mardi 31 mai 2011
La plus grande épreuve des pays développés, c’est une question élémentaire: où est l’avenir? Les réponses se dérobent à notre rationalisme européen. Car ce siècle est bel et bien orphelin de son futur. Le précédent, au-delà des horreurs de son histoire, pouvaient encore croire, sans trop douter, aux bienfaits du progrès et de la croissance. Mais la crise énergétique et les menaces de réchauffement climatique, confirmées par le record d’émissions de gaz à effet de serre, ont jeté une ombre durable sur ces certitudes optimistes. Elles désorientent l’humanité. Vers où marcher?
La journée d’hier a été révélatrice d’une hésitation aussi radicale que symptomatique. Sur la rive allemande du Rhin, la décision de renoncer au nucléaire en seulement onze ans, annoncée solennellement par la chancelière. Sur la rive française, la certitude, réaffirmée tout aussi solennellement par le Premier ministre à Strasbourg, que cette même énergie était bel et bien celle du futur. Sous nos yeux, une frontière abyssale s’est ouverte entre les deux pays amis à propos de l’essentiel - le moteur de leur développement - sans que ce fait modifie en rien l’équilibre de ces deux piliers du continent. Et c’est bien celà le plus extraordinaire, et le plus inquiétant: l’absence de réaction explosive...
Ainsi l’Europe pourra fonctionner sur deux logiques énergétiques différentes sans que celà pose problème. Faut-il qu’elle avance à ce point en ordre dispersé pour accepter pareille dichotomie? Car c’est bien Nicolas Sarkozy qui, il y a peu, considérait encore que la méfiance à l’égard de l’atome relevait d’un obscurantisme historique: y céder, considérait-il, reviendrait à repartir vers l’âge de pierre.
Allô Angela? Car c’est bien elle, une physicienne, qui a décidé de fermer les centrales allemandes! Elle l’a expliqué: Fukushima a rendu insupportable à sa conscience de chef de gouvernement le doute infinitésimal sur la sécurité que la scientifique avait jusque-là accepté. Pouvait-on bâtir demain sur le risque de l’horreur? Elle a choisi de dire non, quand la France, elle, persiste à dire oui. Peu importe, à la limite, le poids du calcul électoral dans ce revirement puisqu’il comporte assurément une part d’instinct.
Comparaison n’est pas raison? Certes, certes... La France ne peut pas se payer le luxe de tirer un trait du jour au lendemain sur une source d’énergie trois fois plus importante pour elle (plus de 75%) que pour sa voisine (22%). Même les écologistes concèdent qu’il lui faudrait sans doute quarante ans pour sortir du tout nucléaire, imposé depuis tant d’années par tous les pouvoirs politiques au nom de l’indépendance énergétique, consolidé par le retard pris sur les énergies nouvelles, et cadenassé par EDF.
Comme toujours, la facture, elle, est en avance. Car cette politique a un prix exorbitant: l’aliénation durable d’une liberté de choix.
Le Brésil veut un patron du FMI issu d'un pays émergent
L'incertitude plane au sommet du FMI depuis l'arrestation samedi à New York de son directeur général Dominique Strauss-Kahn, inculpé d'agression sexuelle, tentative de viol et de séquestration. Le conseil d'administration du FMI s'est réuni lundi mais n'a pas encore décidé de lui retirer ou non son mandat, préférant attendre et "suivre l'évolution de la situation", mais déjà les pays émergents font entendre leur voix.
Les commentaires du responsable brésilien succèdent à un communiqué publié également mardi par le ministère chinois des Affaires étrangères, qui estime que le processus de sélection des dirigeants du FMI devrait reposer sur "l'équité, la transparence et le mérite".
Le ministre des Finances brésilien Guido Mantega avait lui aussi déclaré à un comité du FMI en avril - avant que le scandale n'éclate - qu'il était "grand temps" que les institutions de Bretton Woods rompent avec le statu quo selon lequel la direction du FMI revient traditionnellement à un Européen.
L'ancien ministre turc des Finances Kemal Dervis a été présenté comme un possible candidat issu d'un pays émergent. Ancien directeur du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), il travaille actuellement au sein du Brookings Institute, un club de réflexion basé à Washington.
Mais la chancelière allemande Angela Merkel a plaidé lundi pour qu'un Européen conserve la direction du FMI, en raison de son rôle dans la gestion de la crise de la dette dans la zone euro.
Mardi, le quotidien allemand Bild a présenté le président du directoire de la Deutsche Bank Josef Ackermann comme l'un des candidats pressentis par Berlin, citant également Thomas Mirow, président de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD).
A Paris, la ministre de l'Economie Christine Lagarde est également citée comme une possible candidate, ce qui ferait d'elle la première femme à diriger cette institution internationale.
Brian Winter, Natalie Huet pour le service français, édité par Danielle Rouquié
L'Allemagne veut faciliter le déblocage de l'aide à la Grèce-WSJ
L'Allemagne envisage de renoncer à sa proposition de rééechelonner la maturité des obligations grecques afin de faciliter le déblocage d'une nouvelle aide pour Athènes, rapporte mardi le Wall Street Journal, ce qui renforce l'euro sur le marché des changes.
En concédant qu'Athènes doit obtenir des prêts supplémentaires, sans que ce nouvel effort soit partagé, du moins sur le court terme, par les porteurs d'obligations, Berlin aiderait l'Union européenne à surmonter la crise de la dette grecque, ajoute le quotidien dans son édition en ligne, en citant des sources proches du dossier.
Sur les marchés des changes, cet article soutient le cours de la monnaie unique européenne, fragilisée ces dernières semaines en raisons d'inquiétudes sur une possible restructuration de la dette grecque.
Vers 5h45 GMT, l'euro avançait de 0,4% face au billet vert à 1,4375 dollar.
Juncker veut solutionner la dette grecque "d'ici juin"
Le chef de file des ministres des Finances de la zone euro se dit "plutôt optimiste". Il exclut une restructuration de la dette grecque.
Jean-Claude Juncker souhaite que le problème de la dette de la Grèce soit résolu "d'ici la fin du mois de juin", lundi 30 mai, a-t-il expliqué à l'issue d'une entretien avec le président français Nicolas Sarkozy.
