TOUT EST DIT

TOUT EST DIT
ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

samedi 29 septembre 2012

Boniments pour l’enfer fiscal


Le rendez-vous télévisé de Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, avec les Français, avait tout de la réunion d’urgence et de la communication de crise. A l’heure du passage à l’antenne, jeudi soir, un sondage venait de confirmer que près de deux tiers des Français désapprouvent la politique économique et sociale du gouvernement. La grande majorité d’entre eux pense que les classes moyennes seront les plus touchées par les hausses d’impôts, selon un sondage Tilder-LCI-OpinionWay publié jeudi.
Là, on n’est plus dans le domaine de la subjectivité. Cette « grande majorité » des Français se contentent de regarder les chiffres.
A la question : « Etes-vous satisfait ou mécontent de la politique économique et sociale du gouvernement de Jean-Marc Ayrault ? », 62 % des sondés ont donné une réponse négative (38 % d’assez mécontents et 24 % de très mécontents), soit un bond de 17 points par rapport à un sondage identique du 14 juin. Le nombre de satisfaits a chuté de 16 points, de 53 à 37 %. Seuls trois quarts des électeurs de François Hollande sont satisfaits (et un électeur de Bayrou sur deux, comme quoi…).
Pourtant tout ce qui se produit aujourd’hui était parfaitement prévisible, aussi bien avant la présidentielle qu’avant les législatives.
Question non posée, et qui elle est évidemment de l’ordre de la conjecture : Sarkozy aurait-il fait mieux ? Rien n’est moins sûr, vu l’énormité de la dette et les charges que la France va devoir affronter à l’avenir en raison de sa politique de dénatalité nationale et d’immigration toujours galopante. Mais il est tout de même difficile de lire ce sondage autrement que comme l’image d’un pays qui se mord les doigts…
L’opération de « com’ » du Premier ministre a-t-elle réussi ? Il aura été flou, imprécis, lisse, tentant de se raccrocher au « modèle » social-démocrate allemand et donc à ses résultats et à la meilleure santé allemande qui sont pourtant le fruit d’un passé bien différent de notre aujourd’hui. Peu importe à Jean-Marc Ayrault, professeur d’allemand : c’est juste une affaire d’image. Mais pour le reste, son intervention télévisée n’aura rien eu de mémorable. Elle ne changera rien. Rien au choc fiscal qui attend la France et qu’il était chargé de justifier, façon bonimenteur.
La vraie information était pour ce vendredi, avec la présentation du projet de budget en Conseil des ministres à l’objectif affiché de ramener le déficit du pays à 3 % du PIB. Une tentative qui se chiffre, on le savait déjà, à 30 milliards de hausses d’impôts et de restrictions de dépenses, à ajouter aux 6 milliards de hausses d’impôts votés en juin et aux 2,5 milliards d’économies annoncées de l’assurance-maladie.
« Si nous renonçons à cet objectif, alors tout de suite les taux vont remonter et là on sera dans la situation de l’Italie, là on sera dans la situation de l’Espagne et moi je ne veux pas ça », a-t-il déclaré sur France 2. « Je veux dire stop à la dérive des déficits et de la dette », a-t-il lancé. L’objectif est sain. Mais la sur-dépense de l’Etat est par nature socialiste… N’oublions pas que les agences et commissions de toutes sortes engloutissent quelque 50 milliards chaque année, selon l’Inspection générale des finances.
La dette est passée de 64,2 % du PIB en 2007 à près de 89,7 % fin mars 2012 et devrait dépasser le seuil symbolique de 90 % l’an prochain avant de refluer (?).
« 1,5 point de PIB de réduction du déficit, c’est considérable. Mais surtout, en période de croissance zéro, c’est exceptionnel, ça n’a jamais existé », a déclaré à l’AFP Elie Cohen, directeur de recherche au CNRS. « Du jamais vu », a renchéri Eric Heyer, de l’Observatoire français des conjonctures économiques, toujours cité par l’AFP.
Le gouvernement revendique d’avoir réparti l’effort en trois parts égales : 10 milliards de prélèvements supplémentaires sur les entreprises, 10 milliards sur les ménages et 10 milliards d’efforts sur les dépenses de l’Etat. Ces hausses vont toucher en priorité les ménages aisés et les grandes entreprises, assure le gouvernement. Le « show » de jeudi soir était surtout destiné à en convaincre les Français moyens et les PME. Les nouvelles hausses d’impôts épargneront « neuf Français sur dix », a affirmé jeudi Jean-Marc Ayrault. Mais en général, la pression sur les plus riches n’assure pas le bien-être des moins riches qu’eux… Et les classes moyennes sont persuadées du contraire.
Parmi les mesures déjà connues, une nouvelle tranche supérieure, à 45 %, de l’impôt sur le revenu va être créée pour les contribuables gagnant plus de 150 000 euros par an. Le cumul des avantages dont bénéficie tout foyer fiscal sera abaissé à 10 000 euros mais les niches relatives aux départements d’Outre-Mer, aux monuments historiques et au cinéma échapperont à ce plafonnement global. Cela risque de faire chuter les revenus des associations.
Pour les familles – ou plutôt contre – le bénéfice du quotient familial sera limité à 2 000 euros par enfant au lieu de 2 336 euros actuellement.
Les revenus du capital seront désormais imposés sur le même barème que ceux du travail et l’impôt de solidarité sur la fortune sera relevé.
Une taxe exceptionnelle à 75 % sur les revenus des plus riches (ceux dont le revenu excède un million d’euros annuel) est en outre symboliquement créée pour deux ans. On sait qu’elle ne rapportera quasiment rien, sinon une folle envie d’aller voir ailleurs pour les gens concernés, mais ça ne fait rien : c’est pour la forme !
L’avantage fiscal pour les entreprises qui s’endettent sera réduit : les intérêts d’emprunt ne seront plus déductibles en totalité au delà de 3 millions d’euros. Le dispositif qui permet de réduire son ISF de 50 % des montants investis dans des PME sera en revanche maintenu.
Enfin, en plus d’une augmentation des prix du tabac, une hausse de la taxe sur la bière pourrait être instaurée.
Mais l’effort ne s’arrêtera pas au projet dévoilé vendredi. Un collectif budgétaire, attendu en fin d’année, pourrait augmenter la TVA ou la CSG et donc toucher tous les Français, afin de soulager les cotisations sociales des entreprises pour relancer la compétitivité.
Le Premier ministre s’est borné à répéter jeudi que ces deux prélèvements ne seraient pas relevés… pour « boucher les trous » des comptes publics. Bel exemple de mensonge par omission : ils seront donc bien relevés – mais pour autre chose.
Les Français trouveront cela tellement plus agréable !

0 commentaires: