TOUT EST DIT

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mercredi 28 juillet 2010

Pourquoi la Russie privatise ses grandes entreprises

Moscou va vendre des parts de conglomérats publics pour 29 milliards de dollars. L'objectif n'est pas tant de renflouer le budget que de réduire la part de l'Etat dans l'économie et d'attirer les investisseurs étrangers, explique Georges Sokoloff, professeur émérite des Universités, spécialiste de la civilisation russe contemporaine.

L'Etat russe a présenté un programme de privatisation d'entreprises publiques de premier plan, qui vise à rapporter près de 30 milliards de dollars. Est-ce un plan historique?

Ce programme est certes plus important que ce qui avait été annoncé à l'automne 2009 (il était alors question de dégager 2 milliards de dollars en vendant des participations dans plusieurs milliers d'entreprises), mais c'est surtout parce que depuis la conjoncture internationale est beaucoup plus favorable qu'il y a six mois. Au final, ces privatisation ne concernent qu'une petite dizaine d'entreprises.

Les ventes concernent cependant des conglomérats publics stratégiques (le pétrolier Rosneft, le monopole de pipelines Transneft, l'opérateur ferroviaire RZD ou encore le réseau de caisses d'épargne Sberbank)...

Oui, mais l'Etat ne cède pas une part significative de ses entreprises, il garde la part majoritaire de blocage. C'est-à-dire qu'il garde le contrôle de ses entreprises, tout en engrangeant un bénéfice non négligeable.

Ces recettes vont-elles servir à combler le déficit budgétaire du pays ?

Non, ces privatisations représentent moins de la moitié de l'effort de l'Etat pour ramener le déficit budgétaire de 5% du PIB en 2010 à 4% en 2011 et 2% en 2012. Le déficit public russe n'est de toute façon pas un problème : le budget de l'Etat est alimenté par la taxe sur les ventes de produits pétroliers et les hydrocarbures, principale manne de l'économie russe. Or les prix des matières premières sont orientés à la hausse, ce qui pourrait permettre à l'Etat russe de résorber son déficit sans efforts. Le vrai problème de la Russie, ce n'est pas le déficit budgétaire mais la dette des entreprises privées russes, et notamment des banques, qui atteint près de 420 milliards de dollars.

Pourquoi les entreprises et les banques russes ne subissent-elles pas une plus forte pression des marchés ?

Parce qu'en face il y a les réserves de l'Etat, qui s'élèvent à quelque 400 milliards de dollars. Pour les marchés, l'Etat russe sert indirectement de garant aux entreprises privées.

Si le programme de privatisation ne sert pas à réduire le déficit, quel est son objectif ?

L'objectif est d'attirer des investisseurs étrangers, d'améliorer la gestion des entreprises russes et donc d'accroître leur compétitivité. Surtout, ce plan de privatisation vise à réduire la part monumentale et inutile de l'Etat dans l'économie russe, qui s'élève à 40%.

Comment expliquer que l'Etat russe possède encore 40% des actifs productifs du pays, alors qu'il y a eu une longue période de privatisations dans les années 1990, suite à l'éclatement de l'URSS ?

Après des ventes chaotiques dans les années 1990, dénoncées par les milieux économiques internationaux parce qu'elles favorisaient les oligarques russes, la Russie a freiné ces dernières années le mouvement des privatisations. C'est Poutine qui a engagé ce retour de l'Etat dans la vie économique, dont le symbole est le démantèlement du géant pétrolier Ioukos en faveur des groupes publics Gazprom et Rosneft. Mais Poutine n'est plus au pouvoir et Dimitri Medvedev entend moderniser l'économie russe, notamment en s'attaquant aux conglomérats publics.

Les entreprises françaises sont-elles présentes et ont-elle intérêt à investir en Russie ?

La France est loin d'avoir déployé toutes ses cartes commerciales en Russie. C'est l'Allemagne qui est son principal partenaire économique. Toutefois, depuis quelques mois, la France est le principal investisseur étranger en Russie. Tant mieux, car c'est une opportunité évidente. Le principal moteur de l'économie russe, c'est la consommation des ménages. Les grandes entreprises sont d'ailleurs très bien implantées en Russie : Total, Renault, Airbus, et surtout Auchan, qui est leader de la grande distribution là-bas. Le problème, c'est pour les petites et moyennes entreprises, qui ne sont à mon avis pas assez accompagnées par les banques pour s'implanter en Russie.

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