"Nous allons essayer de résoudre le problème grec d'ici la fin du mois de juin", a affirmé le chef de file des ministres des Finances de la zone euro, à la presse.
Sur cette question de la dette grecque, "je suis plutôt optimiste", a-t-il également indiqué.
En attente du jugement de la troïka
Selon lui, "la restructuration totale de la dette grecque n'est pas une option, elle n'est envisagée par personne. Donc il n'y aura pas de restructuration de la dette grecque", a-t-il ajouté, rappelant ainsi la position adoptée par les grands pays de la zone euro, le 7 mai dernier.Jean-Claude Juncker a également rappelé la présence, actuellement à Athènes, de la troïka formée par le Fonds monétaire international, la Commission europénne et la Banque centrale européenne.
"Nous attendrons leur jugement final (...) au début de la semaine prochaine" et "leur position déterminera en partie la nôtre", a-t-il dit.
Lundi, Athènes était est en voie de conclure ses discussions avec ses créanciers pour le versement de la cinquième tranche du prêt accordé en 2010 par l'UE et le FMI, tout en préparant à la hâte un vaste plan de privatisations pour tenter de rassurer ses créanciers sur l'avenir.
Recours à des partenaires privés
Pendant sa conférence de presse à Deauville vendredi, en clôture du sommet du G8, le président Sarkozy avait réitéré son refus de toute restructuration de la dette grecque, mais sans exclure d'autres pistes, comme la prise en charge d'une partie de la dette grecque par "des partenaires privés".Cette solution est avancée depuis plusieurs mois par la chancelière allemande Angela Merkel.
Le 17 mai à Bruxelles, Jean-Claude Juncker avait dit que la Grèce devait "rapidement privatiser 50 milliards d'euros d'actifs afin que sa dette à moyen et long terme devienne soutenable".
"L'implication du secteur privé est un problème que nous allons examiner avec toute l'attention requise", a-t-il affirmé lundi.
Interrogé sur l'ambiance de son entretien avec M. Sarkozy, M. Juncker a également affirmé: "avec le président, ca se passe toujours très bien: atmosphère amicale, copinage évolué".
La Grèce attend que le FMI et l'UE "tranche"
La Grèce retient son souffle. Le versement de la prochaine "tranche" du prêt UE-FMI sera ou non confirmé par les deux organisations impliquées mardi 31 mai 2011 ou tout début juin.
Malgré le plan d'aide, de 110 mrds€ octroyés en 2010 par le FMI et l'UE, la Grèce peine à sortir de la crise financière qui la frappe en raison d'un important déficit budgétaire.
Le ministre grec des Finances, Georges Papaconstantinou, se dit confiant quant à l'octroi du plan d'aide. Une déclaration en contradiction nette avec la position du journal allemand Der Spiegel, qui mettait en doute, dimanche 29 mai 2011, le déblocage de la situation et la capacité du gouvernement grec à maîtriser son déficit. Article aussitôt démenti par le FMI et la Grèce.
L’Irlande, le Portugal bénéficient d'un plan d'aide de l'UE et du FMI, l'Espagne devrait suivre bientôt.
Les banques coulent avec la Grèce
"Les banques portugaises sont les plus exposées vis-à-vis de la crise grecque", titre le Jornal de Negócios, qui cite la Banque des règlements internationaux, selon laquelle, le système bancaire portugais a une exposition de plus de sept milliards d'euros vis-à-vis de l'économie grecque, ce qui correspond à 4,2% du PIB du Portugal, un record. Le quotidien économique lisboète rapporte également l'avertissement lancé le 26 mai par Bruxelles, qui a menacé de suspendre l'aide à la Grèce et au Portugal si les deux pays n'atteignent pas les objectifs trimestriels en matière de consolidation fiscale. Le président de l'Eurogroupe Jean-Claude Juncker a souligné que le FMI pourrait geler immédiatement la prochaine aide financière à la Grèce si le pays ne remplissait pas les objectifs établis par la Troika. La même chose s'applique au Portugal, a confirmé au quotidien une source de la Commission européenne: la libération des fonds est soumise à l'analyse trimestrielle des objectifs [mis en place pour l'économie portuguaise] qui sera annoncée la semaine prochaine par la mission du FMI, lorsqu'elle rentrera au Portugal. Jornal de Nogocios avertit que pour le Portugal et la Grèce, si les écarts sont grands et qu'il n'y a pas de mesures supplémentaires pour rattraper les mauvais résultats, le fond sera même "gelé".
Osons l’Europe 2.0 !
Seul le spectre menaçant du nationalisme maintient encore l’Union européenne en vie. La ponction de nos ressources financières est de toute façon préférable à la guerre, nous serinent nos leaders. Et pourtant, pour la première fois depuis un demi-siècle, les Européens ont la possibilité de voir au-delà de l’Etat-nation. Depuis l’effondrement des taux de natalité, nous ne sommes de toute façon plus assez nombreux pour continuer à nous tomber mutuellement sur le râble. La construction européenne n’est pas un instrument conçu pour éviter la guerre, mais plutôt l’expression sympathique de notre incapacité à la faire. Le redécoupage de l’Europe porte l’espoir d’un avenir au-delà des nations, des religions et des traditions.
C’est ainsi que, dès 2009, l’historien suédois Gunnar Wetterberg proposait de ressusciter l’Union de Kalmar [qui réunît entre 1397 et 1523 les trois royaumes scandinaves de Danemark, Suède et Norvège sous un même roi] dans les pays nordiques. Cette nouvelle union réunirait l’Islande, le Danemark, le Groenland, la Norvège, les îles Svalbard, la Suède, la Finlande et éventuellement l’Estonie. Cet espace de 3,5 millions de kilomètres carrés pour 26 millions d’habitants deviendrait la huitième puissance économique mondiale. Les Pays-Bas et la Flandre pourraient s’y rallier ultérieurement. Une alliance avec la Grande-Bretagne – détentrice de l’arme atomique – transformerait la mer du nord en Mare Nostrum et ouvrirait la porte d’un partenariat avec les Etats-Unis et le Canada qui rendrait l’Atlantique nord invulnérable.
