TOUT EST DIT

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vendredi 9 avril 2010

Retraites: ce que la droite pense d'une taxe sur les riches

Nicolas Sarkozy envisage un prélèvement qui ciblerait les plus aisés pour financer les retraites, afin que la réforme annoncée soit plus "juste". L'Expansion.com a demandé à des députés de la majorité leur avis sur ce nouveau prélèvement. Voici ce qu'ils en pensent.
Nicolas Sarkozy n'a de cesse de le répéter : il n'a pas été élu pour augmenter les impôts des Français. Pourtant, jeudi, une source proche de la présidence a innocemment glissé aux journalistes accompagnant le chef de l'Etat en Haute-Savoie qu'un "prélèvement spécifique sur une catégorie de population" était envisagé pour les retraites, afin que cette réforme tant annoncée - la dernière grande réforme de l'ère I du sarkozysme - "soit perçue comme absolument juste".

Cette déclaration n'est pas neutre, alors que s'ouvre lundi la concertation avec les syndicats qui reprochent au gouvernement de ne demander des efforts qu'aux salariés. Elle tombe également en pleine polémique, dans le camp même de la majorité, sur le bouclier fiscal. En parlant de "justice", l'Elysée laisse en effet entendre que ce sont les ménages les plus riches qui seraient visés par ce "prélèvement", dont on ne connaît aucun détail. La presse évoque une possible taxe sur le patrimoine ou une contribution additionnelle à l'impôt sur le revenu, hors bouclier fiscal.

Comme de coutume en Sarkozie, une "fuite" est généralement organisée pour prendre le pouls de l'opinion et des politiques. L'Expansion.com a donc demandé leur avis à des députés de la majorité. Voici ce qu'ils pensent de ce nouveau prélèvement :

Lionnel Luca : "Je préfèrerais qu'on taxe les flux fianciers"

"Je me méfie quand on parle de catégorie de population. Je préfèrerais plutôt qu'on s'intéresse aux flux financiers, comme les bonus, les plus-values, les revenus boursiers qui dépassent un certain plafond ou les stocks options. On ne peut pas demander un effort à toute la Nation sur les retraites et conserver les privilèges d'un petit nombre. Le bouclier fiscal est une stupidité. En retirer la CSG et la CRDS est un minimum. Il ne s'agit pas de faire de la démagogie d'extrême gauche mais la réforme des retraites doit concerner tout le monde. Sur le principe, il ne faut rien s'interdire. Je me réjouis que la grogne des députés de la majorité sur l'injustice du bouclier fiscal ait été entendue."
François Goulard : "C'est du bricolage"

"Le dispositif envisagé sera certainement une hausse globale de la CSG et de la CRDS. Mais pour que les gens n'hurlent pas que tout le monde paie sauf les riches, Ces contributions seront exclues du bouclier fiscal. C'est probablement un signe pour les opposants à l'allongement de la durée de cotisation, à savoir les syndicats et l'opposition. Il s'agit également de couper court aux propositions de soumettre les revenus financiers aux cotisations pour les retraites. Pour ma part, je considère que cette mesure ne s'impose pas, car elle pénalisera également les retraités. C'est du bricolage, une solution partielle qui ne règlera pas le problème du financement du régime des retraites. Les paramètres sur lesquels le débat doit porter sont le montant des pensions, la durée de cotisation et le montant des cotisations."
Charles de Courson : "Il est regrettable d'aborder la réforme des retraites par le volet recettes"

"A quoi ressemblera ce prélèvement? On peut imaginer d'augmenter la CSG uniquement sur les revenus du patrimoine, mais ceux-ci sont fluctuants. On peut toujours créer une nouvelle tranche vers le haut de l'impôt sur le revenu. Néanmoins, je trouve regrettable qu'on aborde le débat de la réforme des retraites sur le côté recettes, alors qu'il faut d'abord s'attaquer aux dépenses, c'est-à-dire aux prestations. Le Nouveau Centre souhaite une réforme globale du système des retraites, conduisant à un régime général unique pour le privé et le public, avec l'extinction progressive des régimes spéciaux, et le passage à un système à points."
Hervé Mariton : "La fiscalisation des hauts revenus et les retraites sont deux sujets distincts"

"La fiscalisation des très hauts revenus est un vrai sujet. Et je suis un partisan de l'universalité budgétaire. Mais il ne faut pas lier ce sujet au dossier des retraites. Si on commence à déplacer le curseur sur les cotisations, on perd du crédit sur les curseurs de l'âge de départ et de la durée de cotisation. Ce serait hasardeux. Il faut axer les pistes de réflexion de la réforme des retraites sur l'âge légal, l'âge pivot et le nombre d'années de cotisation."

