L'Eglise catholique, éclaboussée par les scandales de pédophilie, a resserré les rangs, hier, autour du pape. Benoît XVI a prononcé une bénédiction de Pâques centrée sur les conflits en cours, notamment au Moyen-Orient, mais sans aborder ces affaires.
« L'Eglise est avec vous ! », a assuré au pape le doyen des cardinaux, Mgr Angelo Sodano, dans un message de voeu pascal tout à fait exceptionnel, lancé juste avant la messe présidée par Benoît XVI. « Avec vous les cardinaux, vos collaborateurs de la Curie romaine. Avec vous les confrères évêques éparpillés de par le monde. Particulièrement avec vous en ces jours, les 400 000 prêtres qui servent généreusement le peuple de Dieu », a affirmé le cardinal.
Accusé d'avoir couvert
des prêtres pédophiles
à Munich
Depuis plusieurs mois, l'Eglise catholique est touchée par une cascade de scandales révélés en Europe, particulièrement en Irlande. Son chef lui-même a été accusé dans la presse d'Allemagne, son pays natal, et des Etats-Unis d'avoir couvert des prêtres pédophiles quand il était archevêque à Munich, puis lorsqu'il était à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi avant de devenir pape en 2005.
En prononçant sa bénédiction « urbi et orbi » (« à la ville et au monde ») depuis le balcon de la basilique, le pape a affirmé que face à une crise « profonde », l'humanité a « besoin » d'une « conversion spirituelle et morale » et de « changements profonds, à commencer par celui de la conscience ». Mais Benoît XVI n'a pas fait d'allusion aux scandales en cours, devant la foule de fidèles massés sous la pluie place Saint-Pierre, qui l'ont acclamé avec ferveur. Interrogés, ceux-ci ont pour la plupart pris la défense de l'Eglise face aux scandales. « Les journalistes en font quelque chose de plus important que cela ne l'est en réalité », a estimé Edgar Meier, un catholique venu d'Allemagne.
Avant de souhaiter « Joyeuses Pâques » en 65 langues, Benoît XVI a appelé à la paix au Moyen-Orient, en Terre Sainte et en Irak, ainsi qu'en Afrique, particulièrement en République démocratique du Congo, en Guinée et au Nigeria. Il a également évoqué l'Amérique latine et les Caraïbes « touchés par une dangereuse recrudescence des crimes liés au trafic de la drogue », ainsi que Haïti et le Chili dévastés par des séismes. Il s'est aussi inquiété du sort des « chrétiens qui à cause de leur foi souffrent la persécution et même la mort », citant particulièrement le Pakistan.
L'une des périodes les
plus difficiles de l'histoire
de l'Eglise catholique
La semaine pascale qui commémore pour les catholiques le martyre, la mort et la résurrection du Christ, a coïncidé avec l'une des périodes des plus difficiles de l'histoire de l'Eglise catholique. Déjà ternie par les scandales de pédophilie, elle a été marquée par une polémique supplémentaire, vendredi soir, lorsque le prédicateur du Vatican a dressé indirectement un parallèle entre l'antisémitisme et les accusations contre l'Eglise et Benoît XVI. Le Vatican a immédiatement pris ses distances, soulignant qu'il ne s'agissait pas de sa position officielle. Mais devant le tollé suscité par ses propos, le père Raniero Cantalamessa a présenté ses excuses, regrettant d'avoir « contre sa volonté heurté la sensibilité des juifs et des victimes de la pédophilie ».
Toute la semaine, les médias du Saint-Siège, l'Osservatore Romano et Radio Vatican ont publié des messages de soutien au pape et à l'Eglise face à « une propagande grossière » voire « une machination ». Hier, au moins trois journaux italiens publiaient des interviews de prélats défendant Benoît XVI, assurant qu'il fut le premier à initier la lutte contre la pédophilie dans l'Eglise.
« Un silence coupable »
« Il y a une campagne de dénigrement et de calomnies qui vise à salir le pape », s'est insurgé hier dans Le Parisien le chef de l'épiscopat français, Mgr André Vingt-Trois. Dans une interview à La Stampa, un autre important cardinal français, Roger Etchegaray, a appelé l'Eglise à « remplir sa mission sans se laisser intimider et sans craindre les ennemis ».
Le primat de Belgique, Mgr André Léonard, a qualifié « d'exemplaire » la récente lettre de Benoît XVI aux catholiques d'Irlande pour affronter la question de la pédophilie dans le clergé, même si cet archevêque a reconnu que l'Eglise a « pendant des décennies mal géré le problème ». « Par un silence coupable, on a souvent préféré la réputation de certains hommes d'Eglise à l'honneur de ces enfants abusés », a-t-il admis.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire