vendredi 3 octobre 2014
CORRUPTION, CLIENTÉLISME ET CENSURE DANS LE PAYSAGE MÉDIATIQUE GREC
Cet article est le premier d'une chronique sur la longue histoire de la corruption, du non-droit et de la censure dans le paysage des médias et de la presse en Grèce. Une situation qui a empiré dans les dernières années dans le contexte de la dure crise économique qui touche le pays, mais qui a une histoire profondément enracinée dans le paysage politique grec.
Cet article a été initialement publié en anglais sur Truthout
Il y a un an, la Grèce fut, une nouvelle fois, poussée sous les feux de l'information internationale. Le 11 juin 2013 le gouvernement grec, soudainement et par surprise, ferma l'ERT, l'office public de diffusion audiovisuelle du pays. Ce soir-là les fréquences utilisées par l'ERT devinrent muettes, mettant un terme à une institution qui existait sans interruption depuis 1938. Cette fermeture d'un média audiovisuel public, sans précédent, a suscité de nombreux gros titres à l'international, et durant plusieurs semaines de l'été 2013, de nombreux journalistes et correspondants de presse l'ont rapportée comme étant l'exemple le plus récent et le plus flagrant de la limitation de la liberté d'expression et de la liberté de la presse dans la Grèce en pleine crise.
Ce que ne disait pas, cependant, la plupart des journalistes, Grecs ou étrangers, qui relataient la fermeture de l'ERT, était le fait qu'il y avait eu des précédents en Grèce. Ce n'était que le dernier exemple, dans la longue histoire de l'interventionnisme gouvernemental et de la censure des médias, qui couvre des décennies et qui comprend plusieurs autres cas où le gouvernement en place a exercé force et contrainte sur les médias.
Cette série d'articles relatera la longue histoire de la corruption du gouvernement, de la censure et de l'injustice envers la presse et l'audiovisuel en Grèce, la manière flagrante dont le gouvernement et les nababs des médias se moquent actuellement des lois encadrant la presse et les médias, ainsi que la pente dangereuse qui mène de la liberté d'expression à la censure. Dans ce contexte, la fermeture de l'ERT l'été dernier n'est qu'un des éléments dans un ensemble plus large de corruption, de jeux d'influences entre le pouvoir et les patrons des médias, et de l'accroissement du nombre des lois contraignantes, marque de fabrique de l'asservissement du système médiatique grec depuis des décennies.
Avant même l'arrivée des radios et télévisions privées en Grèce en 1987, le pays offrait un large éventail de journaux et périodiques. Mais alors que beaucoup de ces publications circulaient, peu d'entre elles étaient considérées comme étant objectives et indépendantes. Evidemment beaucoup étaient vues comme des moyens destinés à exercer des pressions sur le pouvoir en place. Peu de ces journaux furent jamais rentables, mais dans la plupart des cas, le profit n'était pas l'objectif premier de leurs patrons. Ces journaux suivaient plutôt des buts politiques spécifiques, au service de partis ou d'hommes politiques tout en servant d'outils à la promotion d'autres intérêts financiers de leurs propriétaires, en vue de l'obtention de contrats ou de privilèges. Il a souvent été dit que nombre de grands patrons d'entreprises, dans leurs négociations avec les politiciens, les menaçaient de lancer un journal s'ils n'obtenaient pas un contrat ou une faveur. De nombreux spécialistes des médias et de la presse ont décrit les pratiques dominantes dans les médias comme clientélistes et instrumentalistes, avec des relations entre la presse et le pouvoir fondées sur l'optimisation politique et le profit économique plutôt que sur le marché de l'information et l'intérêt du public.
Un exemple est le journal "Avriani", qui est apparu sur le devant de la scène à la fin des années 1970 après la victoire électorale du PASOK et d'Andreas Papandreou. Avriani a fortement soutenu Papandreou et s'est retrouvé en tête des chiffres de diffusion dans le pays, avec un journalisme très partisan et souvent complaisant qui fut appelé "avrianisme" et qui n'hésitait pas à calomnier les concurrents de Papandreou, à l'intérieur comme à l'extérieur du PASOK, ainsi que d'autres personnalités dont les choix politiques heurtaient ceux du PASOK. Dans les faits, Avriani agissait comme un organe du PASOK et de Papandreou en particulier et on le retrouvait dans les bureaux de l'administration et des ministères. Le journal avait été fondé par Giogos Kouris, dont la famille deviendrait, au cours des années suivantes, un acteur de premier plan du secteur des médias grecs ainsi que de l'arène politique. Et bien sûr, le frère de Kouris, Makis Kouris, fut élu député du PASOK au parlement à la fin des années 1980.