La Suisse au coeur d'un nouvel espace économique et monétaire
Les regards sont tournés vers la Suisse, en tant que pays issu d’une volonté politique qui fonctionne: les Genèvois ne sont pas français, les Tessinois ne sont pas italiens et les Zurichois ne sont pas allemands. Les voisins qui ne veulent plus être voisins peuvent participer avec les Confédérés à la construction d’un espace économique et monétaire de premier plan qui résorbera le déficit des naissances en attirant une main d’œuvre motivée du monde entier.Aucun système de transferts n’existe pour combler l’écart entre les régions riches et les régions plus pauvres. Ainsi, tandis qu’à Brême ou à Berlin, les partisans des transferts financiers sont toujours en quête de nouveaux moyens de ponctionner les portefeuilles de leurs voisins, les cantons suisses n’ont d’autre choix que d’attirer des entreprises innovantes et une main d’œuvre de qualité s’ils veulent accroître leurs revenus. Or, ils parviennent eux aussi à aider les plus démunis et font d’ailleurs généralement mieux que les meilleurs élèves de l'Etat fédéral allemand.
D’après l’OCDE, la Suisse était déjà en 2009 la championne du monde de l’innovation, et le pays décroche la première place de l’Indice de compétitivité mondiale pour l’année 2010-2011. Le Sud-Ouest de l’Allemagne rejoindrait ce nouvel espace, ainsi que le Nord de l’Italie, et l’on tendrait la main en direction de Florence et d’Urbino. A l’Est, la Slovénie déjà polyglotte complèterait la fédération. Avec 70 millions d’habitants sur 450 000 kilomètres carrés, l’ensemble occuperait la quatrième place mondiale en termes de puissance économique – derrière les Etats-Unis, la Chine et le Japon.
Une fédération méditerrannéenne au sud de l'Europe
La création d’une union nordique et d’une fédération alpine aurait également le mérite d’accorder une seconde chance aux régions jugées sans espoir. Au lieu de les perfuser à coups de milliards, on remettrait à ces pays des notices leur permettant de construire le matériel de pêche avec lequel chacun pourra ramener son propre poisson à terre. Après les dépôts de bilan auxquels ils ne pourront pas échapper, le Portugal, l’Espagne, le Sud de l’Italie, les pays slaves riverains de l’Adriatique et la Grèce pourraient constituer une fédération méditerranéenne de plus de 100 millions d’habitants, qui ferait toujours recette grâce à l’énergie solaire, aux produits biologiques et aux charmes de sa culture. En associant Israël au projet, la fédération s’adjoindrait un partenaire militaire utile au vu de la proximité immédiate de l’arc islamique.Les autres pays de la Baltique et la Pologne, associés à la Biélorussie et l’Ukraine – deux aspirants à l’entrée dans l’UE – forment un ensemble analogue en superficie au grand empire lituano-polonais qui fut partagé en 1795 entre Berlin, Vienne et Saint-Pétersbourg. Une nouvelle version de la Rzeczpospolita [la République des Deux nations qui entre 1569 et 1795 réunissait le royaume de Pologne et le Grand-Duché de Lituanie], forte de quelque 110 millions d’âmes, n’aurait plus peur d’une Russie dont la population vieillit d’ailleurs encore plus vite.
La France pourrait faire cavalier seul, ou bien, de conserve avec le reste de l’Allemagne, transformer cette Eurabie qui fait si peur en titre honorifique. Dans un pays comme dans l’autre, entre 20 et 25% des jeunes éprouveront des difficultés à se former et à recevoir une bonne instruction . Des super-crèches devront donc être créées pour remédier à ce problème dès le plus jeune âge. Si cette promesse de faire de tous les enfants des forts en math était honorée, l’axe Berlin-Paris entrerait dans l’Histoire.
Placé sous la bannière rouge-verte-rouge-verte fédérant marxistes, écologistes, socialistes et disciples du prophète, ce nouvel espace multiculturel high-tech deviendrait la lumière des peuples.
Il ne faut plus malmener ceux qui n’y croient pas, car ils ont presque toutes les options devant eux. L’Etat-nation devrait être toutefois la dernière des solutions. Ceux qui se trouvent encore sous son emprise sont essentiellement des exaltés de droite comme de gauche, les uns rêvant d’une puissance révolue, les autres de transferts financiers ad vitam æternam.
Crise de l'euro
Le schisme Nord-Sud
La Grèce n’ayant pas été capable de respecter l’accord conclu avec l’Union européenne et le FMI sur la réduction de son déficit, il est difficile pour les gouvernements des pays du nord d’expliquer aux citoyens contribuables qu’ils doivent à la fois accepter des réductions budgétaires sévères et garantir des emprunts colossaus aux pays les plus endettés. C’est pourquoi la sortie de la Grèce de la zone euro, "même elle est officiellement politiquement inacceptable, pourraît être la solution la moins pire".
lundi 30 mai 2011
(1) La vie privée en péril. Des citoyens sous contrôle, Odile Jacob, 2011.
Le remplacement de Lagarde à Bercy pourrait virer au casse-tête
La question se posera si la ministre part au FMI. La durée limitée de la mission pourrait freiner certaines ambitions.
« En attendant, elle fait consciencieusement son job à Bercy. Pour préparer sa candidature à Washington, elle fait des heures supplémentaires », explique son entourage. Et si elle ne l'emportait pas ? « Elle serait ravie de poursuivre son travail à Bercy », indique diplomatiquement cette même source.
Toutefois, compte tenu des chances importantes de succès de Christine Lagarde de décrocher la direction générale du FMI, les prétendants à Bercy doivent commencer à faire valoir leurs arguments en coulisses s'ils veulent avoir une chance de briguer l'un des postes les plus prestigieux du gouvernement.