RÉACTION - Guéant : la disgrâce de Dati "sans rapport avec les rumeurs"

Claude Guéant, secrétaire général de l'Élysée, a affirmé mercredi que s'il avait bien dit mardi au Canard enchaîné que Nicolas Sarkozy ne voulait plus voir Rachida Dati, "la vérité d'hier n'est peut-être pas celle d'aujourd'hui". "J'ai dit hier (mardi) à un journaliste du Canard enchaîné que le président ne souhaitait plus, actuellement, voir Rachida Dati", l'ancienne ministre de la Justice, aujourd'hui députée européenne et maire UMP du 7e arrondissement de Paris, a affirmé Claude Guéant à l'Agence France-Presse. Mais "c'était hier. La vérité d'hier n'est peut-être pas la vérité d'aujourd'hui", a-t-il ajouté. Le principal collaborateur du chef de l'État à l'Élysée a, en outre, assuré que cela était "sans aucun rapport avec les rumeurs" concernant le couple présidentiel.

Alors qu'on lui demandait si le président Sarkozy allait recevoir son ancienne ministre, Claude Guéant a répondu : "Je ne sais pas". Selon Le Journal du Dimanche (JDD), Rachida Dati est soupçonnée par l'Élysée d'avoir participé à la diffusion de ces rumeurs, rendues publiques en France par un blog hébergé sur le site Internet du JDD . L'Élysée a engagé une contre-offensive dans cette affaire, en évoquant, par la voix de proches de Nicolas Sarkozy, l'hypothèse d'un "complot". L'ex-garde des Sceaux a dénoncé mercredi sur RTL ceux qui l'accusent d'être à l'origine des rumeurs, assurant qu'elle n'avait "peur de rien" et qu'il fallait "que cela cesse" . "Je trouve ça extrêmement scandaleux", a affirmé Rachida Dati, en ajoutant qu'elle espérait voir "très bientôt le chef de l'État".

La politique à la niche


Etrange communication... Voilà qu' "en marge" du déplacement de Nicolas Sarkozy qui s'est recueilli "le visage grave" à la nécropole de Morette sur le plateau des Glières, on apprenait hier "de source élyséenne", c'est-à-dire d'un proche du président, qu'il envisageait de demander "un effort" aux bénéficiaires du bouclier fiscal à l'occasion de la réforme des retraites. Un peu plus tard résonnait comme en écho depuis l'hémicycle du Sénat, une déclaration de François Fillon assurant que le gouvernement allait proposer la suppression, ou le plafonnement de niches fiscales et sociales. Un peu comme si le pouvoir, pressé de toutes parts de fissurer, voire de détruire l'impopulaire bouclier fiscal, s'apprêtait à le faire mais sans en avoir l'air. Le président ayant affirmé ne pas vouloir y toucher pour des raisons de compétitivité de la France et de fidélité à ses engagements, il espère opérer une volte-face en taxant les plus riches pour satisfaire les mécontents tout en montrant aux défenseurs du bouclier qu'il a tenu bon pour le sauver. De la haute voltige qui fait penser à celle de Carla jurant qu'il n'y avait pas eu d'enquête sur le couple présidentiel avant d'être démentie par le directeur du renseignement intérieur... Affaire de calendrier et de vocabulaire sans doute. En tout cas le quinquennat ne sera plus marqué du sceau de l'injustice comme on l'en accusait, foi du chef de l'Etat ! Les "gros" contribuables passeront bien à la caisse. Les moins nantis peut-être aussi qui bénéficient des niches sociales citées par le Premier ministre. Certaines, telle la PPE, sont très dispendieuses pour notre grand argentier. L'exécutif serait inspiré de remettre tous les impôts à plat plutôt que de se contorsionner et laisser sa politique fiscale se nicher dans les détails.


