TOUT EST DIT

TOUT EST DIT
ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

mardi 23 avril 2013

« Morale laïque »

« Morale laïque »


Le projet de loi sur la « refondation de l’école de la République » prévoit, entre autres dispositions, d’introduire un nouvel enseignement obligatoire de « morale laïque » tout au long de la scolarité, en commençant dès le plus jeune âge. Selon le ministre de l’Education ministre, « il faut être capable d’arracher l’élève à tous les déterminismes, familial, ethnique, social, intellectuel[1] ». Il y aurait-il dans ce discours, au niveau de l’inspiration,  une étrange et vague réminiscence de la politique de la table rase, comme un écho fortement atténué, dégénéré, extrêmemement lointain,  des utopies du siècle passé? Mao Zedong annonçait « Nous les forcerons à travailler de leurs mains pour qu’ils se transforment en hommes nouveaux[2] ». Cette quête se retrouve dans un autre camp. « La politique de Mussolini dénote une volonté de fascination des esprits, de transformation globale de la société et de création d’un homme nouveau »[3].  Un autre dictateur, dont je tairai le nom, voulait aussi  rompre avec le passé, faire table rase : « D’elle (la jeunesse héroïque) sortira l’homme libre, mesure et centre du monde, l’homme créateur, l’homme dieu ». Les régimes totalitaires, issus des deux grandes idéologies du siècle précédent, ont en commun le rêve d’engendrer un homme neuf, apuré des liens du passé, des entraves de son éducation, de son histoire personnelle, devenu transparent, ayant vocation à se fondre dans un tout collectif « un individu en qui se réalise fantastiquement l’unité d’une société purement humaine et s’institue le miroir de l’un »[4]. Je ne dis en aucun cas que c’est la même chose et me garde bien de toute sorte d’amalgame… Cependant, il y a peut-être quand même une sorte de lointain rapport de cousinage entre les utopies totalitaires du siècle passé et la nouvelle « morale laïque ». Alors, que se passe-t-il ? Fuite en avant ou faille dans le raisonnement? Plutôt que de vouloir utiliser l’école et les professeurs à des fins de remodelage des jeunes cerveaux, ne vaudrait-il pas mieux recentrer leur rôle sur les vraies missions de l’Education nationale en démocratie, c’est-à-dire d’enseigner, sans esprit de propagande, ni même d’influence, le français, les maths, l’histoire, la géographie et l’anglais ?

[1] JDD septembre 2012
[2]  Le Petit livre rouge
[3] Le fascisme italien – Bernstein, Milza – le Seuil
[4] Un homme en trop – Claude Lefort

0 commentaires: