TOUT EST DIT

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jeudi 16 juin 2011

La Grèce abat sa dernière carte

Le projet de privatisation massive, en discussion au Parlement, fait descendre les Athéniens dans la rue.

La Grèce, toujours plus près du gouffre. Au lendemain d’une troisième journée de grève générale, émaillée de violents affrontements dans le centre d’Athènes, Georges Papandréou a abattu la seule carte politique dont il dispose encore pour faire passer un nouveau plan de rigueur. Le Premier ministre socialiste grec, engagé dans un intense marchandage avec l’opposition, a annoncé dans la soirée un remaniement de son gouvernement pour aujourd’hui. Doublé d’un vote de confiance au Parlement. «Il faut un effort national car nous sommes à un moment historique crucial et nous devons prendre des décisions cruciales», a expliqué le chef du gouvernement qui s’est entretenu au téléphone avec Antonio Samaras, son rival de droite. Le très impopulaire leader du Pasok aurait même offert de démissionner pour faciliter la constitution d’un gouvernement d’union nationale. Immédiatement refusé par l’opposition.
Colonne. Alors que des dizaines de milliers de Grecs étaient descendus hier dans la rue pour dire haut et fort que «la Grèce n’est pas à vendre» (lire ci-contre), le gouvernement entamait au Parlement la discussion de cette nouvelle cure d’austérité dont la colonne vertébrale consiste en un programme de privatisations massives inédit en Europe. Selon le gouvernement, le vote de ce plan conditionne le versement de la cinquième tranche du prêt de 110 milliards d’euros accordé en 2010 par l’UE et le FMI, dont 53 milliards au total ont été versés à ce jour. Ce qui signifie que si les députés le rejettent lors du vote prévu à la fin du mois, la Grèce se retrouvera en cessation de paiement…
Tiercé. A côté des 28,4 milliards d’euros d’économies que doivent rapporter d’ici 2015 de nouvelles coupes dans les dépenses couplées à des hausses d’impôts, l’Etat grec espère engranger au total 50 milliards de recettes en vendant des actifs très variés. Des transports (trains, ports et aéroports) à l’énergie avec la compagnie nationale d’électricité en passant par les loisirs (loterie, tiercé) ou la gestion de l’eau, les privatisations partielles ou totales d’une trentaine d’entreprises publiques doivent rapporter 15 milliards. Mais c’est la vente du parc immobilier de l’Etat qui fera rentrer le plus d’argent dans les caisses. Le gouvernement en attend 35 milliards. Les monuments et les îles - que le tabloïd allemand Bild a suggéré de vendre «en partie» - ne seront évidemment pas cédés. Même en l’absence d’un cadastre général réclamé de longue date par l’Europe, le patrimoine mobilier et immobilier total de la Grèce est évalué à 280 milliards d’euros, ce qui laisserait une certaine marge.
Réclamé par la troïka des créanciers (Commission européenne, Fonds monétaire international et Banque centrale européenne) qui a placé la Grèce sous étroite surveillance, ce plan de privatisations ne sera pas géré par l’Etat grec lui-même. Une «agence au management indépendant et professionnel» sera créée afin de veiller à l’application du plan. L’UE a demandé que cette agence compte en son sein des représentants étrangers, inspirée du modèle allemand de la Treuhandanstalt, qui avait démantelé les conglomérats est-allemands après la chute du mur. Il s’agit, explique la troïka, de faire en sorte que «les interférences politiques quotidiennes» ne viennent pas compromettre ce nouveau plan.
«Bradage.» «Il fallait privatiser et réformer plus vite. A force de traîner, le gouvernement n’est pas dans une position de force pour marchander avec les repreneurs», estime Angelos Tsakanikas, chercheur au centre de réflexion patronal IOBE. «Réservé» sur le succès de ce plan, il n’y voit pourtant «pas d’alternative. J’imagine que les Grecs vont le subir, mais au prix cette fois d’un véritable coût politique pour la majorité socialiste». Une bonne partie de la base du Pasok, qui refuse ce «bradage» du pays, reste vent debout contre les nouvelles mesures. Ce programme sera-t-il suffisant pour mettre la Grèce sur la voie d’un désendettement durable? Les économistes en doutent désormais. 50 milliards d’euros de cessions, cela ne ramènerait la dette qu’à environ 130 % du PIB contre 157 % aujourd’hui.

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