Alors que la censure officielle de la presse a existé à plusieurs moments de l'histoire de la Grèce moderne, dont l'époque de la dictature militaire de 1967 à 1974, des formes plus subtiles de censure et d'auto-censure ont toujours caractérisé la presse grecque. Et la télédiffusion radio et TV n'a pas été épargnée. L'EIR (Office National de radio) reflétait les intérêts politiques du gouvernement en place et cela fut accentué lors de la dictature de la junte. En 1970, trois ans après la prise du pouvoir par la junte militaire, EIR fut rebaptisé EIRT, pour inclure l'ajout de la télévision, pendant qu'un réseau des forces armées, YENED, était également lancé. Evidemment, YENED, avec son orientation militariste, resta diffusée après la chute de la dictature en 1974, conservant son nom jusqu'en 1982 lorsque fut formellement créée l'entité nommée ERT .
Pendant cette période, comme dans d'autre pays européens, la télédiffusion resta un monopole d'état, sans opérateur privé autorisé. Et quel que soit le gouvernement en place, la télédiffusion d'état était considérée comme un outil de propagande gouvernementale plutôt que comme une entité d'intérêt public. Bien sûr, cette structure était reconnue par la Constitution nationale qui fut ratifiée après la chute de la junte. L'article 15 de la Constitution plaçait la télédiffusion sous le contrôle direct de l'état et ce n'est qu'en 1987, par décision du Conseil d'Etat, la plus haute juridiction administrative, que cette clause fut abolie pour permettre une télédiffusion privée sous la "supervision de l'état" .
Ce fut en 1987 que le monopole d'état de la télédiffusion fut abrogé. Sans surprise, cependant, ce ne fut pas pour permettre la pluralité ou même la dérégulation du marché, mais dans des buts politiques. Les premiers télédiffuseurs "privés" furent les stations municipales de radio qui furent créées dans plusieurs villes grecques importantes et dont la première fut Radio Halkida à Halkida, suivie par d'autres à Athènes (Athènes 9.84), Thessalonique (FM 100), Piracus (Canal 1) et ailleurs, dans la même année. Les maires de ces cités avaient tous été élus avec le soutien du parti "Nouvelle Démocratie" , au cours de l'année d'élections municipales, et ces chaînes de radio avaient été lancées pour être des contrepoids à l'ERT et au gouvernement national où le PASOK était toujours au pouvoir.
Même auparavant, les nombreuses radios pirates qui avaient émergé tout au long des années 1980 , avec des stations très politisées comme Kanali 15 et Tyflopontikas FM, représentaient souvent des intérêts politiques, et beaucoup de ces radios furent brutalement réduites au silence par la police grecque et le Ministère des Communications, avec de temps à autre, les assauts de la force publique retransmis en direct sur les ondes.
A la suite de la décision du Conseil d'Etat de 1987, le Parlement grec vota la loi 1790/1987, suivie par le décret présidentiel 25/1988 qui établirent le droit d'autorisation de stations de radio privées au niveau local. Un petit nombre de licences fut émis mais il devint vite apparent qu'il n'existait pas de cadre dans lequel la loi pouvait être mise en oeuvre et les licences exercées. Au cours de la période couvrant la fin des années 1980 jusqu'au début des années 1990, les stations de radio privées commencèrent à proliférer, opérant souvent sans licence ou avec de pseudo-licences émises par les autorités locales. Presque du jour au lendemain, un monopole d'état se transforma en un "tout est libre" presqu'entièrement non régulé, avec des centaines de stations créées à travers le pays et plusieurs dizaines rien qu'à Athènes. Alors que beaucoup de ces radios furent lancées par des passionnés de radio, des petits entrepreneurs et des anciens "pirates", beaucoup d'autres furent créées par des groupes d'intérêts commerciaux et des diffuseurs de presse. Des figures comme l'armateur Minos Kyriakou (Antenna FM), Christos Lambrakis (Top FM) et Giorgios Koskotas (Sky) sont devenues des leaders sur le marché en pleine expansion de la radio. Evidemment, le panorama de la radio grecque de l'époque fut décrit comme une "jungle hertzienne" où "seuls les forts survivent". Il faut noter qu'une nouvelle loi qui réservait une petite frange des fréquences (de 100.7 à 107.4 MHz) aux radios non commerciales et associatives ne fut jamais mise en application.