Hélène Pilichowski

Seine-Saint-Denis: le conseil général vote un budget en déséquilibre, ce qu'interdit la loi

Le conseil général de Seine-Saint-Denis, présidé par le socialiste Claude Bartolone, a voté jeudi à Bobigny un budget en déséquilibre, ce qu'interdit la loi, pour protester contre l'attitude de l'Etat vis-à-vis de son obligation de compensation intégrale de certaines charges.

M. Bartolone a aussitôt reçu le soutien de l'ensemble des présidents de gauche de conseils généraux. "Les départements ne mourront pas en silence", ont-ils affirmé dans un communiqué.

Le budget a été approuvé par 17 conseillers sur 40. Les dix conseillers de droite (UMP-Nouveau centre-DVD) ont voté contre. Le groupe communiste et citoyen s'est abstenu, à l'exception de Jean-Jacques Karman (PCF) qui a voté contre.

Claude Bartolone estime que, depuis 2004, l'Etat doit au département 640 millions d'euros au titre des transferts de charges non compensées.

Ce "budget de révolte" inscrit en recettes la somme de 75 millions d'euros pour l'année 2010 que le président du conseil général estime due par l'Etat au département, notamment au titre de la taxe professionnelle, du ticket modérateur et du RSA.

Il sera examiné par le nouveau préfet de la Seine-Saint-Denis, Christian Lambert, puis par la chambre régionale des comptes.

En votant ce budget en déséquilibre, le conseil général risque de voir le département placé sous tutelle préfectorale, éventualité à laquelle Claude Bartolone "ne croit pas un seul instant", comme il l'a dit à la presse.

Alors qu'une dizaine de conseillers généraux du groupe communiste et citoyen arboraient des T-shirts blancs proclamant "Sarkozy étrangle la Seine-Saint-Denis", Claude Bartolone a dénoncé une "stratégie implacable de mise à mort des collectivités et des élus locaux".

Il a néanmoins défendu "un budget sérieux", qui inclut "35 millions d'économies sur un budget de fonctionnement de 1.579,72 millions d'euros et 90 millions d'euros d'économies sur un budget en investissement de 239,31 millions d'euros.

Le président du groupe UMP-NC, Ludovic Toro, a accusé Claude Bartolone de "prendre en otage, à des fins politiques, les finances départementales et donc l'avenir des Séquano-dyonisiens" et demandé sa démission.

Le budget a été voté après plusieurs semaines de fronde en Seine-Saint-Denis.

Fin mars, M. Bartolone avait annoncé le dépôt d'un recours auprès du conseil d'Etat sur le financement de la Maison départementale des personnes handicapées. "Ce poids financier, je n'accepte plus que le département l'assume à la place de l'Etat", avait-il écrit alors, ajoutant qu'il s'agissait du "plus pauvre" département de France.

Fin décembre, le conseil général et celui de Saône-et-Loire avaient obtenu gain de cause auprès du conseil d'Etat après le dépôt d'un recours sur une loi sur la petite enfance. Le conseil d'Etat avait enjoint le gouvernement à compenser les charges imposées aux départements par cette loi.

Les difficultés financières du conseil général suscitent de nombreuses inquiétudes dans le département, notamment dans les milieux associatifs et culturels.

"Stop à la catastrophe culturelle", pouvait-on lire sur l'une des banderoles tenues par l'une des dizaines de personnes qui assistaient debout, faute de place, à la réunion du conseil général jeudi.

Etaient présents dans le public des parents d'élèves, des professeurs ainsi que des défenseurs du Salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil. Claude Bartolone leur a annoncé le maintien de la subvention départementale (1,6 M d'euros) pour la manifestation.

Par Pauline FROISSART

PURE PROVOCATION D'UN POLITIQUE QUI VEUT SE BIEN FAIRE VOIR PAR SA DIRECTION, SACHANT QU'IL DEVRA EN PRÉSENTER UN AUTRE DANS UN MOIS AVANT QUE L'ÉTAT NE METTE SA RÉGION SOUS TUTELLE.

Les infirmières ont-elles un métier si pénible?

Le métier d'infirmière n'est pas pénible puisqu'elles ne sont pas plus invalides et qu'elles ne meurent pas plus tôt que la moyenne des femmes... C'est ce qu'affirme Roselyne Bachelot. Un point de vue que ne partagent pas les personnes concernées. Les témoignages de nos internautes.