Distillés avec soin par l'Élysée, qui tranchera, des noms, des profils de candidats parfaits, alimentent les rumeurs. Au gouvernement, elles bruissent fortement. François Baroin ferait figure de grand favori. Si le ministre du Budget devait être choisi, il en serait fini de la structure bicéphale mise en place depuis 2007, qui séparait les finances publiques et leurs dossiers techniques (budget, fiscalité...) de l'Économie au sens productif du terme (industrie, commerce extérieur, PME...). Les noms de Valérie Pécresse, la ministre de la Recherche et de Bruno Le Maire, le ministre de l'Agriculture sont aussi cités. Reste à savoir si ces transferts au sein du gouvernement ne seraient pas plus déstabilisants qu'autre chose. À un an des élections présidentielles, la question mérite d'être posée.
La nomination d'une personnalité issue de la société civile est également envisageable. Cité quasiment lors des sept remaniements qui ont émaillée l'actualité politique depuis 2007, le nom d'Anne Lauvergeon peut encore apparaître. Mais cette éventualité se heurte au fait qu'elle mène une campagne active pour rester à la tête d'Areva, ainsi qu'à la durée limitée de cette mission à Bercy (jusqu'à la présidentielle). Cette faible durée pourrait d'ailleurs rebuter d'autres candidats.
Des experts réputés
La solution parlementaire pourrait être la solution la plus confortable. Le Parlement compte en effet un certain nombre d'experts réputés qui pourraient assurer l'intérim jusqu'aux prochaines échéances électorales, parmi lesquels Hervé Mariton. Il fut ministre des Dom Tom de mars à juin 2007 lorsqu'il remplaça François Baroin nommé ministre de l'Intérieur en remplacement de Nicolas Sarkozy parti faire campagne pour les élections présidentielles.
Il n’était que 27 e dans le rang protocolaire du gouvernement. Pas un poids lourd assurément puisque pour prix de sa désertion du camp Villepin, il n’avait obtenu, en mars 2010, qu’un strapontin, et pas le plus glamour ni le plus enviable.
D’ordinaire, reconnaissons-le, le destin d’un modeste secrétaire d’État à la Fonction publique n’empêche pas la nation de dormir. Celui-là s’écrivait «en deuxième division!» raillent volontiers, et fort aimablement ses anciens collègues pour minimiser la portée du congédiement.
Mais la «démission» de Georges Tron a bien plus de poids que le portefeuille qu’il détenait. Elle s’est même déjà installée dans le top 5 des scandales. Ceux dont on se rappelle longtemps après quand l’actualité a fini par tout recouvrir du limon de l’histoire immédiate.
Il y a bien sûr le fond de décor - celui, inédit, de l’affaire Strauss-Kahn - et puis il y a cette extravagante histoire de fétichisme des pieds et de réflexologie plantaire débridée qui aurait dégénéré. Un scénario tellement invraisemblable qu’on n’aurait jamais imaginé l’inventer.
Franchement cette sixième démission d’un ministre en exercice en un an pourrait faire rire si aucune victime ne prétendait avoir souffert des assauts du démissionnaire. Elle fait tout de même désordre car elle crée un vrai malaise dans une société qui vit mal le déficit d’exemplarité de ses élites politiques, exaspérée qu’elle est par le faites-ce-que-je-dis-pas-ce-que-je-fais.
La République irréprochable promise aux Français en 2007 tord son béret entre honte et indignité devant ses propres manquements. A ce rythme, dans quel état arrivera la crédibilité du personnel politique quand s’élancera la campagne ?
On en tremble d’avance, car le feuilleton Strauss-Kahn a, comme il fallait s’y attendre, ouvert la boîte de Pandore.
Il y a fort à parier désormais que d’autres épisodes de ce genre, restés bien enfouis pendant des années, vont maintenant remonter à la surface, délivrés par une parole libérée.
Les affaires Tron et DSK ont ceci de commun que l’une et l’autre ne sont pas des histoires de sexe mais de harcèlement et d’agression.
Pas des histoires de bagatelles clandestines sur lesquelles la presse doit fermer les yeux si elles restent dans le cadre légal, mais de vrais crimes sévèrement punis par la loi. Pas de pudibonderie mais de respect de la personne humaine totalement bafoué par la désinvolture des puissants. On y retrouve, dans la voix de l’accusation, le même abus de pouvoir de celui qui détient l’autorité et le prestige. On y retrouve aussi la même passivité des partis, au courant de comportements limite, et même plus que limite. Ils ont laissé faire par commodité, par indifférence au nom d’un droit à la vie privée qui n’était que le paravent d’une coupable irresponsabilité.
dimanche 29 mai 2011
Zapatero a un héritier contre son gré
"Voie libre pour Rubalcaba", annonce La Vanguardia. Le ministre de l'Intérieur sera le candidat à la succession du Premier ministre José Luís Rodríguez Zapatero, qui ne se représentera pas en 2012. Sa principale rivale, la ministre de la Défense Carmen Chacón "très blessée, jette l'éponge" et ne se présentera pas aux élections primaires du Parti socialiste (PSOE), alors qu'elle était soutenue par Zapatero, explique le quotidien. Après une semaine de crise au sein du PSOE, provoquée par la lourde défaite aux élections locales du 22 mai, Chacón est "la dernière victime politique" de Zapatero, estime José Antich, le directeur de La Vanguardia. Le premier ministre "risquait une épitaphe politique de dimensions colossales : son parti fracturé et une démission forcée de son poste de secrétaire général". Un prix trop élevé, "même pour un politicien qui a demontré avoir plus de vies qu'un chat". Alfredo Pérez Rubalcaba est désormais "le seul filet de sauvetage des socialistes" face à l'opposition conservatrice, conclut le journal.
Après Mladić, une chance à saisir
La Serbie a ainsi tourné une page importante de son histoire en se dégageant – bien que lentement – de son passé guerrier. Un passé qui n’a plus d’héritiers politiques légaux, mais qui a fait de nombreuses victimes et engendré bon nombre de bourreaux. La Serbie a aussi soldé ses comptes avec la justice internationale.