Après le lancement des radios privées les pressions sur le gouvernement pour obtenir la libéralisation de la télévision se sont accrues. Initialement, et le gouvernement PASOK, et l'ERT furent hostiles au changement réclamé, mais ils ont commencé à fléchir en 1988 quand l'ERT a retransmis plusieurs chaînes internationale de télévision par satellite sur le réseau terrestre UHF d'Athènes. Ces chaînes comprenaient CNN International, l'Allemande SAT1, Horizon de l'URSS, RAI Due d'Italie, TV5 de France et Super Channel du Royaume-Uni. Ces chaines furent lancées pour freiner la demande pour des chaînes de télévision privées grecques, mais ce fut l'opposé qui arriva: l'appétit du public pour plus de diversité s'accrut. Dans la ville de Thessalonique le maire nouvellement élu lança TV 100, le pendant de la radio municipale Radio 100, en même temps qu'il faisait diffuser plusieurs chaînes de télévision par satellite. Au Pirée, la municipalité lança TV Plus, qui introduisit la télévision payante en Grèce, diffusant plusieurs programmes de début de soirée (prime-time), avec des films grand public, par abonnement mensuel et location d'un décodeur.
Ces deux initiatives firent face à de nombreux obstacles et à des tentatives de censure. Dans le droit fil de l'action brutale exercée par le gouvernement dans le traitement des radios pirates dans les années 1980 et laissant présager de plusieurs autres actes musclés, dont la fermeture d'ERT en 2013, le gouvernement envoya la police anti-émeutes investir les installations municipales de diffusion à Thessalonique, ainsi qu' à Athènes, où des salariés de la chaîne municipale et des employés municipaux, ainsi que des conducteurs de véhicules sanitaires furent mobilisés pour bloquer la route d'accès à l'antenne d'Athéna 9.84 et empêcher sa fermeture par la police. De la même manière, les émissions de TV Plus furent fréquemment la cible de brouillages de l'ERT, qui diffusait des programmes de télévision par satellite sur les fréquences utilisées par TV Plus, forçant celle-ci à constamment se repositionner sur d'autres fréquences. Il faut cependant noter que, dans les faits, le monopole de la télévision d'état avait été brisé antérieurement, dans les années 1980 grâce à des moyens ingénieux et toujours avec un objectif politique. Le politicien Georgos Karatzaferis, personnalité du parti "Nouvelle Démocratie", commença à diffuser des programmes vidéo sur abonnement, avec des enregistrements de ses entretiens politiques, proposant des points de vue politiques que l'on ne pouvait pas trouver alors sur l'ERT contrôlée par le PASOK.
En 1989, l'instabilité politique croissant et une fragile et inhabituelle coalition ayant émergé entre à droite "Nouvelle démocratie" et à gauche "Synaspismos", une nouvelle loi fut votée qui ouvrit formellement la voie à la télévision privée. A noter que la loi 1866/89 qui libéralisa l'industrie télévisuelle fut une loi sur mesure: elle stipulait, parmi les critères de sélection en vue de l'obtention d'une licence, la nécessité d'une expérience ou compétence préalable du requérant en matière de médias de masse ou bien son exercice dans une municipalité.
Ces clauses garantissaient dans les faits que les premières licences seraient conformes aux intérêts des principaux diffuseurs du pays et des autorités locales. Comme le montrèrent les années suivantes, une législation sur mesure (ou "sur portrait") devint un outil habituel du gouvernement pour contrôler la télédiffusion au profit d'intérêts politiques ou d'affaires.
Finalement, le gouvernement de l'époque décida d'attribuer deux licences de télévision nationale, mais conformément à ce qui allait devait devenir un thème récurrent, les autorisations étaient à base de politique: la première licence fut donnée à un consortium de diffuseurs importants de "centre-gauche" et d'hommes d'affaires alors proches du PASOK, comprenant Lambrakis, Vardi Vardinogiannis, Ionnis Bobolas, Christos Tegopoulos et Aristidis Alafouzos. Ce fut Mega Channel, lancée en novembre 1989. L'autre licence fut attibuée à un consortium de "centre-droit", incluant des hommes d'affaires comme Socratis Kokkalis ainsi que plusieurs diffuseurs de centre-droit, qui créa Nea Tileorasi. Cette dernière chaîne, pourtant, n'a jamais émis qu'un signal test. Mais la scène était en place pour une "libéralisation sauvage" de la télévision et l'entrée d'une nouvelle machine à pouvoir.
Expatriation : 10 raisons qui font qu’on ne doit rien à l’État !
Les étatistes accusent les expatriés d’avoir « profité » de l’État. Voici 10 bonnes raisons pour lesquelles chacun peut quitter l’État quand il veut.
