samedi 23 mars 2013
Le paravent fiscal
Le paravent fiscal
Tant que perdurent des batailles de polochons sur la hauteur de son taux, on sait ce que la taxe sur les très grands revenus confisque : le débat sur une vraie réforme fiscale. Faut-il s’en étonner ?
L’idée des 75 % procède d’une intention électorale. Durant la présidentielle, le candidat Hollande a voulu frapper les esprits par un geste effrontément de gauche et assez médiatique pour contenir un trop envahissant Mélenchon. D’étendard électoral, le super-taux est devenu symbole politique. À la fois trop encombrant pour être caché sous le tapis constitutionnel. Et suffisamment voyant pour détourner les regards de l’essentiel.
Passé l’effet d’annonce, et au-delà des querelles fatigantes sur le seuil jugé confiscatoire, ce projet de taxation des stars du ballon et des Obelix du cinéma, notamment, apparaît bien mince au plan fiscal. Il est même anecdotique par les assujettis et le produit escomptés.
Pendant ce temps se lève l’énorme tempête des comptes sociaux. Et le pays rame de manière désordonnée et inégale dans un océan de prélèvements obligatoires dont plus personne ne maîtrise ni les frontières économiques, ni la profondeur institutionnelle. Ce n’est pas à ce pouvoir que l’on peut reprocher un demi-siècle de manque de courage pour défaire un système surréaliste. Mais feindre que de la super-taxe viendrait la preuve d’un engagement gouvernemental est léger.
Un chantier comme la modulation des allocations familiales selon les revenus est autrement emblématique d’une révision de la fiscalité sur le fond. On verra ce qu’il adviendra d’une piste aussi radicale et risquée. À moins que ne se dresse, d’ici là, un autre de ces paravents peu coûteux à la collectivité et tellement efficaces pour cacher que le ménage n’a pas été engagé, comme la feuille de paie des grands dirigeants par exemple.
Recréer la confiance
Recréer la confiance
« Je sais où je vais et je sais comment faire pour y parvenir ! » Cette déclaration forte du Premier ministre, à l'Assemblée nationale, a suscité de vives protestations dans l'opposition. Pourquoi ? Parce que l'opinion publique a le sentiment de ne pas savoir où l'on va. La crise est là et l'horizon semble bouché. Il est inutile de récapituler, outre le chômage, tout ce qui inquiète, tout ce qui semble insurmontable, tout ce qui doit être réformé et qui est cependant combattu par les uns ou par les autres.
À cela s'ajoute une certaine déception de ceux qui avaient voté pour le « changement maintenant ». Si l'on a changé de majorité, les difficultés qu'ils espéraient voir écarter sont les mêmes et toujours là. Quant à ceux qui n'ont pas voté pour la majorité actuelle et qui s'efforcent de constituer une opposition pugnace, ils savent bien, au fond d'eux-mêmes, que la crise mènerait autant le bal s'ils étaient au pouvoir.
C'est donc à une grande clarification qu'aspire l'opinion publique. Le Premier ministre a fait un premier pas dans ce sens au Parlement. Il a bien raison de vouloir rassurer. Il affirme connaître son cap et le tenir, mais l'opinion publique ne se satisfera pas d'affirmations et de bonne volonté. Elle est troublée par la bizarrerie de la méthode gouvernementale. Les annonces de mesures nouvelles se succèdent souvent sans suite, comme s'il s'agissait de ballons d'essais destinés à évaluer la force des éventuelles réactions.
La fiscalité évolutive et ce qu'elle présage ne suggère rien de bon aux contribuables. Ceux-ci désormais se méfient et cherchent à éviter de se trouver, demain, en porte-à-faux. On économise comme on peut. Du coup, on prend plus de précautions que de risques, alors que seul le dynamisme et l'audace pourraient propulser le pays vers l'avant. Dans le domaine du dialogue social, l'accord intervenu entre syndicats et patronat, et soutenu par le gouvernement, apparaît prometteur à beaucoup. Mais il est battu en brèche par deux grandes organisations syndicales. Que donnera-t-il finalement ?
Se méfier des eaux qui dorment
L'école, le cumul des mandats suscitent l'interrogation. De plus, de grands changements sociétaux lancés à la va-vite, comme le mariage dit pour tous ou les lois bioéthiques, dont on ne discute pratiquement pas, viennent remuer la société dans ses profondeurs et provoquent de nouveaux clivages transversaux à l'intérieur des partis, des Églises, des institutions...