Les députés de la majorité ont adopté jeudi 8 avril l'échange proposé par le gouvernement : accorder aux infirmières du public des salaires plus élevés contre une retraite plus tardive. Les personnels infirmiers et paramédicaux devront donc choisir, à partir de juin, entre une meilleure rémunération mais un départ à la retraite à 60 ans, ou le maintien de leur droit à la retraite à partir de 55 ans mais mais une revalorisation salariale beaucoup plus faible. S'ils optent pour la première solution, ils perdent de facto la bonification - un an de cotisation pour dix ans travaillés - qui leur avait été accordée en 2003 par la loi Fillon sur les retraites, comme reconnaissance de la pénibilité de la profession.

Il y a la polémique des chiffres...

Il faut dire que Roselyne Bachelot a balayé d'un revers de chiffres la question de la pénibilité du métier d'infirmière. Selon la ministre de la Santé, l'espérance de vie des infirmières à 55 ans est dans la moyenne des femmes françaises et le taux de celles qui partent à la retraite avec une invalidité n'est "que" de 4,7%, contre 6,7% dans la totalité de la fonction publique hospitalière. "Ce sont les chiffres de la vérité", assure-t-elle, alors que les syndicats prétendent qu'une infirmière retraitée sur quatre est en invalidité.

Les chiffres cités par Roselyne Bachelot, publiés dans une annexe au projet de loi en ligne sur le site de l'Assemblée nationale, font référence au pourcentage d'infirmières qui sont mises à la retraite pour invalidité totale. Les syndicats évoquent quant à eux le pourcentage d'infirmières qui partent à la retraite avec une invalidité partielle reconnue.

Ainsi, selon les statistiques de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), "la concession d'une rente d'invalidité concerne 9,8% des nouvelles pensions hospitalières accordées en 2008". Par ailleurs, toujours selon la CNRACL, l'âge moyen des femmes hospitalières retraitées décédées en 2008 est de 78,8 ans, soit environ 22 ans après leur départ à la retraite. Leur espérance de vie n'est donc pas de 31,6 ans comme l'a affirmé la ministre de la Santé.
... et la réalité du terrain

"Comme beaucoup d'infirmières, je suis choquée par les propos de notre ministre de tutelle qui témoignent d'une totale méconnaissance et d'un mépris de notre profession", déplore Nathalie Depoire, présidente de la Coordination Nationale Infirmière (CNI). "Si François Fillon a accordé la bonification aux infirmières en 1993, c'est que le métier remplit plus de la moitié des critères de pénibilité", rappelle de son côté Philippe Crepel, responsable de la CGT Santé, qui cite notamment le travail de nuit, les horaires en 3/8, le stress, le contact avec des produits toxiques et des malades et le port de charges lourdes. "Notre ministre oublie de dire qu'une infirmière sur deux dans l'hôpital public arrête d'exercer au bout de cinq ans en raison des conditions de travail", note Thierry Amouroux, président du SNPI.

Selon une enquête réalisée en 2008 par la Caisse Autonome de Retraite et de Prévoyance des Infirmiers, 51% des infirmiers jugent leur métier très difficile physiquement - ils portent en moyenne 9 charges de patients dépendants par jour -, 32% très difficile psychologiquement. Certes, l'étude porte sur le secteur libéral, mais le métier n'est sûrement plus aisé dans l'hôpital public. Comme en témoignent de nombreux internautes de L'Expansion.com, qui ne sont pas, mais alors pas du tout d'accord avec Roselyne Bachelot.

Ainsi Brijou34 témoigne : "53 ans et infirmière crevée, 32 ans d'exercice la nuit, et à temps plein sur des équipes de 12 heures. Je ne me sens pas d'aller à 60 ans comme soignant, ce sera peut être comme patient. J'invite la grande bouche de Roselyne qui "pense" derrière un bureau à tenir mon rythme de femme, de mère et d'infirmière une semaine et je suis sure qu'elle reverra sa copie". Un autre internaute, Nîme85, prend quant à lui la parole pour son épouse : "10 ans de 3/8 en réa et 20 ans de nuit en ortho par 10h de suite et des séries pouvant aller jusqu'à 4 jours de suite et certaine fois elle rentre avec son panier repas même pas ouvert!" Benamé, elle, choisit plutôt l'ironie : "Je peux dire qu'en temps qu'ancienne infirmière, j'ai trouvé mon métier pénible et difficile. J'ai eu la chance de partir en retraite à 55 ans, claquée et exténuée. Si j'avais 20 ans le job que je choisirai est sans nul doute celui de ministre de la Santé".