Pour la énième fois, j’ai reçu une question surask.fm m’accusant d’avoir quitté la France alors que j’ai profité de l’école publique étant enfant, des routes publiques, des transports publics, etc. Je voulais y consacrer cet article pour y répondre une bonne fois pour toutes, parce que c’est une remarque qui me revient souvent et parce qu’elle est d’une grande absurdité. Voici donc 10 raisons pour lesquelles je ne dois rien à l’État et j’ai la liberté de le quitter quand je veux.
1. Techniquement, personne ne peut partir. L’état est en déficit constant, ce qui signifie que tout le monde a statistiquement reçu plus de services publics qu’il n’a payé d’impôts. À part une minorité de quadragénaires célibataires sans enfants et sans problèmes de santé, littéralement tout le monde a contribué (involontairement) à la dette publique.
2. L’État gère très mal ses dépenses publiques, merci de le confirmer.
3. Je n’ai signé aucune forme de contrat social. Je n’ai jamais été présenté avec la possibilité d’accepter ou de refuser les services de l’État. Et même si c’était le cas, je pense qu’il serait extrêmement fallacieux de prétendre que les très jeunes enfants soient en mesure de prendre une telle décision.
4. Il n’est indiqué nulle part que je dois m’acquitter de tout ce que j’ai pu profiter avant de quitter le pays. J’aimerais qu’on me montre une seule loi qui explicite que je doive rembourser mes années d’écoles avant de m’expatrier.
5. Parlant d’école, j’y suis entré quand j’avais 3 ans (ou 2, je ne sais plus exactement) et j’en suis sorti à 20. C’est le comble de la mauvaise foi que de me demander de rembourser quelque chose que j’ai profité alors que durant les quinze premières années je n’étais même pas majeur, je n’étais légalement pas dans la capacité de prendre une telle décision et je n’avais aucun des outils intellectuels pour comprendre la situation et faire le moindre choix différent.
6. Tous ces services publics sont en monopole. Quelle alternative y a-t-il ? L’école privée est financée à 80% par de l’argent public, les routes sont toutes publiques, les transports sont une série de monopoles et il est pratiquement impossible de quitter la sécu. N’est-ce pas encore une fois d’une immense mauvaise foi que de me reprocher d’utiliser quelque chose alors qu’il n’existe strictement aucune alternative légale ? Je dois m’être soigné avec des plantes qui ont poussé dans mon jardin pour avoir le droit de quitter le sol ?
7. Par la même logique, doit-on réclamer à tous les redoublants, tous ceux qui arrêtent leurs études et tous ceux qui changent de carrière pour un autre métier ou pour devenir parent au foyer ? C’est strictement la même situation : l’État fait un investissement financier conséquent pour que ces jeunes un jour contribuent à l’économie nationale, mais au final ils ne le font pas. Je propose que l’on taxe toutes ces mères au foyer ingrates qui coûtent à notre cher et précieux État.
8. Si la Roumanie mettait en œuvre cette logique, nous aurions une pénurie de chirurgiens. N’est-ce pas anormal que l’État roumain paie pour que l’on ait des chirurgiens formés gratuitement qui contribuent à notre économie ?
9. Qu’est-ce qui vous prouve que je ne contribue pas à l’économie française ? Avez-vous la preuve que je ne reviendrai pas dans plusieurs années avec beaucoup d’épargne pour investir et créer des emplois à forte valeur ajoutée sur le sol français ?
10. N’est-ce pas un peu ingrat que vous allez mourir en laissant une ardoise colossale à l’État ? Et qui va payer pour votre retraite et votre santé dans le futur pour lesquels vous n’avez pas épargné, espèce d’égoïste ?
Bref, vous voyez l’idée.
Une soirée chez les Chirac
Une soirée chez les Chirac
La nouvelle met du baume au cœur : les Chirac sont des Français comme les autres. Ils se disputent. Passée la sempiternelle question (« Qu’est qu’on mange ce soir ? ») parfois suivie d’un cri de révolte de l’ancien Président (« Ah non, pas encore de la tête de veau ! »), tout se déglingue. Ils en parlent et le ton monte vite. Elle : « Ton meilleur d’entre nous est un colin froid ». Lui : « Le tien est un agité. Comme toujours, on décide, il exécute ». Une question redoutable reste posée : que va choisir le chien, Juppé ou Sarko ? Prudent, le bichon maltais se tait. Il sait que son maitre peut avoir la dent dure : il surnommait un de ses prédécesseurs, un labrador, « Ducon ». Comme Michel Denisot s’en étonnait, Chirac expliqua : « Oui, c’est Giscard qui me l’a offert ».