Le départ brusqué d'un ministre essentiel du gouvernement, la mise en examen spectaculaire de l'ancien président de la République, Nicolas Sarkozy, les perquisitions conduites ici ou là à travers le pays, et visant des personnalités politiques, nourrissent les inquiétudes. Tout cela détériore l'image du monde politique, incite au doute, aux accusations sans nuance, au rejet des autorités de quelque bord qu'elles soient. Du coup, les incertitudes de la crise se trouvent amplifiées. Or, la peur est mauvaise conseillère. Il ne faudrait pas que le désarroi que l'on ressent de plus en plus se transforme un jour en panique ou en colère.
Il est donc urgent de recréer la confiance sinon les vieux démons auront de beaux jours devant eux pour présenter leurs solutions simplistes et séduisantes qui ne règlent rien, mais donnent l'illusion que, demain, sans effort, ce sera mieux. La France est calme comparée à ses voisins : l'Espagne, l'Italie, ou bien le Portugal et la Grèce. Mais il faut toujours savoir se méfier des eaux qui dorment.
Aveu de faiblesse
Aveu de faiblesse
Après la mise en examen de Nicolas Sarkozy, l’UMP tombe dans un piège qu’elle se tend elle-même. S’en prendre individuellement au travail du juge d’instruction Jean-Michel Gentil – jusqu’à dire, comme Henri Guaino, ancien conseiller spécial de l’ex-président, que ce magistrat « déshonore » la justice – ou laisser entendre que la justice est aux ordres du pouvoir actuel ne sert à rien. Sinon, à provoquer des réactions… favorables au juge et aux juges, dont l’indépendance est à préserver au nom de la démocratie.
Rien ne prouve, pour l’instant, que Nicolas Sarkozy ait commis contre Mme Bettencourt, un « abus de faiblesse ». Mais un aveu de… faiblesse, en revanche, est manifeste : celui de la droite. On peut comprendre son désarroi, puisque sa personnalité la plus emblématique est frappée en pleine tentative de redécollage. Mais de là à utiliser de telles ficelles pour organiser la riposte…
Jeter le discrédit sur une personne qui se met en travers de votre chemin – celui du retour, que l’ancien locataire de l’Élysée venait d’entreprendre – est un réflexe classique, humain, bêtement humain.
En politique, quand la maîtrise des événements vous échappe, existe un autre réflexe conditionné, celui d’imaginer une machination. Ici, une opération destinée à faire oublier la mise en examen, quelques heures auparavant, du ministre du Budget, Jérôme Cahuzac. C’est mal connaître le rythme de la justice, d’une lenteur souvent considérée comme excessive. Encore plus, lorsqu’il s’agit du chef de l’État, dont le statut permet de suspendre le cours d’éventuelles poursuites pénales pendant qu’il est en fonction. Immunité forte, mais provisoire, Jacques Chirac en a fait la cruelle expérience, en étant mis en examen – puis, pour ce qui le concerne, condamné en 2011, à deux ans de prison avec sursis – après avoir quitté la fonction suprême en 2007. Nicolas Sarkozy a été rattrapé par le même calendrier, indépendant du calendrier politique et médiatique. C’est tout.
L’heure des comptes – qui se solderont peut-être par une mise hors de cause – est venue. Aucun leurre, attaque personnelle ou thèse d’un improbable complot n’y pourront rien.
Tableau de chasse
Tableau de chasse
La confrontation entre un ancien président de la République et le majordome de la femme la plus riche du monde a tout du, mauvais, roman de genre. Pourtant, c’est bien ce qui s’est passé hier. À peine revenu de Libye, où on a déroulé le tapis rouge devant lui, Nicolas Sarkozy est brutalement ramené à la réalité française.
Cette rencontre judiciaire n’a rien de surprenant tant l’affaire Bettencourt avait pris de l’ampleur lors des derniers mois du quinquennat de Nicolas Sarkozy. La justice a suivi son cours et elle se rappelle aujourd’hui au bon souvenir de l’ancien chef de l’État. Celui-ci pourra vérifier par lui-même le vieil adage romain qui disait que la roche tarpéienne est proche du capitole, rappelant ainsi aux puissants du jour que la chute les attend le lendemain.