La conscience noire de l'État


C'est triste et c'est brutal. Comme une deuxième tempête. Une vague administrative irrésistible qui voudrait faire disparaître - vite, vite - un désastre que les autorités publiques auraient pu éviter. Il faut vraiment que l'État se sente coupable de la catastrophe causée par Xynthia pour réagir si rapidement : d'ordinaire, il est si rarement véloce... Voudrait-il faire oublier ses responsabilités en donnant l'impression de dominer - enfin - la situation ?
Rendre inconstructibles les 1 400 parcelles exposées aux colères mortelles de l'océan, c'est une décision sage, pourtant. La seule option raisonnable, sans doute. Mais pourquoi a-t-il fallu un drame pour qu'on se résigne à faire le choix impératif de la sécurité ? Pourquoi faut-il que les propriétaires de plus de 1 300 maisons promises à la démolition paient le prix d'une incroyable inconséquence généralisée ? Pourquoi a-t-on obstinément refusé de voir pendant des années ce qui apparaît aujourd'hui comme une évidence ? Une précaution de bon sens ?
L'État ouvre le parapluie pour se protéger des retombées d'une affaire qui met en cause toutes les strates administratives locales, départementales et nationales. De la mairie à la préfecture, il ne s'est trouvé donc personne pour barrer la route à des projets immobiliers qui défiaient la puissance de destruction de la mer ? Pas un contrôle, pas un texte, pas un élu, pas un agent de l'État pour arrêter ces folies ?
Le préfet de Vendée a estimé hier, lors de la réunion d'information aux habitants, que ce n'était « pas le lieu de rechercher les responsabilités ». Il le faudra pourtant si on veut permettre aux victimes d'oublier la double violence qui les submerge. Comment pourront-elles reconstruire et se reconstruire sur un déni aussi scandaleux ? Quand le maire de La Faute conteste les destructions en invoquant le manque à gagner pour sa commune, on peut le comprendre, mais la forme de son indignation a quelque chose de terrifiant. L'argent et la pression immobilière jouent si souvent de l'angoisse de communes engagées dans des opérations survie qu'il n'est même pas certain que les 53 morts de Xynthia permettront de tirer les leçons de cette tragédie...
Les assurances vont payer - 1,5 milliard d'euros - et elles vont le faire rapidement. Tant mieux pour tous ceux - et ils sont nombreux - qui veulent tourner la page sinistre d'une affreuse nuit d'hiver. La détresse, ou la colère, des autres rappellent, de leur côté, la violence du spectacle de démolition annoncé. L'émotion de l'opinion, et la volonté de rédemption, auraient-elle stimulé des ardeurs destructrices ?
Les bulldozers ne vont pas arriver tout de suite, rassurent les autorités, qui affirment vouloir laisser du temps au temps pour accepter l'inéluctable. Ils seront la conscience noire de l'État en action.



Olivier Picard

Des huissiers à la SNCF

Pour la première fois, la direction de l'entreprise fait appel à des huissiers pour éviter les polémiques avec les syndicats sur le comptage des grévistes.

A la SNCF, on ne plaisante pas avec les chiffres. Surtout pas avec ceux des grévistes ! Pour la première fois lors du conflit social entamé mardi à l'appel de la CGT-cheminots et de SUD-Rail, la direction de l'entreprise de transports a décidé d'appeler à la rescousse... des huissiers pour s'assurer de la validité du décompte. Car à chaque grève, c'est la même histoire : munis de leurs calculatrices, syndicats et direction n'arrivent jamais au même résultat. Et la polémique enfle : qui manipule les chiffres ?

Depuis mardi, une cinquantaine d'huissiers (environ 2 par régions) sont donc à l'oeuvre à la SNCF «pour qu'il n'y ait aucune contestation possible» sur le taux réel de participation à la grève, a fait valoir le directeur des ressources humaines, François Nogué. Lors du point presse organisé mercredi par la direction de l'entreprise, les journalistes ont même eu droit à un petit film montrant ces braves huissiers au travail. Des méthodes qui ne sont évidement pas du goût des syndicats. «C'est un signal négatif qui ne peut que radicaliser les positions», a ainsi jugé Didier Le Reste, secrétaire général de la CGT-cheminots.