Obsolescence programmée : Duflot part en bataille contre les Gremlins
Cécile Duflot, lorsqu’elle n’est pas en train de saboter le secteur immobilier à coups de lois écrites en état d’ébriété, se charge de peaufiner quelques amendements cavaliers sur la Loi de Transiture énergétique de Dame Ségolène. Et au plan politique, rien de tel qu’une âpre lutte contre un moulin à vent pour montrer au reste du monde qu’on a fièrement combattu.
Car pour Cécile, s’il y a bien un problème, en France, qui est souvent oublié, c’est que le pays est régulièrement en proie aux farfadets et autres leprechauns qui viennent grignoter nos récoltes, polluer notre air et tourmenter nos édiles. Heureusement, elle a compris qu’avec sa poudre de perlimpinpin, obtenue à grands soins par frottement d’huile de coude sur du crin de licorne, elle pourrait venir à bout de ce fléau et présente donc régulièrement des lois pour régler le problème.
Bien sûr, pour éviter de terminer en camisole dans un hôpital de seconde zone, elle ne mentionnera aucun lutin ni feu-follet dans le récit destiné à faire passer ses lubies en vote à l’Assemblée et elle utilisera plutôt sa faculté innée de camouflage pour aboutir à des amendements croustillants. Cette fois-ci, les petits korrigans choisis par Cécile sont ceux qui détraquent les objets trop tôt et les vilains gremlins qui grignotent l’électronique et la mécanique de nos appareils ménagers et les font tomber en panne le lendemain de l’expiration de la garantie. Et pour faire passer l’idée qu’ils existent, Cécile et sa clique les ont appelé « Obsolescence programmée ».
L’idée générale est que des industriels, des fabricants et des publicitaires interlopes se retrouvent certains soirs, dans des sous-sols et des caves sombres et humides, dans une lumière blafarde, et conspirent à voix basse pour s’assurer que les machines à laver garanties 2 ans ne dureront que 731 jours maximum, que les bas en nylon soient conçus avec des mailles trop fines pour durer plus d’une ou deux journées, et que les ampoules électriques claquent subitement après quelques mois d’utilisation alors que tout le monde sait qu’elles peuvent en réalité produire de la lumière 10 ans non-stop. Quelle bande de salauds, quand on y pense ! Tout ça parce que le Grand Kapital a décidé – c’est évident – de vendre plus de produits ! Ces gens, prêts à toutes les bassesses, à tous les mensonges, à tous les profits, sont sans morale et sans scrupules à tel point qu’on dirait des politiciens ! Il fallait agir vite et c’est pourquoi Cécile a déposé son amendement, dont l’idée générale est qu’il faut absolument punir fermement ceux de ces industriels indélicats qui osent ce genre de pratiques, parce que rien dans l’arsenal législatif ne permettait déjà de régler le problème.
En pratique, sur le papier et législativement parlant, ça donne ceci :
« Soit sur la durée de vie du produit intentionnellement raccourcie lors de sa conception »
Et ceci se trouve après le troisième point de l’article L. 213‑1 du Code de la Consommation (qui est, je suppose, à la circulation des couteaux, des cuillères et des fourchettes ce que le code de la route est à celle des voitures). Concrètement, cela veut donc dire qu’un impétrant tentant de tromper un consommateur en raccourcissant intentionnellement la vie d’un produit lors de sa conception se verra puni d’un emprisonnement de deux ans au plus et d’une amende de 300.000 euros.
Eh oui, en France, on ne rigole pas avec les gremlins et les leprechauns. Et le fait que ce sont, réellement, des créatures mythologiques ajoute même au bénéfice qu’on peut avoir, lorsqu’on est un politicien, à produire des règlements à leur encontre. De la même façon qu’un vendeur d’alarmes contre les invasion de girafes serait assuré d’un taux d’échec extrêmement faible s’il en garantit l’usage sur le territoire français, faire passer une loi pour quelque chose qui n’existe pas garantit, par construction, que cette loi sera respectée très scrupuleusement. En outre, ici, le flou et la maladresse avec lesquels a été rédigé l’amendement ajoutent ce petit parfum de n’importe quoi inimitable qui fait maintenant la marque de fabrique de Duflot, décidément vraiment pas doué pour la législation.
Car on a beau tourner le bidule (« amendement », dans ce cas, est bien trop solennel pour cette salade de petits mots disjoints) dans tous les sens, aucun angle ne permet de voir autre chose qu’un désastre intellectuel malheureusement devenu routinier dans l’actuel hémicycle, et notoirement lorsque Cécile s’empare de son gros bic baveux. Je passe rapidement sur le concept même d’obsolescence programmée, si parfaitement crétin qu’il me suffira de renvoyer àquelques liens pour rappeler que ça n’existe pas, du tout, même pas en rêve.