Tandis que ce feuilleton macabre arrive à son terme, de nombreuses questions restent sans réponse. Pourquoi toute cette histoire a-t-elle duré si longtemps ? Pourquoi Mladić n’est-il pas depuis plusieurs années déjà à La Haye ? Pourquoi les gouvernements précédents n’ont-ils pu l’arrêter, pourquoi la “traque”, si tant est qu’il y en ait eu une, avait-elle toujours deux ou trois jours de retard par rapport au fugitif ? Qui, au sommet de l’Etat, notamment dans l’armée, aidait Mladic pendant toutes ces années ? Les responsables seront-ils poursuivis ? Les institutions de l’Etat, certaines, du moins, savaient-elles où se cachait Mladic et ne se livraient-elles pas à des calculs et à des marchandages inavouables ?
On peut se demander aussi si, pendant le mandat des gouvernements précédents, surtout celui de Vojislav Kostunica, il existait une véritable volonté d’arrêter Mladić et de l’envoyer à la prison du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) de La Haye. Et si l’absence de volonté politique dans ce sens ne représentait pas une violation grave de la loi passable de poursuites judiciaires.
Mladić n'est pas le seul problème de la Serbie
Ce sont des questions légitimes et importantes, auxquelles le pouvoir actuel doit donner des réponses crédibles. Toutefois, ce qui importe aujourd’hui, c’est l’acte qui a permis de mettre fin à cette longue traque, l’acte qui donne une grande occasion à la Serbie de sortir d’un cercle vicieux. Il serait trop facile de croire que Mladić et Hadžić [le dernier fugitif, accusé lui aussi de crimes de guerre] constituent le seul et le plus grave problème de la Serbie sur le chemin qui mène aux institutions euro-atlantiques.Mais, sans la résolution de ce problème, il ne pouvait y avoir de progrès substantiel, d’autant plus que la politique du gouvernement concernant le Kosovo se trouve de nouveau dans l’impasse, et en contradiction avec sa volonté de rejoindre l’Union européenne.
Quoi qu’il en soit, la nature de l’homme fait que les erreurs du passé s’effacent des mémoires devant les réussites d’aujourd’hui. En mettant fin à la cavale de Mladić, le président Boris Tadić et sa coalition politique [conduite par le Parti démocrate] ont prouvé leur détermination à tourner la page de la manière le plus éclatante possible. Cette arrestation est un aussi un coup porté à la droite nationaliste, qui va certainement donner de la voix : quelques manifestations auront lieu.
Mais cela s’arrêtera sûrement là, car la Serbie n’a plus de forces politiques capables de rassembler des foules autour d’un “héros serbe” comme Mladić. Rappelons-nous que Karadzic a été arrêté la veille de la scission du Parti radical serbe (ultranationaliste), qui a donné naissance à une nouvelle formation nationaliste, le Parti serbe du progrès. Celui-ci flirte désormais avec des idées proeuropéennes, certes de façon contradictoire et brouillée, mais qui excluent une confrontation avec la justice internationale.
Pas de sortie du cauchemar sans solution au Kosovo
L’arrestation de Mladić va aussi renforcer la position de la Serbie dans la région, car l’incapacité du pays – ou son manque de la volonté – à respecter ses engagements à l’égard de la justice internationale était son talon d’Achille, et pour les pays voisins le prétexte idéal pour ne pas respecter les leurs.Aujourd’hui cette histoire est finie, la Serbie est presque définitivement sortie des années 1990. Je dis presque, car il ne peut y avoir de sortie définitive de ce cauchemar sans une solution durable au problème du Kosovo. S’il renonçait à faire sortir définitivement la Serbie de l’ornière, le pouvoir actuel aurait raté une occasion historique. Encore une fois, sa chance est là.
samedi 28 mai 2011
DSK : pourquoi ils n'ont rien dit
Cette censure volontaire de la presse n'est pas uniquement liée à une volonté de protéger les puissants. Elle est dictée par la nécessité de respecter la loi. L'article 9 du Code civil est souvent brandi pour empêcher la parution d'articles ou de livres dévoilant des secrets intimes: «Chacun a droit au respect de sa vie privée. Les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l'intimité de la vie privée: ces mesures peuvent, s'il y a urgence, être ordonnées en référé.» De quoi faire réfléchir plus d'un directeur de rédaction ou d'un éditeur avant de faire tourner les rotatives.
Ainsi, pour Dominique Strauss-Kahn, les rédactions n'ont-elles pas souhaité franchir le pas. Si le journaliste Jean Quatremer a publié sur son blog un article où il explique que «le seul vrai problème de Strauss-Kahn est son rapport aux femmes. Trop pressant, il frôle souvent le harcèlement», c'est parce que son journal, Libération, n'a pas voulu le faire, «au nom de la loi sur la protection de la vie privée», explique Laurent Joffrin, son directeur à l'époque. Quand Le Nouvel Observateur veut raconter en 1998 l'histoire du passage de DSK à une soirée particulière dans un club échangiste de la capitale, l'hebdomadaire prend bien soin de ne pas publier de nom. Mais procède par allusions : «Ce soir, il y a un plus: le ministre doit venir. Un vrai ministre. (...) soudain il arrive. C'est bien lui. Un léger frémissement parcourt les troupes. Deux femmes l'accompagnent, jeunes, grandes et minces. "Il fait plus gros qu'à la télé, tu trouves pas?" Son sourire est presque électoral. Il entre dans le salon, serre quelques mains, l'habitude sans doute. Une blonde d'une cinquantaine d'années le salue par son prénom. Il fait semblant de la reconnaître puis, sans plus s'attarder aux mondanités, s'engouffre dans la pièce du fond, traînant derrière lui ses deux compagnes, dont une qu'il commence à lutiner chaudement, dès le couloir. (...) "Tu crois qu'il peut vraiment devenir président?" murmure une des spectatrices à sa voisine.» Le Tout-Paris politique et médiatique comprend immédiatement. Le lecteur, c'est moins sûr.
Bien sûr, les couloirs des journaux bruissaient des rumeurs d'infidélité chronique qui couraient sur le compte de DSK. Bien sûr, les journalistes qui côtoyaient les services de police revenaient régulièrement avec des «tuyaux» un peu particuliers. DSK aurait été surpris par une patrouille en mauvaise posture un soir dans un endroit fréquenté par des prostituées. Rien d'illégal, même s'il s'agit d'un comportement peu compatible avec celui que les Français peuvent attendre d'un prétendant à l'Elysée. Mais comment vérifier une telle information? Comment être sûr qu'il ne s'agit pas d'une manipulation politique ? Officiellement, personne n'est au courant d'une telle histoire. Impossible d'avoir une confirmation de l'événement.
