TOUT EST DIT

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lundi 16 janvier 2012

Voyelles impies

Cette semaine où la France va apprendre à vivre sans le triple A commence mal. Les politiques butent décidément sur cette première lettre de l’alphabet qui fait bégayer leurs discours. Le président de la République n’a même pas osé prononcer la voyelle impie et encore moins la répéter trois fois par crainte qu’elle n’évoque son propre reniement à l’égard de canons économiques et politiques qu’il avait lui-même formulés. Le chef de l’État a préféré décliner les rassurantes consonnes du c de « courage » et du v de « volonté » pour conjurer le mauvais sort lancé par Standard and Poor’s. Face à une dégradation qui n’est en rien une surprise, il a préféré une incantation supplémentaire. Il faut agir vite, préconise-t-il, pour annoncer aussitôt qu’il… parlera au pays à la fin du mois. Parler pour annoncer qu’on parlera, donc. On était en droit d’attendre plus de réactivité après le non-événement si prévisible de vendredi soir.

Est-ce la torpeur du premier dimanche froid de l’hiver ? De son côté, le Premier ministre a semblé, lui aussi, avoir du retard à l’allumage. Curieuse stéréo des moteurs du pouvoir. Au moment même où on pouvait feuilleter le JDD dans lequel le chef du gouvernement excluait tout nouveau cran supplémentaire au plan de rigueur, Nicolas Sarkozy suggérait à Amboise des efforts supplémentaires dictés par la crise. Entre les deux voix de l’exécutif, il faudra choisir celle qui délivrera la bonne version.

Que distinguer dans cette musique confuse ? Rien de précis pour le moment. Faute de mieux, François Fillon a renvoyé la grenade dégoupillée dans le camp adverse : « Que François Hollande soumette son projet à la notation ! ». Une défausse plutôt inspirée, bien que facile, tant le candidat du PS serait effectivement très embarrassé s’il devait mettre ses propositions, très floues, à l’épreuve des analystes financiers. Il préfère expliquer que « c’est une politique que l’on a dégradée », si pratique pour éviter les remises en question.

L’absence de programme des principaux présidentiables — rien avant la fin janvier, braves gens ! — est représentative d’une France championne d’Europe de l’attente. Cette discipline s’ajoute à la lenteur avec laquelle le pays a tardé à s’attaquer au déficit public. Aujourd’hui encore, ses élites continuent de conjuguer à merveille le « il faut laisser du temps au temps » mitterrandien qui permet au gouvernement d’aborder le sommet social de mercredi sur un mode impressionniste comme si une surprise salvatrice pouvait en émerger. Ni chiffres, ni lettres. Simplement un quitte ou double au casino de la crise.

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