Oui, bien sûr qu’il existe en revanche des industriels indélicats. Bien sûr qu’il y a, parfois, un vendeur imbécile croyant faire du bénéfice en imposant une limitation arbitraire à son produit. Cependant, l’écrasante majorité de ce que le grand public (et, derrière lui, les politiciens avides de s’attirer ses bonnes grâces) prend pour de l’obsolescence programmée est, bien plus simplement, une fort mauvaise compréhension de la façon dont fonctionne les processus industriels, les contraintes de qualités et leur rapport avec le prix. Si l’on y ajoute le biais du survivant, aussi psychologiquement puissant qu’il est connu et mal compris par ceux qui tombent dedans, on a tous les ingrédients réunis pour aboutir à donner un corps dodu à un mythe ridicule, d’autant qu’il est nourri par la doxa indécrottablement malthusienne et anti-consumériste des écologistes standards.
Mais, plus à propos de cet amendement, même en considérant les bonnes intentions éventuelles d’une député décidément pas aidée dans ses rédactions législatives, on ne peut s’empêcher de bondir en lisant la formulation proprement hallucinante du bidule. Des questions, lancinantes et impérieuses, se bousculent immédiatement :
- Qu’est-ce-que « la durée de vie d’un produit » ? En existe-t-il une officielle, reconnue de tous ? Un tableau (périodique, proprement remis à jour tous les trimestres) liste-t-il scrupuleusement cette durée de vie normale pour tous les objets qui peuvent faire l’objet d’une production et d’une consommation ? Est-on en droit de s’insurger si les boulons fournis par Ikea pour fixer ensemble les deux pans du magnifique Grøsbåff tiennent mal au bout de 10 ans ? Ou peut-on le faire dès 5 ans ? Quelle est la durée de vie officielle d’une pile LR5 ?
- Si on ne connaît pas la durée de vie d’un produit, par quelle contorsion mathématique ou physique rigolote va-t-on pouvoir déduire qu’elle a été réduite ? Si on peut concevoir que la question précédente est un piège (les boulons du Grøsbåff n’ont pas de durée de vie déterminée, zut alors), il n’en reste pas moins vrai qu’affirmer qu’une durée inconnue a été réduite tient du prodige. Nul doute que la brave Cécile doit pouvoir nous trouver une explication en béton armé à ce petit paradoxe.
- Enfin, en imaginant que, sans connaître la durée attendue, on a pu déterminer malgré tout que la durée observée est moindre, comment arriver à montrer de façon claire et sans ambiguïté que cette réduction est intentionnelle ? Déjà qu’aux deux questions précédentes, on sentait nettement nos députés écologistes lancés en brasse coulée dans une piscine de fondue savoyarde, on atteint avec cette notion deraccourcissement intentionnel sur une durée inconnue mais tout de même raccourcie un niveau de n’importe quoi que peu de politiciens atteignent régulièrement, même les plus entraînés.
Et ces questions ne sont pas anecdotiques puisque, finalement, l’infraction étant assortie d’une sévère punition, tout cela se jouera au pénal qui ne peut pas trop s’encombrer d’approximatif, au contraire des députés qui, eux, en font leur miel.
Rassurez-vous : tant ces questions, qui ne seront jamais posées et n’auront donc jamais la moindre réponse pertinente, que cet « amendement » n’ont la moindre importance. Que cette purée législative épaisse vienne alourdir un énième code (celui de la consommation) n’a pas non plus la moindre importance. Tout indique que cet exercice, purement scribouillard, ne sert qu’à montrer au peuple qu’on le dorlote, qu’on s’occupe de lui. Cécile Duflot et ses colistiers dans cette affaire confuse et mal boutiquée n’ont qu’un but bien compris : montrer qu’ils sont du côté des Gentils, et en lutte permanente contre les Méchants qui sont protéiformes, se cachent partout, notamment dans les détails, et pavent l’enfer de bonnes intentions, les veules.
Tremblez, gremlins. Frémissez, farfadets. Cécile vous garde à l’œil. Pleurez, Français. Vous payez pour ces conneries.
Hollande et le carré diabolique
Hollande et le carré diabolique
Mauvais génie ou maladresse ? Manque de chance ou incompétence ? Chaque fois que François Hollande se risque à une prévision, il se fait vivement démentir le lendemain. On avait déjà connu le ridicule des mots : « l’inversion de la courbe du chômage en un an », « la reprise est là », « le retournement économique arrive ». Voici maintenant celui des chiffres : une croissance de 1% en 2015, explique le chef de l’Etat, « c’est réaliste ». A peine avait-il prononcé ces mots que, déjà fragilisé par un avis très sévère du Haut Conseil des Finances publiques, il se faisait humilier par l’Insee dont les dernières statistiques sont catastrophiques.
