Le Conseil constitutionnel donne son satisfecit
à François Hollande sur la règle d’or
L’accord donné jeudi par le Conseil constitutionnel à l’adoption de
la règle d’or budgétaire imposée par le nouveau traité européen retire
une épine du pied de François Hollande, d’autant que, par la même
occasion, les Sages, saisis sur cette question le 13 juillet dernier par
le chef de l’Etat, ont validé l’essentiel de la première loi de
finances du pouvoir socialiste. La question est rendue d’autant plus
aisée que ce feu vert précise, en outre, que cette inscription ne
nécessite pas, du point de vue du Conseil, une révision
constitutionnelle dont le chef de l’Etat entendait bien se dispenser,
tant la règle d’or divise la classe politique, jusqu’au sein de la
majorité. En effet, ont observé les juges constitutionnels, les traités
de Maastricht et Lisbonne contiennent déjà une limitation de déficit
public (les fameux 3 %) et avaient été jugés, lors de leur adoption, non
contraires à la Constitution. Et un simple changement de taux,
notent-ils, ne change rien juridiquement.
Le locataire de l’Elysée peut donc respirer normalement, et se
préparer à inscrire dans le droit français la règle d’or qui limite à
0,5 % du PIB le déficit public ; et par le moyen d’une simple loi organique.
Depuis le fort de Brégançon, François Hollande a instantanément pris
acte de cette décision selon laquelle « le traité sur la coordination,
la stabilité et la gouvernance signé à Bruxelles le 2 mars 2012, ne
comportait aucune clause contraire à la Constitution », déclare un
communiqué de la présidence, et demandé au gouvernement de préparer
« rapidement » la ratification du traité. Dans la foulée, le Premier
ministre Jean-Marc Ayrault a annoncé engager « immédiatement la
préparation du projet de loi autorisant la ratification du traité et du
projet de loi organique qui seront présentés au Parlement », a priori
fin septembre.
INTER
Satisfaction socialiste
Elisabeth Guigou, présidente socialiste de la Commission des
Affaires Etrangères à l’Assemblée, a dit sa satisfaction, et demandé que
« le Parlement soit rapidement saisi du traité ». Elle précise
néanmoins que, « pour être pleinement acceptés des citoyens européens et
donc être mis en œuvre efficacement, les nouveaux outils de
coordination et de supervision auront besoin d’une légitimité
démocratique renforcée ». Et alors ? A priori, on n’en saura pas plus…
De son côté, Martine Aubry évoque « une nouvelle voie pour la France
et l’Europe ». « Le Parti socialiste se félicite de cette issue,
ouvrant la voie à une ratification par le Parlement des décisions actées
lors du dernier sommet européen et qui permettront de remettre l’Europe
sur les rails de la croissance et de l’emploi », poursuit-elle.
Quant à Bernard Cazeneuve, ministre délégué aux Affaire européennes,
il s’est félicité de ce que le Conseil constitutionnel « valide
l’approche retenue par le gouvernement ».
Le Parti de Gauche, en revanche, continue à réclamer un référendum
contre « ce pacte austéritaire ». Eric Coquerel, son secrétaire
national, se dit stupéfait de cette décision qui « implique un abandon
de souveraineté du parlement national sur le budget ».
INTER
Quoi de neuf ?
Et c’est bien là, en effet, que le bât blesse… Laquelle, de toutes
les instances ou personnalités qui s’expriment sur le sujet, a autorité
pour ainsi brader notre souveraineté ? Car c’est bien ce qui va
ressortir de l’adoption de ce traité, de ce nouveau pas vers une union
bancaire, vers laquelle, malgré une crise qui n’en finit plus de
souligner l’incapacité des autorités européennes à régler nos problèmes,
nous allons à grands pas !
C’est d’autant plus aberrant que François Hollande, avant son
arrivée à l’Elysée, était un farouche opposant audit traité, et que la
majorité des socialistes y voyaient une « fausse règle d’or »…
D’ailleurs Bernard Cazeneuve, si satisfait aujourd’hui, était, tout
comme l’actuel ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius, un
farouche opposant au projet de Constitution européenne ; un homme qui a
voté « non » au traité de Lisbonne…
Oh ! bien sûr, on nous explique que, entre temps, François Hollande a
obtenu l’ajout d’un volet croissance de 120 milliards d’euros. Un petit
détail, cependant, pour observer que ce volet croissance est un texte
différent de celui du traité, et que le texte que le président de la
République nous impose aujourd’hui est donc celui qu’il dénonçait hier !
D’où les critiques qui se multiplient désormais. Outre le Front de
Gauche, on observe à droite qu’il valait bien la peine de s’opposer
ainsi à Nicolas Sarkozy, pour finir par adopter le texte même que, sous
l’influence certaine d’Angela Merkel, il proposait lorsqu’il était aux
affaires. Valérie Pécresse estime ainsi que François Hollande a « fait
perdre un an à la France et à l’Europe (…) du fait de leur opposition à
la règle d’or débattue au Parlement l’été dernier et de leurs
atermoiements successifs depuis le début de l’année ».
Au sein même du Parti socialiste, l’opposition se fait entendre. Du
Sénat, Marie-Noëlle Lienemann affirmait jeudi qu’elle ne voterait pas la
ratification du traité du pacte budgétaire.
Elle précisait : « Je ne suis pas d’accord, ça n’est pas la
renégociation » annoncée par François Hollande durant sa campagne. « Mon
intime conviction, c’est qu’on est en train de refaire des erreurs
qu’on a commises par le passé. Je suis persuadée que la défaite de
Lionel Jospin tient pour une part à l’acceptation du traité d’Amsterdam.
(…) Tout cela me parait d’un grand danger, c’est l’austérité à vie. »
Et Marie-Noëlle Lienemann ajoutait : « Je ne pense pas que je serai
la seule. (…) En tout cas on est très nombreux à ne pas vouloir
l’approuver. »
On comprend la satisfaction de François Hollande d’avoir vu le
Conseil constitutionnel se ranger à son avis sur une non-révision de la
Constitution…
A ce compte, il pourra même nous dire qu’il se contente de respecter ses promesses de campagne. Tout en faisant l’inverse !