Auparavant, la direction de la SNCF avait aussi commandé un audit au cabinet de conseil Algoé afin d' « évaluer le dispositif de comptage et de suivi des jours de grève ». « La CGT et SUD-Rail n'ont pas souhaité rencontrer [les consultants] d'Algoé », a précisé le DRH. Le rapport du cabinet fait état de la « solidité », de la « fiabilité » et de la « sincérité » du dispositif.

En attendant, audit ou pas, huissiers ou pas, la grève continue à la SNCF, même si le trafic des trains était légèrement meilleur jeudi que mercredi.

La triple peine des sinistrés


On devrait tous se sentir, ce matin, Vendéens et Charentais de coeur, frères et soeurs de sinistrés. Certains ont reçu, hier, un second coup de massue, attendu certes, prévisible sans doute, inéluctable peut-être, en tout cas jamais asséné en France avec une telle rapidité et ampleur. Ce sont donc 1 395 maisons qui vont être rasées dans les zones à risque maximum d'inondation. Les zones noires. Un trait de crayon, quelques mètres d'écart, une hauteur d'eau un peu plus forte, ici, la nuit fatidique du drame, et votre patrimoine, chichement constitué parfois, âprement préparé en vue d'une retraite radieuse en bord de mer, est une deuxième fois englouti.

C'est une seconde peine infligée aux plus fragiles des sinistrés. Triple peine en réalité, car l'avenir reste, quoi qu'on en dise, angoissant. D'où un légitime sentiment de colère parfois, d'incompréhension souvent. Quand toucheront-ils leurs indemnités ? Où pourront-ils reconstruire ? L'État et les assureurs promettent d'agir sans délai, d'indemniser sans chipoter. Mais parle-t-on en semaines, en mois, en trimestres ?

Le gouvernement aurait-il dû, dans ces conditions, prolonger la concertation avant toute annonce ? L'équité n'exigeait-elle pas de donner du temps au temps ? En tranchant le débat, en appliquant dans toute sa rigueur le principe de précaution, l'État a voulu se projeter, sans tarder, dans l'avenir. Ces terres urbanisées souvent à la va-vite, conquises sur la mer à l'abri de digues éphémères, objet de convoitises spéculatives, risquaient à nouveau de dramatiques inondations dans dix, vingt, cent ans. Ou un jour prochain. Prolonger la réflexion, hésiter, c'était aussi maintenir les habitants dans la pire des incertitudes.

Cette décision lourde, massive, sans équivalent dans le passé, souhaitée par le président de la République, marque, d'évidence, un changement de méthode dans la prévention des risques en France. En bon pays latin, un brin fataliste et oublieux des leçons du passé, on se pensait à l'abri des grands sursauts de la nature. On s'est beaucoup moqué, jadis, de ce pauvre Mac Mahon, contemplant, en 1875, les crues de la Garonne, et qui se serait exclamé : « Que d'eau, que d'eau ! » avant de tourner les talons.

Face aux risques, on a souvent tourné les talons. Fermé les yeux. Certes, depuis une dizaine d'années, consigne est à la mise en oeuvre de plans de prévention. Mais que d'atermoiements et de délais interminables. Ce fut le cas en Vendée. Trop d'intérêts en jeu. Trop de résistances. Trop de procédures. Trop d'indifférence de la part des habitants eux-mêmes, il est vrai souvent très mal informés des vrais risques.

Ces événements de Vendée et de Charente-Maritime marquent, en fait, la fin de l'inconscience. La fin de ce laxisme qui favorise l'anarchie immobilière en bord de mer. On ne tranchera pas ici le débat entre les tenants du réchauffement climatique et leurs adversaires « climato-sceptiques ». Mais les comptes sont faits. Les catastrophes naturelles ne relèvent plus de l'exceptionnel en France. Elles ont coûté 30 milliards d'indemnisations en vingt ans ! Ce chiffre devrait doubler dans les vingt ans à venir. De quoi plomber un peu plus les comptes de la nation et creuser la dette publique. L'indifférence aux risques naturels n'est donc plus de mise. Le laisser-faire serait criminel.


Bernard Le Solleu