Jusqu'à son arrestation à New York, DSK a toujours su ou pu éviter le grand déballage. Grâce à ses communicants bien sûr, mais aussi à son réseau et ses amis. Il suffit de voir comment BHL, Jean-François Kahn et les autres se sont immédiatement mobilisés, cette semaine, pour le défendre, négligeant la victime présumée, une simple femme de ménage.
Dans leur ensemble, les médias français refusent de s'engager dans la voie des tabloïds anglo-saxons pour lesquels la vie privée peut s'afficher en une. Au fond, même les journaux people de France n'ont pas cherché à enquêter sur la vie secrète des hommes politiques en général et de DSK en particulier. Tout le monde s'en tient à la ligne rappelée la semaine dernière par Le Canard enchaîné : «DSK courait les jupons et les boîtes échangistes. La belle affaire! C'est sa vie privée et elle n'en fait pas un violeur en puissance. Pour Le Canard, l'information s'arrête toujours à la porte de la chambre à coucher.»
L'affaire Tristane Banon aurait certes dû alerter davantage. Quand ce jeune écrivain a raconté l'agression dont elle assure avoir été la victime, peu de journaux ont relayé son histoire. Elle l'a racontée dans l'émission de Thierry Ardisson sur Paris Première en présence de journalistes politiques, mais au fond, elle-même ne souhaitant pas porter plainte contre DSK, comment embrayer sur ses attaques? D'autant qu'en face, les équipes de Strauss-Kahn ont su habilement déminer l'affaire. Grâce à ses communicants, DSK réussit à passer entre les gouttes.
«On est resté sur l'idée que ce n'était pas une pathologie et que le comportement de DSK correspondait à l'image d'Epinal de l'homme politique, le séducteur», analyse un spécialiste en communication. Anne Sinclair, l'épouse de DSK, a elle-même mis fin aux débats en répondant à L'Express, qui lui demandait en 2006 si elle ne souffrait pas de la réputation de séducteur de son mari: «Non, j'en suis plutôt fière! C'est important de séduire, pour un homme politique. (...) Je suis un peu blindée sur le pouvoir de la rumeur.»
Une rumeur qui ne l'a pas épargnée. Comment celle qui a été au cœur de la vie politico-médiatique pendant plus de vingt ans pouvait-elle ignorer ce qui se disait ou s'écrivait sur DSK? En 2000 sort le livre de deux journalistes, Vincent Giret et Véronique Le Billon, Les Vies cachées de DSK. Les auteurs racontent dans un chapitre qu'«un soir de septembre 1992, Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'Industrie et du Commerce extérieur, et Martine Aubry, ministre du Travail, de l'Emploi et de la Formation professionnelle, sont les invités d'honneur d'une réception donnée par l'ambassadeur de France à Tokyo. (...) Ces deux-là s'adorent. (...) Ils distillent un même humour vachard, se relaient sans temps mort dans les karaokés de la capitale nippone jusqu'aux premières lueurs du jour et rejettent avec le même dédain l'esprit de sérieux de leurs aînés. Ils savourent la douce insouciance de ceux qui savent que l'avenir leur appartient. De cette folle équipée naît une rumeur colportée dans toutes les salles de rédaction: Martine et Dominique filent le parfait amour...»
DSK se situe dans la lignée des grands hommes politiques français qui arborent leurs conquêtes féminines comme les généraux leurs médailles. Après tout, pour ne parler que des présidents de la Ve République, Valéry Giscard d'Estaing et Jacques Chirac n'ont-ils pas aussi une réputation de grands séducteurs? Bernadette Chirac a expliqué dans son livre Conversation, paru en 2001, à propos de son mari, qu'«il avait un succès formidable. Bel homme, et puis enjôleur, très gai. Alors les filles, ça galopait (...). Mon père m'avait dit: "Vous êtes son point fixe." La suite lui a donné raison. Mon mari est toujours revenu au point fixe.»
Et François Mitterrand? L'homme qui a collectionné les conquêtes et réussi à cacher pendant des années l'existence de sa seconde famille. Cette histoire est emblématique du fonctionnement des médias. Tant que c'est l'extrême droite et sa presse, comme Minute, qui évoque ces sujets, aucune reprise n'est tolérée. Ce système a de nouveau fonctionné quand Marine Le Pen a mis en cause le comportement de Frédéric Mitterrand pendant ses voyages en Thaïlande. Au lieu de s'intéresser aux faits, la plupart des commentateurs se sont insurgés contre les attaques de l'extrême droite et ont sommé les politiques comme les médias de ne pas les suivre.
Concernant François Mitterrand, les journalistes se sont retranchés derrière ce prétexte de la vie privée pour justifier leur refus de publier des informations sur l'existence de sa fille Mazarine. Occultant totalement le fait que le Président utilisait allègrement les moyens de l'Etat, donc l'argent des contribuables, pour loger sa seconde famille. Et qu'il a été jusqu'à mettre sur écoute téléphonique des journalistes, notamment Edwy Plenel, alors au Monde, voire des artistes comme Carole Bouquet, totalement étrangère à cette histoire...
Seul moyen de contourner l'obstacle, le roman. Françoise Giroud publie en 1983 Le Bon Plaisir, où elle raconte l'histoire d'un président amené à cacher sa double vie à la presse. Toute ressemblance avec des personnages existants est-elle fortuite? La maison d'édition, Mazarine, est-elle une clé de l'énigme? Difficile d'imaginer que Françoise Giroud, très introduite dans les cercles du pouvoir, ignorait totalement la situation de Mitterrand. Sa biographe, Laure Adler, assure que ce roman n'est pas inspiré de la vie du Président mais raconte une histoire similaire vécue par un dirigeant socialiste encore en activité. Mais son nom ne sera pas dévoilé. Au nom du respect de la vie privée...