La concomitance des rendez-vous judiciaires peut laisser perplexe. Cahuzac, Lagarde, Sarkozy, le calendrier judiciaire est sans pitié et n’épargne aucun camp. Ne doutons pas que la lenteur de la procédure explique ce tir groupé des magistrats.
Pour ce qui est de l’ancien président, sa mise en examen hier pour « abus de faiblesse » arrive au mauvais moment. Face aux divisions de son camp, Nicolas Sarkozy avançait ses pions. Les rumeurs à propos du « recours » Sarko se multipliaient. Le rebondissement judiciaire fera pousser un soupir de soulagement aux dirigeants de l’UMP qui rêvent d’assurer sa succession.
À gauche, l’onde de choc de l’affaire Cahuzac est amortie. Le gouvernement et l’Élysée ne pouvaient rêver meilleur contre-feu. Entre une milliardaire de droite et un maladroit de gauche, il n’y pas photo. L’une est soupçonnée d’avoir financé une campagne électorale. L’autre est accusé d’avoir mis de l’argent « à gauche » et en Suisse, ce qui n’est en l’occurrence pas antinomique.
La question est surtout de savoir si cela va supplanter dans l’esprit de l’électeur, les difficultés économiques, la hausse des taxes ou, surtout, cet immense ras-le-bol face à des dirigeants qui ont l’art et la manière de prêter le flanc à la critique. À ce titre, les prochains scrutins risquent fort d’être « saignants ».
Nicolas Sarkozy, éternel présumé coupable : le ras-le-bol d'un sarkozyste
Un magistrat qui décide qu’un président de la République mis en examen, ce n’est pas anodin. Un homme politique comme Nicolas Sarkozy n’a de toute façon jamais été anodin, et cette particularité personne ne lui contestera.
On a tout dit, tout écrit sur son parcours, sa méthode, ses réussites.
On oublie plus souvent qu’à chaque moment de sa carrière, il a été présumé coupable.
A ses débuts, quand sa proximité avec Jacques Chirac s’affirmait, il était regardé du coin de l’œil par ses collègues responsables politiques qui le suspectaient déjà, faisant passer son audace pour de la brutalité.
Dans son ascension ministérielle et dans sa campagne auprès d’Edouard Balladur, il était présumé coupable ; coupable de vouloir faire gagner une droite qui devait incarner l’alternance après des années de mitterandisme touchant à leur fin.
A l’issue de l’élection présidentielle de 1995, quand la droite goûtait à nouveau au pouvoir, il en fût écarté, présumé coupable d’avoir fait campagne trop franchement pour le candidat qu’il avait choisi, sans calculer son engagement ni chercher à protéger sa propre carrière d’une éventuelle défaite.
On s’aperçoit d’ailleurs qu’il signa son retour sur le devant de la scène politique par un ouvrage appelé « Libre », un sentiment de liberté si agréable pour un éternel présumé coupable.
Puis en 2002, quand il embarquait la droite vers son renouveau idéologique et décidait de la décomplexer, les présomptions de culpabilité lui tombèrent dessus en cascade.
Présumé d’être impliqué dans le scandale Clearstream que la justice allait révéler comme un montage fantaisiste destiné à le déstabiliser.
Présumé « ultra-libéral », présumé « atlantiste », présumé sécuritaire, présumé raciste, bref présumé coupable.
En 2007, les présomptions furent encore plus graves quand il accéda au pouvoir.
Présumé président des riches alors qu’il installait les heures supplémentaires.
Présumé raciste alors qu’il installait la diversité au sommet de l’état.
Présumé réactionnaire quand il avait osé parler de l’identité de la France, certains jeunes socialistes osant le caricaturer saluant avec un bras tendu…
La mise en examen décidée cette semaine par le juge Gentil ravive cette question : Nicolas Sarkozy est-il présumé coupable par certaines corporations ?
Aujourd’hui, Nicolas Sarkozy est mis en examen pour abus de faiblesse pour des faits qui remontent en 2007. Cette mise en examen fondée sur des témoignages contradictoires sont troublants.
Plus curieux encore, en juin 2012, le juge Gentil cosignait une tribune dans laquelle critiquant Nicolas Sarkozy, il considérait qu’avec la droite sarkozyste « les exigences de probité et d'égalité de tous devant la loi s'étaient dissoutes dans la crise.»
