TOUT EST DIT

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samedi 3 juillet 2010

Le danger afghan

« On ne gagnera pas la guerre en Afghanistan, pas plus que les Russes qui s'y sont cassé les dents ! » Voilà l'opinion de militaires de haut rang qui ont de plus en plus l'impression que les États-Unis et leurs alliés s'y enlisent.

Un général prestigieux vient d'être limogé par Barack Obama. Cela ne signifie aucunement un changement de stratégie du gouvernement américain. Celui qui le remplace est partisan d'une lutte qui, évitant les bavures et autres dégâts collatéraux, pourrait gagner à la cause du gouvernement afghan les populations soumises à la pression des talibans.

Tant mieux si l'on s'efforce enfin d'éviter les atteintes aux civils, mais les troupes ont l'impression d'être encore plus exposées parce qu'elles sont retenues dans leur action. Le moral s'en ressent d'autant plus que la guerre se fait plus meurtrière. Depuis six mois, le nombre des tués de la coalition occidentale (322) a déjà dépassé celui de l'année 2008 (295). On compte 102 morts rien que pour ce mois de juin.

Cependant, le fond du problème est ailleurs. Dans les pays musulmans, la présence étrangère est très mal ressentie. Ceux qu'ils nomment les « infidèles » veulent leur imposer leur manière de voir, de vivre et d'agir qu'ils appellent la démocratie. Ils donnent ainsi l'impression de s'en prendre à leur société, à leur nation. Même si certains ¯ et sans doute beaucoup ¯ déplorent l'extrémisme islamiste, l'action des étrangers sur leur sol leur paraît inacceptable.

Quant à la police et à l'armée afghane en formation, on devine la fragilité de leur fidélité. Comme toujours en pareil cas, il y a ceux qui sont prêts à virer de bord le jour venu...

Une autre attitudedevient nécessaire

Notre volonté de nous maintenir en Afghanistan tout en annonçant notre départ dans quelques mois brouille tous les messages. Cela crée une grande incertitude dans les forces afghanes et un grand espoir chez leurs adversaires.

On commence à s'apercevoir que nous nous épuisons et que, par exemple, les États-Unis peinent à trouver les hommes en nombre suffisant pour maintenir leur pression. Ils seraient sans doute incapables de faire face à d'autres conflits s'ils survenaient et seraient donc amenés à recourir à l'extrême violence de toutes leurs armes, autrement dit à une escalade immédiate dont les conséquences seraient imprévisibles. De toute manière, la détestation de l'Occident n'en serait qu'accrue. On est loin du rêve du président Bush d'apporter la civilisation et la démocratie.

Ce genre de méthode ne peut atteindre un tel but. Le vice-président américain, Joseph Biden, dit avec netteté que l'Amérique a d'autres intérêts stratégiques que l'Afghanistan, qu'elle est piégée par cette guerre interminable et qu'il faut en sortir. En effet, depuis des années, les progrès sont quasi nuls et l'on ne voit pas d'issue.

Comme le dit le général Desportes, « la priorité absolue à la ligne sécuritaire, le soutien à un gouvernement fantoche ne fonctionnent pas à long terme » (1). Et nous savons d'expérience que l'on ne gagne pas une guérilla lorsqu'elle émane du peuple et alors que l'opinion, en général, réprouve la présence des forces étrangères. Il est donc grand temps de choisir une autre attitude et de sortir d'un tel guêpier sans s'y perdre encore plus. La prolongation d'un tel engagement, loin de renforcer les intervenants extérieurs que nous sommes, les affaiblit tous sans exception et gravement.


(1) Le Monde, 2 juillet 2010.

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