avant tout masculine, notamment parmi les plus hautes fonctions.
"Moi président de la République, il y aura un code de déontologie pour les ministres."
Une charte de déontologie, de deux pages, a bien été signée par toute l'équipe du gouvernement Ayrault après le premier conseil des ministres. Cette charte de déontologie a cependant rapidement démontré ses limites avec l'affaire Cahuzac. Les mensonges et tricheries fiscales de l'ex-ministre de Budget ont en effet incité François Hollande à aller vers une "moralisation de la vie politique" à marche forcée.
Dans un premier temps, tous les ministres ont été sommés, sur la base de leur bonne foi, de révéler au public leur patrimoine. Puis, lors du conseil des ministres du 10 avril, plusieurs projets de loi ont été dévoilés. Ils ont pour objectif d'instaurer une "haute autorité, totalement indépendante", chargée de contrôler les déclarations de patrimoine et d'intérêts avec de vastes pouvoirs d'investigation (possibilité d'auto-saisine, réquisition des services fiscaux...).
"Moi président de la République, les ministres ne pourront pas cumuler leur fonction avec un mandat local."
Si l'on s'en tient aux faits, François Hollande aurait dû parler de mandat local "exécutif". Car si les ministres ont dû démissionner de leur fonction de maire, maire adjoint ou président de collectivité territoriale (comme Manuel Valls à Évry, par exemple), ils peuvent cependant rester "simples" conseillers. Et continuer, ainsi, de cumuler fonctions nationale et locale. La formule du président était donc trop imprécise, ou trop ambitieuse : elle n'a donc été respectée qu'à moitié.
"Moi président de la République, je ferai un acte de décentralisation, parce que je pense que les collectivités locales ont besoin d'un nouveau souffle, de nouvelles compétences, de nouvelles libertés."
Trois projets de loi distincts ont été dévoilés sur le sujet lors du conseil des ministres du 10 avril. Avec beaucoup de retard, ils constituent l'"acte III de la décentralisation" et devraient entamer la navette parlementaire fin mai. Ce "tronçonnage" en plusieurs volets est censé réduire les oppositions des élus, qui défendent leurs prérogatives locales. 
Néanmoins, les propositions ont déjà été largement édulcorées par rapport aux promesses formulées sur la feuille de route du candidat. Par exemple, elles ne suppriment aucun échelon administratif du fameux "mille-feuille territorial". Elles en créent même un nouveau, avec l'apparition de métropoles au statut particulier (Paris, Lyon et Aix-Marseille-Provence).
"Moi président de la République, je ferai en sorte que les partenaires sociaux puissent être considérés, aussi bien les organisations professionnelles que les syndicats, et que nous puissions régulièrement avoir une discussion sur ce qui relève de la loi ou de la négociation."
Le vote par l'Assemblée du projet de loi sur la sécurisation de l'emploi fait figure d'épreuve grandeur nature pour tester cet engagement. Le texte de loi résulte en effet de l'accord signé le 11 janvier entre les partenaires sociaux (du côté du patronat : la CGPME et l'UPA ; du côté des syndicats de salariés : la CFDT, la CFTC et CFE-CGC). Si l'essentiel du projet a déjà été validé par les députés, des voix se sont élevées parmi certaines organisations qui dénoncent les coups de griffe portés au texte par certains amendements. Quant à la CGT et à FO, elles sont carrément hostiles à l'accord. Mais le dialogue ne peut pas toujours déboucher sur le consensus... surtout en France !
"Moi président de la République, j'engagerai de grands débats, on a évoqué celui de l'énergie. Il est légitime qu'il puisse y avoir sur ces questions-là de grands débats citoyens."
Tout dépend de ce que François Hollande appelle "grand débat". Si par "grand" le président veut dire "important", alors, oui, le débat national sur la transition énergétique (DNTE), mené depuis janvier par la ministre de l'Écologie Delphine Batho, est un enjeu décisif pour l'économie verte. Mais s'il entend par là qu'un nombre non négligeable de citoyens s'emparent du sujet, alors on peut être plus sceptique.
Pour ne prendre que cet exemple, la loi programmatique sur la transition énergétique sera-t-elle vraiment le fruit de contributions de l'ensemble de la société ? À vérifier à la fin de l'année.
"Moi président de la République, j'introduirai la représentation proportionnelle pour les élections législatives, pour celles de 2017, car je pense qu'il est bon que toutes les sensibilités politiques soient représentées."
Le rapport commandé à l'ex-Premier ministre Lionel Jospin préconisait en novembre une dose de proportionnelle de 10 % pour les législatives. Depuis, la proposition est sortie des écrans radars...
"Moi président de la République, j'essaierai d'avoir de la hauteur de vue pour fixer les grandes orientations, les grandes impulsions, mais je ne m'occuperai pas de tout et j'aurai toujours le souci de la proximité, avec les Français."
"Ne pas s'occuper de tout"..., une parole sur laquelle le président est peut-être en train de revenir. Car c'est parfois bien ce qui lui est reproché : ne pas paraître assez concerné ! Pour la proximité, on peut dire que le président normal la cultive par ses nombreux déplacements sur le terrain, surtout depuis le début de l'année. Mais dans les esprits, l'éloignement s'agrandit de plus en plus entre les Français et leur chef : seuls 24 % d'entre eux lui faisaient confiance au début du mois

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