Cette tribune avait été publiée cinq jours avant de lancer des perquisitions chez Nicolas Sarkozy !
Les positions politiques de ce juge ne remettent pas en cause sa probité, mais peuvent au moins poser la question de sa neutralité politique.
Comment sincèrement croire que dans l’entre deux tours de la présidentielle, un moment si crucial pour un homme politique qui a toujours espéré présider aux destinées de son pays, Nicolas Sarkozy se serait glissé dans un domicile pour tenter de profiter de la faiblesse d’une femme qui compte parmi les plus grandes fortunes du Monde ?
Pour un militant sarkozyste, cette fable semble bien loin de l’attitude de celui qui révéla ses qualités d’homme d’Etat et jugula la crise économique qui menaçait de faire s’effondrer l’économie française.
Pour un simple citoyen, la concomitance avec « l’affaire Cahuzac » est frappante. La dignité de la droite républicaine devrait inciter ses opposants politiques à ne pas salir inutilement un ancien président de la République qui n’a pas ménagé ses efforts à la tête de notre pays.
Retenons en résumé que Nicolas Sarkozy est toujours présumé coupable mais qu’il en sort toujours grandi…à bon entendeur ou même à bon lecteur.
Bouillonnements
Bouillonnements
L’homme politique est un Indien de bande dessinée. Quand il ne sait plus quoi dire, il fait des nuages de fumée: on croit qu’il envoie de subtils messages à décrypter alors qu’il cherche à occuper l’espace et à faire diversion. Le tintamarre qui accompagne les ennuis judiciaires de Nicolas Sarkozy illustre bien ce maquillage du vide.
Nul ne sait comment cette affaire va finir, et pourtant, les déclarations péremptoires arrivent en rafales: les sarkozystes dénoncent une vengeance scénarisée par la justice, la gauche applaudit l’exigence du juge… Rien que du classique derrière lequel se lit l’inquiétude des uns et la gourmandise des autres.
L’affaire est dramatisée à souhait depuis que l’ancien président, après un an de silence, laissait entendre qu’il était prêt à faire don de sa personne à la République pour peu qu’elle le lui demande gentiment! Et voilà que ce scénario de reconquête est brouillé par un concert de casseroles judiciaires…
Mais le plus important est ailleurs.
Comment faire confiance à la validation d’un compte de campagne électorale si cette question, même posée de façon indirecte, peut revenir en force des années plus tard?
Comment admettre qu’un ministre suspecté doive démissionner séance tenante, avant même une éventuelle mise en examen, alors que le chef de l’État, protégé par son impunité statutaire, peut tranquillement finir son quinquennat, quitte à ce qu’il soit ensuite mis en examen?
Malgré la fameuse présomption d’innocence, il y a là de quoi faire bouillonner la marmite des doutes et procès (justes ou injustes) qui accréditent l’idée que la politique est une tambouille.
Ce soupçon général est une menace pour la démocratie et une plaie pour tous les hommes et femmes qui, vaille que vaille, tentent de faire sincèrement leur dur métier d’élu(e)s du peuple.
Vin rouge : une molécule bénéfique mais...
Une nouvelle étude montre que le vin rouge contient une cellule, le resvératrol, permettant de lutter contre l'obésité, le diabète ou encore la maladie d'Alzheimer.
Ceux qui boivent du vin modérément sont en meilleure santé que ceux qui s’abstiennent complètement. C'est ce qui ressort d'une nouvelle étude menée par les chercheurs de la Harvard Medical School (Boston, Etats-Unis) et relayée par le site Aujourd'hui.com. Les scientifiques ont trouvé que le resvératrol, une substance contenue dans la peau du raison rouge, active des protéines appelées sirtuines qui seraient impliquées de façon complexe dans la stimulation énergétique des cellules.
Cette substance fait l'objet de recherches intensives depuis près de 15 ans, "parce qu'elle serait dotée de propriétés multiples, contre le diabète, l'obésité, la maladie d'Alzheimer",souligne Le Figaro. En 2012, des tests ont montré que le resvératrol avait aidé des souris à courir deux fois plus longtemps que d'habitude.