Une fois de plus, la France est en panne. Mais une fois de plus, ses dirigeants nient cette réalité et la camouflent derrière un halo de promesses en se rengorgeant de leur petite audace réformatrice. Et pourtant, rien ne se passe. Le pouvoir semble paralysé, enfermé dans un carré diabolique, entre impopularité présidentielle, délitement de la majorité, épuisement de l’économie, et garrot budgétaire.
Ainsi, plus le temps s’écoule, plus il devient clair qu’il sera impossible de sortir de ce piège sans un choc, une action réformatrice en profondeur. La France est embourbée, divisée et n’a plus confiance en elle. Les dégâts provoqués par la politique économique et sociale menée depuis 30 mois sur un terrain déjà fragile ont tellement abîmé le pays que la kyrielle des réformes homéopathiques, plaisante à essayer en temps normal, est devenue hors de proportion avec l’état du malade. Ceux qui aspirent à gouverner demain la France doivent en prendre conscience. Et le dire à ceux dont ils solliciteront les suffrages. Dans le combat d’idées qui s’annonce déjà en vue de 2017, l’audace sera un marqueur essentiel.
Et bien sûr on augmente l’AME !
A l’heure où le président de la gauche friquée nous donne des leçons d’austérité et exige des familles françaises de nouveaux sacrifices, alors qu’un Français sur trois renonce aujourd’hui à se faire soigner faute d’en avoir les moyens financiers, on apprend que le projet de budget 2015, censé limiter les dépenses publiques, prévoit une augmentation de 73 millions d’euros des crédits alloués à l’Aide médicale d’Etat, qui permet de prendre en charge à 100 % les soins des clandestins !
Dispositif délirant
La raison invoquée ? Une « forte poussée du nombre de bénéficiaires » qui, en 2013, a fait passer les dépenses prévues de 588 millions à 744 millions d’euros. Et pour cause : ce dispositif délirant créé sous Jospin permet à tous les clandestins résidant en France depuis trois mois de voir leurs soins pris
intégralement en charge et sans avance de frais. Une véritable incitation à venir se faire soigner chez nous ! Le nombre de bénéficiaires a donc inévitablement augmenté d’année en année, passant de quelque 95 000 en 2001 à plus de 278 000 personnes en 2013, et enregistrant même une augmentation de 35 % ces deux dernières années. Quant aux dépenses, elles ont bien sûr augmenté au même rythme, passant de 377 millions d’euros en 2002 à 744 millions en 2013.
Un dispositif absurde, régulièrement pointé du doigt par la Cour des comptes, et qui en outre donne lieu à une fraude massive : sites internet chinois proposant des cartes AME payantes, filières géorgiennes envoyant leurs tuberculeux… Plus fort encore : dans un entretien accordé en octobre 2013 à Challenges, le Dr Véronique Vasseur, auteur de Santé, le grand fiasco, expliquait que « jusqu’en 2011, des femmes sans papier se sont fait rembourser intégralement leurs cures thermales et des parcours de soins type procréation médicalement assistée avec des fécondationsin vitro, lesquelles ont coûté en moyenne 8 000 euros chacune ». Et elle ajoutait : « A Paris, en 2009, 22 bénéficiaires de l’AME ont eu recours à des PMA pour plus de 99 000 euros » !
Pompe aspirante
Vivement critiquée par la droite, Marisol Touraine a admis en juin dernier que l’AME donnait lieu à d’innombrables abus et coûtait particulièrement cher aux Français. Mais pas question pour autant d’y mettre fin. Le ministre de la Santé a défendu au contraire ce dispositif qui, selon elle, « répond tout à fait à l’exigence que nous devons avoir » en termes de santé publique.
Un véritable scandale à l’heure où le gouvernement tape sans pitié sur les familles et impose l’austérité aux Français. Dénonçant mercredi « une nouvelle illustration de la politique injuste du gouvernement », et exigeant « la suppression immédiate de l’AME et de l’ensemble des dispositifs favorisant l’immigration clandestine », Nicolas Bay, secrétaire général adjoint du FN, observait ainsi très justement que « pendant que des millions de Français ne parviennent plus à se soigner convenablement, que de plus en plus de médicaments sont déremboursés et que le coût des mutuelles complémentaires atteint des records, (…) le gouvernement ose renforcer encore une des principales pompes aspirantes de l’immigration ».