Faute de pouvoir donner les informations, on s'en remet alors aux humoristes. Des «Guignols de l'info» à Nicolas Canteloup, de Laurent Gerra à Stéphane Guillon, ceux-ci s'en donnent à cœur joie. Puisant leur inspiration au cœur même des salles de rédaction, à l'affût de tout ce que peuvent leur raconter les journalistes. Ils sont d'autant plus drôles que tout le monde devine que sous leurs exagérations perce un morceau de la vérité. Le 28 mars, Nicolas Canteloup-DSK explique qu'«au FMI, on (lui) a donné une mission en trois points: sauver le monde, aider les pays émergents et repeupler la planète en fécondant les femmes. C'est comme ça, je n'y peux rien, c'est ma mission». Eclats de rire dans le studio de la rue François-Ier. A RTL, Laurent Gerra n'est pas en reste. Le 26 avril, l'humoriste met en scène le directeur du FMI le jour de Pâques. «J'ai beau être directeur du FMI, je suis un homme comme tout le monde. Le week-end de Pâques, je m'emmerde car le FMI est fermé et les secrétaires aussi. Alors j'attends mardi, la réouverture des bureaux, car il y a des stagiaires, des interprètes à talons...» Là encore, les rires éclatent dans le studio de la rue Bayard.
Les humoristes à la place des éditorialistes? En février 2009, Stéphane Guillon n'hésitait pas à endosser ce rôle, quand il officiait sur France Inter le matin. Juste avant l'arrivée de DSK, invité de la matinale, au lendemain des révélations sur l'affaire Piroska Nagy, l'humoriste écrit un billet qui fera date: «Dans quelques minutes, Dominique Strauss-Kahn va pé-né-trer (silence) dans ce studio. Evidemment, des mesures exceptionnelles de sécurité ont été prises au sein de la rédaction. Pardon, sein est un mot que je n'ai pas le droit de prononcer aujourd'hui pour ne pas réveiller la bête. Cinq seuils d'alerte sont prévus dans cette matinale. Le dernier étant l'évacuation pure et simple du personnel féminin d'Inter vers d'autres étages...» DSK est en route vers la station quand il entend la chronique. Son premier réflexe est de faire demi-tour et d'annuler sa participation. Finalement, le directeur général du FMI se rend à la radio mais commence par cette déclaration : «J'ai assez peu apprécié les commentaires de votre humoriste. Les responsables politiques comme moi ont le droit, même le devoir, sans doute, d'être critiqués par les humoristes. Mais l'humour, c'est pas drôle quand c'est principalement de la méchanceté.»
«S'irriter d'un reproche, c'est reconnaître qu'on l'a mérité», écrit Tacite dans les Annales. Est-ce pour cette raison que la réaction de DSK est aussi virulente? En tout cas, il ne se contente pas de cette remarque et décide de ne plus répondre aux invitations de la station publique. Même quand les journalistes lui proposeront de l'inviter les jours où Stéphane Guillon n'officie pas à l'antenne. Refus catégorique. Pas question de revenir tant qu'il sera employé par la radio.
Cette stratégie du boycott est un moyen de pression relativement classique pour contraindre les médias à éviter les sujets qui fâchent. Quand L'Express a publié la lettre de Piroska Nagy, son directeur, Christophe Barbier, a dû affronter la colère des communicants de DSK. Pressions sur les actionnaires, pressions par l'intermédiaire de la publicité, toutes les armes sont utilisées par les politiques pour contraindre un média à être plus compréhensif. Le contact direct est aussi efficace. Avant d'accéder à l'Elysée, quand Nicolas Sarkozy rencontrait un jeune journaliste, il ne manquait pas de lui dire sur un ton parfaitement courtois qu'il connaissait très bien son directeur de la rédaction, voire son actionnaire. Mais il n'était pas le seul à user de cet artifice pour impressionner les journalistes.
Lors de son dernier passage à Paris, dans le but de préparer sa prochaine candidature à l'Elysée, DSK a déjeuné avec les rédactions de trois journaux: Libération, Le Nouvel Observateur et Marianne. Son objectif était clair, ainsi que Denis Jeambar l'a raconté dans Marianne la semaine dernière: DSK «dit que Mariannen'a pas d'autre choix que de le soutenir dans ce combat. Il se découvre peu soucieux à cet instant précis de l'indépendance des journaux, pas du tout menaçant, mais pressant. Il est clair que son propos est délibéré et pas du tout improvisé. (...) Si la requête est choquante, elle a le mérite d'être claire et de montrer la conception qu'a Dominique Strauss-Kahn de la presse: c'est un rapport de soumission qu'il sollicite, un engagement militant.» En fin de compte, DSK demande à ces journaux de ne pas entrer dans les polémiques que pourrait lancer la droite pendant la campagne présidentielle, même si elles pouvaient être fondées sur des vérités, au nom de leur volonté commune de se débarrasser de Nicolas Sarkozy !
Et, pour les convaincre d'adhérer à sa stratégie, DSK leur révèle, à en croire les propos off qui lui sont attribués, qu'effectivement il en a «sans doute fait un peu trop dans le passé» avec les femmes. Mais qu'au fond, ce n'est plus le sujet. Comme le confirme un dirigeant d'Euro RSCG: «Les études montraient que les Français savaient. Il n'y avait pas tromperie sur la marchandise puisqu'on n'a jamais cherché à montrer DSK comme un homme vertueux.» Les amis politiques de DSK brossaient le portrait d'un séducteur certes compulsif, mais jamais violent. L'un d'eux assurait même récemment qu'il s'était «calmé» depuis l'affaire Piroska Nagy. «La vraie question, pour un spécialiste en communication, est de savoir pourquoi personne ne lui a conseillé de se soigner si ces pulsions atteignaient de telles proportions.» «Cette page est tournée», assurait DSK. Comment, dès lors qu'il ferme lui-même la porte, entrer dans sa part d'ombre sans le froisser?
A André Rousselet, qui estimait connaître 30 % de la vie de François Mitterrand, l'ancien Président répondit: «30%, c'est beaucoup!» Pour un ami du couple, Anne Sinclair ne connaissait «que 40% de ce que faisait DSK».