Problème : il ne suffit pas de boire un verre, ou même deux verres, de vin rouge pour tirer profit de cette substance. Les quantités de resvératrol sont trop faibles pour avoir de l'effet. Il faudrait extraire cette molécule par des procédés chimiques pour pouvoir l'exploiter souligne Aujourd'hui.com
En juin 2012, une étude avait montré que boire deux verres de vin par jour permettrait d'être en meilleure santé que ceux qui ne boivent que de l'eau...
Abus de faiblesse, le véritable scandale : qui se préoccupe des dizaines de milliers de cas de curatelles aux conséquences bien plus glauques que celles subies par Liliane Bettencourt ?
Alors que l’affaire Sarkozy-Bettencourt revient sur le devant de la scène, la question des régimes tutélaires reste définitivement absente du débat public malgré les nombreux scandales humains et financiers qu’elle engendre. En France, près de 700 000 personnes, soit 1% de la population français est jugée "incapable" et ne sont administrées que par un peu plus de 80 juges (sources : Les chiffres clés de la Justice 2009 et le rapport n° 3557 du député Emile Blessig pour la réforme de la protection des majeurs). Comment expliquer qu’un tel phénomène soit aussi peu relayé ? La France se soucie-t-elle vraiment de l’État de ses "incapables" c’est à dire essentiellement des personnes âgées ?
Franck Hagenbucher-Sacripanti : Avant tout, il est important de comprendre que mon combat est essentiellement centré sur la mise sous tutelle "professionnelle" c’est-à-dire le fait qu’une personne soit supposément mise sous protection d’une tuteur ou d’une curateur professionnel. La question des tutelles ou des curatelles familiale est tout autre. Ainsi, il est important de comprendre que cette problématique des régimes tutélaires est empreinte d’une ambiance d’amoralité grave pour de nombreuses raisons. D’abord, il y a une telle masse d’argent qui entoure ce système et qui m’a amené au cours de mon combat à demander une inspection générale des services des tutelles afin de clarifier tout cela. Malheureusement, bien que le manque de moyen, avéré, de la justice pour gérer cette question soit toujours agité comme la seule raison de cette inaction, il y a surtout une sorte de mensonge général sur le système. Derrière, celui-ci se cache une maltraitance institutionnelle qui vient des institutions tutélaires professionnelles qui sont consubstantielles avec l’État.
La question du désintérêt français pour les personnes âgées est une question très vaste et très profonde. Avant de rentrer pour m’occuper du drame tutélaire que vivait ma mère, j’ai passé l’essentiel de ma carrière d’anthropologue en Afrique et lors de l’un de mes passages en France, le film Ridicule était sur toutes les lèvres et je suis allé le voir. L’une des scènes cultes de ce film présente un vieillard paralysé dans un salon du château de Versailles sur lequel pisse consciencieusement un quadra poudré. Je n’ai personnellement pas supporté le film et lorsqu’un jour en rentrant du Congo, c’était le film diffusé dans l’avion j’ai littéralement entendu les Africains crier tant ils étaient choqués par cette scène de non-respect d’un ancien, d’une personne âgée. Le discours est long mais il nous montre bien à quel point nous avons une sensibilité indifférente voire hostile au grand âge, et cela sur tous les plans, esthétique, artistique, psychologique, affectif et autres. Je ne parle pas de la totalité de la France mais de sa majorité. Nous, Occidentaux, avons développé un rapport malsain à cette partie de la famille, nous avons développé une maltraitance tranquille des personnes âgées. Dans la cas de ma mère, et ce n’est qu’un exemple parmi des milliers d’autres, je vous parle de choses indicibles, d’yeux crevés, d’épaules fracassées pour lesquels la justice avait ni plus ni moins verrouillait le système de preuves.
Qui sont ceux qui ont le pouvoir de retirer ainsi des libertés et sur quels motifs ?
Xavier de la Chaise : Cela concerne la dépendance de la personne, et le fait qu'elle ne puisse plus s'assumer elle-même. Cette décision peut émaner de la famille (le cas le plus fréquent), mais également d'un médecin qui peut faire un signalement au procureur, qui saisit par la suite le juge des tutelles, après une expertise médicale qui justifie l'ouverture de la mesure de protection. Cette expertise vient confirmer le besoin d'assistance ou non, mais également le niveau d'incapacité de la personne (de la simple assistance renforcée à la franche représentation). Le juge prononce ensuite la mesure d'assistance qui se justifie.La personne désignée est par priorité le conjoint, puis la famille, les proches susceptibles de remplir la fonction et dans le dernier cas un tuteur ou un curateur extérieur.
