La vocation -ou plutôt le devoir- d'un président de la Vème République, c'est, certes, d'afficher en toutes circonstances, ne serait-ce que pour rassurer, un sang-froid marmoréen. On serait tenté de dire: royal.  
Il n 'empêche: mardi soir 26 novembre, François Hollande -venu célébrer à la Cinémathèque (par coïncidence: à deux pas du Palais des Sports où se produisait au même moment Céline Dion, et à trois pas de la forteresse de Bercy) les 25 ans de l'Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites virales (ANRS)- avait quelque chose de fascinant tant il paraissait, en ces instants, parfaitement imperméable aux aléas de l'actualité, presque serein.  
Certes, les chercheurs haut de gamme réunis ce soir-là sont étrangers aux joutes politiciennes et, de surcroît, reconnaissants au chef de l'Etat de les avoir épargnés à l'heure des arbitrages budgétaires. En plus, il vante sans cesse l'importance "cruciale" de la recherche. Leur accueil a donc été un peu plus que poli: quasiment cordial. A son arrivée, tout le monde s'est levé. Soudain, c'était comme si la "crise" avait été provisoirement mise entre parenthèses. Comme si, au lieu de François Hollande, c'était... Georges Pompidou qui avait surgi.      
Il n'empêche: le plus souvent grave mais parfois enjoué, presque taquin, en tout cas fort à l'aise avec lui-même, le président (portait-il un masque ? Croit-il que sa "baraka" le sauvera ? A-t-il, selon les moments, plusieurs "vérités" interchangeables?) n'avait, jeudi soir, rien à voir avec l'image que la plupart des Français s'en font aujourd'hui. Vantant l'excellence française, les vertus de la compétition, les mérites de la pluridisciplinarité ou encore les avantages du partenariat public-privé, saluant ces chercheurs (parfois assis devant lui) qui, après tant de succès, rêvent maintenant de parvenir à éradiquer le sida et les hépatites virales. "Gagnez cette guerre!" leur a-t-il intimé. 
Patron de l'ANRS, Jean-François Delfraissy -allusion aux petits films qui avaient précédé- avait regretté, devant François Hollande, qu'ils aient peut-être été un peu trop laudateurs, ne laissant guère de place à l'autocritique. "Ne vous faites pas de souci, lui a répondu sous les rires de la salle François Hollande. Les critiques, j'en sais quelque chose, les autres s'en chargeront...".     
Sans doute l'assistance était-elle conquise d'avance. Mais rarement l'écart entre les angoisses des Français et la sérénité (apparente ou affectée) du chef de l'Etat n'était apparue aussi criante. Deux heures de la vie d'un président sous les pas duquel le sol menace pourtant, par moments, de se dérober...