Franchement, à quoi aura servi ce G 8 à Deauville, peut-être un des derniers car Barack Obama serait réticent pour organiser une prochaine rencontre aux Etats-Unis ? A un grand show politique où les puissants de ce monde s’offrent en spectacle après avoir confronté leurs positions bien connues ? L’aide au printemps arabe a-t-elle vraiment été décidée après de fébriles palabres en Normandie ?
Il s’agit pour l’essentiel de prêts multilatéraux et bilatéraux depuis longtemps négociés et auxquels s’ajoute la contribution des pays du Golfe. Pour l’après-Fukushima et la sûreté du nucléaire, que de généralités ! Et sur la Libye, rien de vraiment nouveau en exigeant le départ de Kadhafi…
L’importance très relative de ce club des puissants se mesure également au nombre des manifestants. Par exemple, au G8 - G7 de Gênes en 2001, les antimondialistes se comptaient par dizaines de milliers dans des affrontements meurtriers avec les forces de l’ordre. En 2007, pour la rencontre de Heiligendamm, l’Allemagne du nord avait été placée en état de siège. A Deauville, les policiers étaient beaucoup plus nombreux que les manifestants… Parce que le vrai gouvernement du monde, dans ses pouvoirs économiques, financiers et même politiques, se situe désormais au niveau du G 20 où siègent aussi la Chine et les « émergents ». Et la prochaine réunion de cet aréopage en novembre à Cannes ne passera pas inaperçue aux yeux des opposants au néolibéralisme régissant la planète !
Les statistiques économiques confirment aussi ce glissement. Dans les années 1980, les pays du G 7 (sans la Russie) accaparaient à peu près les deux tiers du Produit intérieur brut mondial. Aujourd’hui, beaucoup, beaucoup moins…
Certes, la « puissance » réelle ou supposée ne relève pas seulement des performances économiques. Elle repose aussi sur l’organisation des Etats, sur la démocratie et les libertés. Des valeurs que Deauville a célébrées en constatant que le printemps arabe veut les faire siennes. Le « modèle occidental », bien que cette évocation soit taboue, triompherait-il ? Curieusement en association avec la Russie, une grande démocratie comme chacun sait…
A l’heure où de nombreux théoriciens dissertent de nouveau sur le « déclin de l’Occident », ne faut-il pas voir en le G 8 un club qui se hérissonne pour défendre ses valeurs sous l’impulsion d’une avant-garde idéologique… anglo-saxonne ? Le discours de Barack Obama mercredi au Westminster Hall à Londres est significatif. Dans une véritable ode à l’Angleterre qui a donné au monde les droits de l’homme, la démocratie et la libre entreprise, il a célébré le modèle anglo-saxon en décrivant un axe Washington-Londres « indispensable à ce moment de l’Histoire », le Royaume-Uni étant « le plus important et le plus fidèle allié des Etats-Unis »…
Pour Obama, avec une exception polie pour la France (« notre plus ancien allié »…), l’Europe continentale et institutionnelle passe visiblement au second plan politique derrière ce leadership anglo-saxon. Il est vrai qu’à Deauville, l’Europe a une fois de plus étalé ses divisions en la personne de la chancelière Merkel opposée à l’intervention en Libye et faisant cavalier seul dans la question nucléaire.
Bref, l’UE reste un conglomérat flou autorisant même un comble de la part du président des Etats-Unis, le pays le plus endetté de la planète : Français, Allemands et Italiens ont surtout été priés de régler le problème de la dette grecque pour éviter une nouvelle tourmente monétaire sous le signe de l’euro…
Recherche en Grèce d'un consensus politique sur la rigueur
Le Premier ministre grec, George Papandréou, a réuni vendredi les représentants des partis politiques pour tenter de dégager un consensus sur les mesures d'austérité nécessaires pour sortir le pays de la crise.
Ce consensus est jugé indispensable avant le déblocage d'une nouvelle tranche de l'aide allouée par l'Union européenne et le Fonds monétaire international (FMI), soit 12 milliards d'euros.
L'opposition s'est pour l'heure déclarée hostile aux mesures proposées par le gouvernement pour sortir de la crise résultant d'un endettement massif. Après les avoir rencontrés un par un, le Premier ministre a demandé au président Karolos Papoulias de convoquer les chefs de file de tous les partis.
Le conservateur Antonis Samaras, dirigeant de la Nouvelle démocratie, qui a voté contre le plan sauvetage adopté l'an dernier, a déjà fait savoir qu'il continuerait à s'opposer au plan d'austérité.
Ses homologues de la Coalition de gauche et du Parti communiste, qui n'hésitent pas à boycotter ce genre de rencontres, ont également accepté l'invitation du Premier ministre, tout comme le dirigeant du LAOS, formation d'extrême gauche.
Selon le quotidien Kathimerini, le Premier ministre envisage de remanier son équipe et pourrait inviter des personnalités de l'opposition à y siéger moyennant leur soutien au plan d'austérité.
Le gouvernement a démenti mercredi avoir l'intention de procéder à un référendum sur les nouvelles mesures d'austérité ou sur l'euro.
Les syndicats du personnel des entreprises publiques menacées de privatisation ont par ailleurs annoncé une grève de 24 heures le 15 juin.
Athènes a annoncé lundi une série de nouvelles mesures budgétaires visant à économiser plus de cinq milliards d'euros et à ramener le déficit public à 7,5% du produit intérieur brut (PIB) en 2011.
Les marchés financiers continuent toutefois à douter de la crédibilité du plan d'assainissement d'Athènes. Ceci alimente les spéculations sur la possibilité d'un nouveau plan d'aide et d'une restructuration de la dette publique qui pourrait forcer les prêteurs à renoncer à une partie de leurs créances.
Le FMI pourrait décider de ne pas verser sa contribution à la prochaine tranche d'aide que doit recevoir la Grèce s'il n'a pas l'assurance que les pays européens tiendront leurs engagements sur les douze prochains mois, a averti jeudi Jean-Claude Juncker, président de l'Eurogroupe. (