Il y a trois types de profils de mise sous tutelle : les personnes ayant été victimes d'un accident ponctuel. La seconde catégorie regroupe les gens qui souffrent de pathologies psychiatriques ou qui présentent un handicap. Et la troisième catégorie est la population vieillissante, touchée par la sénilité ou l'Alzheimer. Et cela ne va pas diminuer avec le vieillissement de la population, ce qui va poser, à terme, un problème de prise en charge.
Plus de cent mille dossiers de demande de mise sous tutelle sont en cours d’examen. Est-il courant de voir des familles faire des requêtes injustifiées ? Y a-t-il des tentatives d’escroqueries ?
Xavier de la Chaise : Les tentatives d'escroquerie existent bien sûr, et dans ce cas-là c'est à l'avocat de jouer le rôle de filtre, et de voir si la procédure est justifiée ou non. Mais il y a aussi des cas dans lesquels la famille n'est pas de mauvaise foi, et pense que la demande de mise sous protection est justifiée, alors que la personne concernée ne s'estime pas relever d'une mesure de protection, ce qui provoque bien évidemment un désaccord.
Le cas d'une famille qui réclame une mise sous tutelle alors qu'elle sait que la mise sous tutelle est injustifiée pour simplement porter préjudice n'est pas fréquent. Mais il y a bien évidemment des cas dans lesquels la demande n'est pas fondée, et dans ce cas la demande est rejetée par le juge qui l'a examinée. En réalité, il s’agit le plus souvent de divergences de point de vue plutôt que de véritables tentatives d’arnaque et l’ensemble est souvent lié à la typologie de la famille. On trouve aussi bien des gens très isolés que des familles très unies, des familles qui se tapent dessus et d’autres sans patrimoine dans lesquelles on gère la pauvreté plutôt que la richesse. Vous ne retrouverez donc pas le même risque de fraude selon les cas et en fonction de l’amour au sein de la famille. Les cas les plus complexes sont toujours ceux des familles en guerre. Quand tout le monde ne vit pas dans la même région et donc que certains sont favorisés, ou encore lorsque tout le monde travaille et qu’un petit canard boiteux est resté chez ses parents et donc demande la mise sous tutelle alors que les autres ne veulent pas. Enfin le cas classique, celui qui refait sa vie avec une jeunette et qui utilise le patrimoine à son bénéfice. Et souvent la famille veut protéger de manière légitime donc il n’y a pas nécessairement des fraudes mais bien souvent des oppositions de point de vue.
Existe-t-il concrètement une sorte de business de la mise sous tutelle ?
Franck Hagenbucher-Sacripanti : Il ne s’agit pas d’un trafic mais d’un fonctionnement social, sociétal et sociologique qui fonctionne autour de synergies tranquilles entre la justice, le pouvoir médical, les affaires sociales, les banques les assurances et ainsi jusqu’aux vides-greniers. Il y a donc une récupération très importante de la condition des personnes âgées.
Xavier de la Chaise : Du point de vue des avocats, je ne pense pas. L'avocat, de toute façon, ne fait que présenter une demande au juge, avant une expertise médicale et une enquête. Chaque cas est distinct.
Quelle sont les arnaques les plus courantes liées à des mises sous tutelles ou sous curatelles qu’elles soient prises en charge par des organismes ou par des proches ?
Xavier de la Chaise : L’un des travers les plus fréquents sont les réalisations immobilières,c’est à dire la vente du patrimoine, la modification des placements financiers ou, s’il s’agit de proches, la tentation de réduire à l’extrême le niveau de vie de la personne sous tutelle ou curatelle pour conserver le patrimoine. Les francs détournements de fonds sont plus rares puisqu’il s’agit d’infractions directes à la loi qui n’ont de sens que dans les cas de patrimoines très importants.
Franck Hagenbucher-Sacripanti : Du côté des curateurs et des tuteurs institutionnels, le plus grand des scandales est sans aucun doute la façon dont ils établissent des contrats d’assurance-vie placement avec l’argent du "protégé" et dont la clause bénéficiaire ne revient évidemment pas aux personnes qui auraient été choisies par ce dernier.
