TOUT EST DIT

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jeudi 26 mai 2011

Washington, vu de Paris...

Vu de Paris, ce serait une excellente opération. Comment ne pas se réjouir à l’idée qu’une Française puisse succéder à un Français à la direction générale du Fonds monétaire international? Au fond, ce serait presque un miracle si Christine Lagarde parvenait à s’asseoir à Washington dans le fauteuil de Dominique Strauss-Kahn, aujourd’hui l’un des hommes les plus décriés en Amérique. Comme elle l’a dit elle-même: être Français n’est pas vraiment un avantage pour briguer le poste...

Mais la ministre de l’Économie et des finances, d’ordinaire peu connue pour son audace, fait montre d’un certain culot. À 55 ans, l’ambition aidant, voilà la locataire de Bercy conquérante, elle qui resta si longtemps effacée dans l’ombre du président qui l’avait promue au- delà de ses espérances. Aujourd’hui, après avoir attendu le meilleur moment pour se découvrir, elle brave le scandale mondial créé par le sulfureux démissionnaire auquel elle prétend succéder. Mieux, elle souligne son incontestable réussite à la tête d’une institution en déclin sinon moribonde quand il en avait pris les rênes en 2007.

Si elle n’a pas la surface, ni l’épaisseur politique de DSK, elle a indiscutablement le profil de la fonction. Proche des milieux de la finance, plutôt à l’aise, par tempérament, dans les négociations internationales, parlant un anglais parfait qui ravit les journalistes de télé des États-Unis, et disposant de l’expérience d’une puissante avocate d’affaires à Chicago, elle est bien armée pour assumer les responsabilités auxquelles elle se destine.

Une carte inespérée pour le chef de l’État. Après s’être mordu les doigts d’avoir soutenu, à ses dépens, son concurrent, il tient une occasion de rattraper une stratégie perdante avec une postulante directement issue de sa propre écurie. Contrairement à leur première secrétaire, Martine Aubry, les socialistes, eux, ne se grandissent pas en dénigrant une femme qui, assurément, fera très correctement le job en défendant les intérêts de l’Europe. Les dirigeants de l’Union ne s’y sont d’ailleurs pas trompés en apportant un soutien unanime à leur très libérale petite camarade. Et si elle risque de traîner les casseroles de l’affaire Tapie, soyons justes, c’est le président qui les lui a accrochées dans le dos avec une incroyable légèreté...

On pourrait chanter l’hymne à la joie, sans état d’âme, si l’accession de Mme Lagarde à la tête du FMI n’était qu’une affaire de cocorico, de prestige national ou de résistance de la vieille Europe. Ce serait oublier la légitimité des pays émergents à convoiter un pouvoir qui les concerne directement. Quel signal de modernité et d’ouverture serait donné au monde du XXI e siècle si l’un des leurs était finalement choisi! De quoi se consoler largement de la perte de ce qui a fini par être considéré, insolemment, comme une chasse gardée.



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