Hongkong : "La Chine n'a pas intérêt à utiliser la force"
Lancé le 22 septembre, le mouvement pro-démocratie mené par les étudiants à Hongkong, région administrative spéciale de la République populaire de Chine, ne s'est pas depuis éteint. Au contraire, la tension est brusquement montée jeudi 1er octobre au soir, rapporte l'AFP: aux leaders étudiants de la "révolution des parapluies" (dont ils se sont servi pour se protéger des gaz au poivre utilisés par la police pour les disperser) qui exigent la démission du chef de l'exécutif avant minuit, le gouvernement a répondu en lançant un appel ferme à la fin du mouvement, alors que la police transportait des caisses de balles en caoutchouc.
Entretemps, en France, l'interprétation de ce soulèvement n'est pas unanime. La Tribune confronte les points de vue de deux experts: Jean-Vincent Brisset, directeur de recherche à l'Iris, et Pierre Picquard, docteur en géo-politique et conférencier.
La Tribune: Comment en est-on arrivé là?
Jean-Vincent Brisset. "Malgré les promesses formulées par Pékin lors de la rétrocession d'Hongkong par le Royaume-Uni à la Chine, en 1997, les Hongkongais ont subi depuis - dans les faits plus que dans les textes - une restriction progressive de leurs libertés. Ils éprouvent aujourd'hui un sentiment d'étouffement. Si, depuis l'époque de Deng Xiaoping (qui a dirigé le pays de 1978 à 1992: NDLR), la Chine reconnaît sans doute plus d'autonomie à ses diverses régions, on sait bien que la fiabilité de Pékin est relative. A cela s'ajoute, sur le plan socio-économique, la perte progressive de la part d'activité du port de Hongkong, de son rôle de pivot des exportations, le continent - où les biens sont fabriqués - ayant acquis la capacité technique de les exporter sans passer par lui".
Pierre Picquard. "Même si, après la rétrocession à la Chine, la région administrative spéciale de Hongkong a conservé une monnaie et un système juridique spécifiques, hérités du protectorat britannique, jusqu'à présent la population hongkongaise n'a jamais élu directement son gouvernement. En approuvant l'instauration d'un suffrage universel à Hongkong en 2017, le Parlement chinois a ainsi réalisé une grande avancée, surtout si l'on considère qu'il n'était en rien lié, juridiquement, à d'éventuelles promesses formulées vis-à-vis des Britanniques, puisque Hongkong est aujourd'hui soumis à la souveraineté chinoise. Une seule limite a été posée par Pékin: que les candidats soient choisis par un comité local, qui existe depuis la domination britannique. On aurait donc pu plutôt s'attendre à un accueil positif de cette mesure par la population, d'autant plus qu'en termes de libertés individuelles le territoire reste privilégié par rapport au reste du continent. Or, on assiste au contraire à une protestation, dont le caractère très structuré laisse douter de sa spontanéité et oblige à s'interroger sur ses réelles sources. Ceci est d'autant plus surprenant que Hongkong, qui, sous le Royaume Uni, était déjà une place économique et financière puissante, tire aujourd'hui de nouveaux et importants profits de la croissance et de la dynamique chinoise".
LT. Que peut faire le gouvernement chinois pour enrayer le mouvement?
JVB. "10% de la population d'Hongkong est étrangère, provenant essentiellement des Philippines mais aussi dans une large proportion de l'Occident. Ceci constitue pour Pékin le principal obstacle à l'utilisation de la force. Mais les intimidations, la déconsidération, la désinformation restent des armes considérables dans les mains du gouvernement".
PP. "Engagée dans un processus de réformes, la Chine n'a aujourd'hui pas intérêt, en termes d'images, à utiliser la force: la dimension symbolique revêtue par Hongkong est trop puissante. Si elle pourrait certes intervenir en cas de dérives, elle semble préférer laisser les autorités locales gérer le conflit. Celles-ci, craignant une déstabilisation, ne laisseront toutefois pas perdurer l'anarchie."
LT. Que dire des réactions de la communauté internationale?
JVB. "Si certains pays tels que la Grande-Bretagne, le Royaume-Uni et le Japon ont déjà eu le courage de taper sur la table, ce ne sera sans doute pas le cas de la France".
P.P. "La montée en puissance de certaines prises de position en Occident risque seulement d'exacerber le nationalisme qui commence à se manifester en Chine. Le point de vue occidental n'est en effet pas forcément partagé par le grand public chinois qui, à 97%, soutient son gouvernement".
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