Ces tuteurs ou curateurs professionnels vont parfois encore plus loin en magouillant au cours des transactions qu’ils effectuent avec les biens de ceux dont ils ont la charge. J’en veux pour preuve ma mère qui avait alors 92 ans, qui était en fauteuil roulant, victime d’Alzheimer et qu’on a traîné devant le tribunal de grande instance parce que celui qui était en charge de ses biens avait floué l’acheteur de son appartement. Elle a donc dû payer réparation à cet acheteur qui n’avait rien demandé. Bien évidemment j’ai protesté puisque deux ans après ce qui restait de l’argent de ma mère a été placé en assurance-vie sans clause bénéficiaire ce qui relève de l’escroquerie pure et simple. Alors que mes avocats m’assuraient que j’allais gagner sans le moindre doute, j’ai été débouté par le TGI de Nanterre. C’est donc la notion même de preuve qui est occultée puisque j’avais un dossier solide. Ce n’est que mon exemple bien sûr, et on pourra me traiter de conspirationniste, mais il est vrai et il démontre l’existence des synergies que j’évoquais.
En cas de mise sous tutelle, comment les proches peuvent-ils s'assurer du bien-fondé de la décision du juge ? Est-il possible d'annuler une mise sous tutelle ?
Xavier de la Chaise : La nouvelle loi a modifié beaucoup de choses : avant, la mise sous protection était prononcée sine die, et il fallait en demander la main levée quand elle n'était plus justifiée. Aujourd'hui, la décision est limitée dans le temps et le juge doit réévaluer la situation régulièrement, tous les cinq ans maximum. Cela a quand même assaini une partie du problème.
Il y a deux sujets à différencier : la mise sous protection et la mise en œuvre de la protection. Concernant la mise sous protection, il y a peu de fraudes, le juge étant là pour contrôler. Une fois la protection mise en œuvre, c'est plus compliqué : il est vrai que les juges sont débordés, ce sont des dossiers délicats, et donc, dans la gestion elle-même, il peut y avoir des dérives.
Il est donc possible d’intervenir au moment de la décision mais qu’en est-il lorsque celle-ci est déjà prise ? Est-il encore possible de faire machine arrière ?
Xavier de la Chaise : Si la mesure est prononcée, on peut exercer un recours devant la Cour d'appel contre cette décision. Si la famille peut présenter un élément nouveau, comme un nouveau rapport médical, on peut encore saisir le juge afin d'obtenir une décision différente. A cause de l'engorgement des juridictions tutélaires, on peut avoir un délai d'attente très long, entre trois et six mois selon les régions.
Franck Hagenbucher-Sacripanti : Ce n’est pas impossible mais c’est très difficile, c’est pourquoi je donne toujours le même conseil simple et essentiel. Créer un collectif. C’est là notre dernière miette de démocratie en France et qui nous permet de créer un collectif sans obligation financière, juridictionnelle ou autre. Ainsi, pour contacter les médias ou pour les démarches juridiques, vous ne serez plus juste vous, vous serez un organe associatif. Ces collectifs peuvent servir à un combat au niveau national mais celui-ci est extrêmement lourd. Il est plus simple de créer un collectif nominatif pour protéger la dignité de telle ou telle personne. Le plus dur consiste surtout à trouver un avocat digne de ce nom motivé par la question, ce qui est rare.
Le sauveur russe prend son temps
Détentrice d’une grande partie de l’argent placé dans l’île et appelée à l’aide par Nicosie, la Russie pose ses conditions. Pas question pour elle de laisser taxer ses entreprises ou de subir les pertes des banques chypriotes. Elle attend donc un geste des Européens. Extraits.
Dans le sournois affrontement qui l'oppose à l'Union européenne, le Kremlin vient de riposter. L'UE avait bien failli persuader Chypre d'instaurer une taxe confiscatoire qui aurait porté préjudice aux sociétés publiques russes. Il n'est désormais plus possible d'envisager de sortie de crise simple ou sans trop de pertes. Et le manque d'empressement de la Russie à proposer une nouvelle aide à Chypre est un moyen de pression commode sur l'Europe.
Chypre espère une aide de Moscou en échange de certains "avantages" pour l'économie russe. Michalis Sarris, le ministre chypriote des Finances, a souligné qu'il n'était pas venu à Moscou les mains vides [le 20 mars]. Il est venu exposer les possibilités qui s'ouvriraient à la Russie si elle aidait son île. La liste comprend une participation au système bancaire et à l'exploitation du gaz. Ce que Chypre demande, ce n'est absolument pas un crédit, mais la conclusion d'une transaction censée être mutuellement profitable.
Déclarations abruptes de Moscou
Mais la Russie semble maintenant vouloir prendre son temps. Andreï Kostine, le directeur de la banque VTB [Vnechtorgbank], principale victime de la crise chypriote, a annoncé que son établissement n'était pas du tout intéressé par l'achat d'actifs bancaires de l'île : "Sur place, il y a deux banques dans une situation critique qui ont besoin d'être assainies. Il serait absurde de prétendre que nous aurions un intérêt là-dedans. Notre seul intérêt, c'est de retrouver au plus vite la faculté d'effectuer les paiements et de gérer les comptes de nos clients". Et il ajoute que sa banque va devoir"arrêter son activité et quitter purement et simplement le marché chypriote" en cas de "décisions violant le droit, dictées par la politique".
La veille, dans une interview à des médias européens, le Premier ministre Dmitri Medvedev avait déclaré qu'à Chypre, les activités de grandes banques russes et de sociétés avec participation de l'Etat étaient bloquées, alors qu'elles n'avaient aucun problème comptable ni fiscal. C'est ainsi qu’il avait expliqué les déclarations abruptes de Moscou. Il confirmait ainsi au passage que le paradis fiscal chypriote ne constituait pas seulement un attrait pour le secteur privé russe, mais aussi pour les entreprises publiques. Le Premier ministre avait ajouté que la Russie réfléchirait à un soutien à Chypre une fois que l'UE aura proposé son propre ensemble de mesures destinées à combattre la crise.
La Russie fait une pause. Elle ne semble pas voir comment elle pourrait sortir de cette crise en y laissant le moins de plumes possible et a donc décidé de se venger de l'UE en adoptant une position attentiste, car si Moscou se retire, ce ne sont plus 10 milliards d'euros que l'Europe va devoir trouver pour sauver Chypre, mais la totalité de la somme nécessaire, soit 17 milliards.
Insulte personnelle
Confrontés à ce face-à-face géopolitique, certains hauts fonctionnaires européens ont tenté d'adoucir leurs propos. José Manuel Barroso, le président de la Commission, a invoqué l'heure tardive de la réunion des ministres des Finances européens, qui a abouti à une décision samedi aux aurores. C'est ce qui aurait empêché d'avertir Moscou.
Le ton de l'Europe est à l'apaisement, mais cela ne se traduit pas dans les actes. A partir de lundi, l'approvisionnement de Chypre en argent liquide par la BCE pourrait s'interrompre, ce qui laisserait exsangue toute l'économie de l'île. Hier, une source européenne anonyme a menacé les banques chypriotes de liquidation si aucun nouvel accord n'était trouvé au sujet d'une taxe sur les dépôts. Cela a conduit le New York Post à qualifierla passe d'armes entre la Russie et l'UE de bataille épique entre le président Poutine et la chancelière allemande Angela Merkel. Vu de l'étranger, Poutine aurait pris la proposition de taxe confiscatoire de l'Eurogroupe comme une insulte personnelle.
Les experts confirment que l'île n'est pas en état de faire une quelconque proposition vraiment avantageuse à Moscou. "Pour l'économie russe, le seul intérêt de Chypre résidait dans l'usage qu'elle en faisait auparavant, une plate-forme financière échappant à la législation russe, mais raisonnablement solide et prévisible. D'un point de vue d'investisseur, Chypre en tant que pays ne vaut pas mieux que n'importe quel autre Etat politiquement stable de Méditerranée orientale", commente Viktor Koukharski, directeur général du groupe Razvitié. Il note toutefois que, si les banques chypriotes ont engrangé des fortunes en provenance de Russie, elles en ont accumulées encore plus venant d'Angleterre."L'Allemagne a décidé de récupérer une part de ces dépôts secrets pour les verser dans la tirelire européenne", présume M. Koukharski. Mais cela a viré au scandale.
Une version plus longue de ce post est disponible sur le site de Courrier international
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